SYNOPSIS: Ma’Rosa a quatre enfants. Elle tient une petite épicerie dans un quartier pauvre de Manille où tout le monde la connaît et l’apprécie. Pour joindre les deux bouts, elle et son mari Nestor y revendent illégalement des narcotiques. Un jour ils sont arrêtés. Face à des policiers corrompus, les enfants de Rosa feront tout pour racheter la liberté de leurs parents.

Ma’Rosa est le quatorzième long métrage de Brillante Mendoza, réalisateur philippin qui perce peu à peu à l’international grâce aux nominations et récompenses qu’il récolte en festival. Il avait signé notamment Thy Womb, découvert au Festival du Film Asiatique de Deauville 2013. Présentant de magnifiques couleurs et de très beaux plans, il restait cependant loin de ses personnages, transformant cette histoire émouvante en film clinique, comme une sorte de magnifique reportage pour Thalassa.Depuis, il a réalisé le premier grand discours au congrès du nouveau président philippin controversé Rodrigo Duterte, surnommé « le Trump philippin ». Après son élection et à la suite de ses promesses, celui-ci a lancé une guerre aveugle contre la drogue, réclamant ouvertement de la population qu’elle mette à mort tout dealer. On aurait pu croire que Mendoza se soit rallié aux sirènes du populisme, il n’en est rien. Avec Ma’Rosa il prend le contre-pied total de Thy Womb dans la réalisation et des déclarations manichéennes de Duterte dans le propos, pour se tenir au plus près de ses personnages dans une plongée viscérale au cœur des quartiers pauvres de Manille où drogue et corruption font bon ménage.

Le style Mendoza, ce sont des histoires présentées comme des documentaires, montrant la vie des différentes communautés et régions philippines avec un accent social très fort. Ma’Rosa porte à bout de bras sa petite famille. La misérable boutique familiale ne suffisant pas à payer des études et de quoi vivre à ses enfants et n’étant pas aidée par un mari accro à la drogue, elle s’est mise elle-même à en vendre au comptoir à des habitués. Lorsqu’une dénonciation suivie d’une descente de police l’amène au commissariat avec son mari, on lui présente deux choix : payer une somme énorme aux policiers pour qu’ils passent l’affaire sous silence, ou bien aller en prison. La famille va se démener pour que tous soient laissés libres.

Mendoza décrit une société au bord du gouffre, où l’illégalité devient une question de survie. Inspirée d’une histoire vraie, les angoisses, les peurs et les tensions de la famille sont omniprésentes et la caméra portée à l’épaule filme cela de près, comme si nous étions présents avec eux. C’est un film étouffant, dur et dans le même temps rempli d’espoir, car l’entraide parmi les victimes de la misère est là, la famille soudée, mais comme la fin du film l’indique bien, cela n’est jamais fini, leur vie est une course permanente contre la corruption, la pauvreté et l’humiliation. Jaclyn Jose, l’interprète principale mérite pleinement son prix d’interprétation féminine du festival de Cannes, traversant cette histoire avec la volonté et la résilience de la mère de famille qui refuse de se laisser abattre malgré les épreuves, pour qui abandonner n’est pas une option. Mendoza apporte de l’humanité, de la nuance, de la réalité visible, palpable dans cette discussion, abattant les arguments populistes qui font de ces dealers pauvres des criminels sans foi ni loi. Parce que la loi n’existe pas pour ces quartiers de misère et leur seule force est leur foi dans leur capacité, non pas même de s’en sortir, mais juste de survivre.

Titre Original: MA’ROSA

Réalisé par: Brillante Mendoza