SYNOPSIS: Dans un futur proche, l’ordre mondial a changé. Avec ses 10 millions de chômeurs, la France fait désormais partie des pays pauvres. La population oscille entre révolte et résignation et trouve un exutoire dans des combats télévisés ultra violents où les participants sont dopés en toute légalité et où tous les coups sont permis. Reda, dit Arès, est un ancien combattant qui vit de petits boulots de gros bras pour la police. Tout va changer lorsque sa soeur se fait arrêter et qu’il doit tout mettre en oeuvre pour les sauver : elle et ses filles.

Jean-Patrick Benes s’attache à rendre crédible ce futur dystopique, en faisant une utilisation raisonnée et intelligente de ses effets spéciaux. Le paysage urbain est dominé par les nombreuses tours des multinationales, auxquelles l’État a accepté de laisser le droit de vie et de mort sur ses citoyens. Des écrans géants recouvrent de nombreuses façades et diffusent les combats ultra violents des gladiateurs/cobayes/têtes de gondole des laboratoires pharmaceutiques. Les images de parisiens vivant dans des tentes au milieu de Paris, sont en fait des images tournées pendant la révolution ukrainienne et l’occupation de la place Maïdan à Kiev. Leur « intégration » dans ce Paris futuriste est parfaitement réussie. Point de gadgets révolutionnaires ou de voitures volantes, Arès s’attache avant tout à livrer une vision de l’état économique et social de la société française de 2035. En cela, bien que certains le qualifient de Blade Runner français, Arès lorgne, à notre avis, plus du côté de Soleil Vert (Richard Fleischer, 1973) ou des Fils de l’homme (Alfonso Cuaron, 2006). S’agissant de ses influences françaises, on pense à Fahrenheit 451 (François Truffaut, 1966) et à l’excellent Le prix du danger (Yves Boisset, 1983). Pour autant ce souci de crédibilité, n’empêche pas Benes de se lâcher notamment à travers une fausse campagne alertant des dangers sur la santé d’un lait bourré d’hormones que consomme Arès, comme certainement des centaines de milliers de français; ou sur une fausse publicité pour une émission promettant une importante somme d’argent au chômeur qui tiendra le plus longtemps face à un free fighter.
Comme son personnage éponyme, Arès a un côté bourrin qu’il assume totalement, poussant le trait dans la mise en scène des combats et la caractérisation des combattants dont les noms font sourire (« La Masse », « Panzer », …) et qui n’ont pas à rougir de la comparaison avec Ivan Drago. Ola Rapace a la carrure et le charisme pour interpréter ce personnage brut de décoffrage mais pas bas du front. Son jeu est certes limité et certaines de ses répliques tombent un peu à plat, mais le scénario lui a réservé quelques punchlines savoureuses qui font souvent mouche. Si on ne boude pas son plaisir c’est grâce à ses personnages secondaires qu’Arès prend de l’épaisseur et se démarque de ce qui ne serait alors qu’un actionner efficace mais vite oubliable. Ses deux nièces: une petite futée et une adolescente rebelle sont des archétypes attendus dans ce genre de récit, elles ne viennent pas apporter un sentimentalisme convenu et humanisent Arès. De même, le personnage de Myosotis, le voisin travesti au grand cœur, aurait pu être purement fonctionnel et même embarrassant s’il n’était interprété par l’excellent Micha Lescot (membre de la Comédie Française) qui ne tombe jamais dans la caricature ou la vulgarité. Il apporte une touche d’excentricité bienvenue dans ce récit très chargé en testostérone et ses échanges avec Arès, bien que brefs, sont toujours drôles. Louis Do de Lencquensaing campe quant à lui, un excellent patron cynique, obsédé par les bénéfices de la société qui sponsorise Arès, qui se fait tout petit quand les actionnaires lui demandent de rendre des comptes. Comme nous le disions pour le personnage de John Malkovich dans Deepwater, le PDG de Donevia est l’archétype du salaud dont on attend qu’une chose: que le héros vienne lui coller son poing dans la figure à la fin du film.
Arès évolue toutefois souvent sur un fil et la bascule ne se fait pas toujours avec une grande légèreté si bien qu’il arrive que l’on s’interroge quand le récit revient à un premier degré qui apparaît un peu surjoué au regard de la rupture de ton opérée. Il n’est pas certain que l’effet comique de quelques répliques soit voulu mais ce n’est à vrai dire pas vraiment dérangeant. Le scénario d’Arès bien que se concentrant sur l’essentiel, c’est à dire à la quête de son personnage principal, réserve quelques surprises bienvenues qui maintiennent constamment l’intérêt du récit. Comme dans tout bon actionner, les salauds et les trahisons ne manquent pas mais on ne perd pas de vue la dimension plus politique du récit et c’est une des grandes réussites d’un film très malin qui parvient à iconiser son héros aux termes d’un dernier tiers assez emballant. Le miracle s’est donc réalisé, Arès n’est pas un chef-d’œuvre qui marquera l’histoire du genre mais est une belle réussite, dont on sent toutes les inspirations sans en voir le décalque à l’écran et qui espérons le, convaincra d’autres producteurs de se lancer dans l’aventure.
Titre Original: ARÈS
Réalisé par: Jean-Patrick Benes
Casting : Ola Rapace, Micha Lescot, Louis Do de Lencquensaing,
Thierry Hancisse, Hélène Fillières, Ruth Vega Fernandez…
Genre: Action, Science fiction
Sortie le: 23 novembre 2016
Distribué par: Gaumont Distribution
TRÈS BIEN
Catégories :Critiques Cinéma