SYNOPSIS: C’est tellement jouissif d’être un salopard ! Face à une menace aussi énigmatique qu’invincible, l’agent secret Amanda Waller réunit une armada de crapules de la pire espèce. Armés jusqu’aux dents par le gouvernement, ces Super-Méchants s’embarquent alors pour une mission-suicide. Jusqu’au moment où ils comprennent qu’ils ont été sacrifiés. Vont-ils accepter leur sort ou se rebeller ?
Suicide Squad est indubitablement un film malade, malade des luttes intestines entre un réalisateur voulant pousser une version qu’il veut sombre et chaotique mais pas forcément maîtrisée et un studio qui se comporte avec ses adaptations de comics comme le chien qui chasse sa propre queue pensant rattraper les critiques négatives sur Batman v Superman en transformant cette version superhéroique des Douze Salopards en un film pop et fun dans la veine des Gardiens de la Galaxie. Hélas Suicide Squad n’a pas le charme, subversivement innocent de l’opus James Gunn. Tantôt ultra-rapide ou lent, adoptant une palette fluo avant de basculer dans les ténèbres, le film semble être en proie à une lutte de versions concurrentes qui le rend thématiquement et structurellement confus. Le film s’ouvre par l’introduction de chaque membre de l’équipe par Amanda Waller (Viola Davis) à l’origine du projet de Task Force X via de courtes séquences clippesques précédées d’un graphique expliquant qui ils sont. Cette entrée en matière parvient à retranscrire le feeling de la lecture des comics, que l’on peut soupçonner de faire partie du montage commandé par la Warner et qui ressemble à la patte du fraîchement nommé Geoff Johns, grand manitou de DC comics qui aime utiliser ce procédé dans les comics qu’il écrit.

Mais après une telle introduction alors qu’on s’ attend à des séquences ou les membres de l’équipe vont se rencontrer et s’entraîner, on a affaire à une présentation redondante des personnages avant de basculer immédiatement vers la mission finale qui voit l’escadron envoyé vers Midway city où a émergé le grand méchant du film qui semble attendre tranquillement leur arrivée. Si il pâtit du réarrangement des séquences, qui nuisent parfois à la compréhension (on réalise bien tard que Waller est sur place), de scènes d’action pas toujours lisibles et de choix de design parfois douteux, ce deuxième acte qui voit la Task Force X arpenter une cité évacuée livrée aux forces maléfiques, évoque l’ambiance d’ Escape from New York (les explosifs dans le sang dont sont dotés les membres de l’équipe pour les contrôler est un hommage au film de Carpenter mais figure déjà dans le comics originel). Le troisième acte est le plus problématique d’une part parce qu’il repose encore sur le cliché -désormais récurrent- des films de super-héros, où un portail s’ouvre au bout d’un rayon lumineux dans le ciel (quoique dans le cas de Suicide Squad le plan des méchants, le point noir du film, est si flou qu’on ne connait vraiment ni sa nature, ni sa fonction) protégé par une horde de créatures servant de chair à canons. D’autre part, parce que le genre nécessite que nos anti-héros se rassemblent avant l’assaut final, le script leur ménage une pause ou dans leurs dernières minutes ces personnages qui n’ont eu que mépris les uns pour les autres se considèrent comme faisant partie d’une même famille d’outsiders. Cette évolution dictée par la mécanique du genre et non par l’interaction des personnages n’est pas « méritée » et sonne faux comme du Walt Disney dans un film de Peckinpah. Pire, Captain Boomerang (Jay Courtney assez bon malgré sa réputation et un personnage sous-écrit) déserte l’équipe avant de revenir sans la moindre explication quelques minutes plus tard dans une scène ou l’équipe marche en slow-motion vers la bataille finale. Cette verrue visiblement imposée par le studio tranche avec l’aspect plus nihiliste du reste du métrage.

Le film, paradoxalement, permet de passer un très bon moment tout d’abord parce qu’Ayer a la chance d’avoir dans son casting d’authentiques superstars : un Will Smith au top de sa forme qui apporte sa présence magnétique à son personnage de Deadshot et se fait le vecteur idéal des dialogues badass d’Ayer. Margot Robbie est éclatante même si certains dialogues censés convaincre les gens autour qu’elle est vraiment dingue apparaissent un peu « forcés ». Le film laisse entendre que sa folie apparente est une façade destinée à cacher le fait qu’en l’absence du Joker dont elle est follement amoureuse elle cache un cœur d’or la réduisant à un statut réducteur de petite amie, mais malgré tout la jeune australienne dévore l’écran et transcende les faiblesses du personnage. La version du Joker présentée ici semble assez confuse, sans doute parce que beaucoup de ses scènes ont été tronquées, même s’il a toujours été prévu pour n’être qu’un personnage secondaire du film. L’aspect « Bowie période Thin White Duke » que Jared Leto lui donne est assez appréciable et avec plus d’espace pour le développer il saura à n’en pas douter être très convaincant dans le rôle. Le personnage de Diablo est en revanche une agréable surprise et le jeu de Jay Hernandez le plus développé du film (et quelque part son vrai héros) à qui Ayer donne à jouer un poignant monologue. Viola Davis est la retranscription parfaite de la Amanda Waller des comics. Ayer la rend encore plus impitoyable que sa version papier et l’actrice parvient à rendre même des dialogues d’exposition passionnants. Joel Kinnaman qui remplace au pied levé Tom Hardy est un miscast dans le rôle de Rick Flag, le relai implacable sur le terrain de Waller et semble tout aussi instable que les membres de l’équipe. Son manque de charisme déséquilibre le rapport de force qui devrait s’établir avec Deadshot.

Si la réception critique du film n’aura pas permis à Warner de s’en servir pour établir un ton définitif pour les films du DCEU,Suicide Squad a le mérite d’ouvrir considérablement son univers cinématographique. Ayer fait ainsi se côtoyer méchants de Batman et Flash, méta-humains ou sorcières de façon naturelle. La façon dont il a utilisé Batman (Batfleck !!!) vu du point de vue de ses vilains est très appréciable. Il n’hésite pas, qui plus est, à faire des choix graphiques audacieux, des déguisements des hommes de main du Joker au design très réussi et « Kirbyen »du méchant. Il réussi aussi quelques séquences visuellement splendides comme la « renaissance » d’Harley Quinn dans les cuves de la Ace Chemical. Au final il est peu probable que le film, avec son énergie foutraque un peu adolescente, aurait été fondamentalement différent sans les remontages imposés par la Warner. Pas plus que les autres genres, les CBM n’ont pour obligation d’être tous des films profonds comme The Dark Knight. Le Suicide Squad de David Ayer avait vocation à être cette série B parcourue de quelques fulgurances et de moments nanardesques, en quelque sorte le reflet de beaucoup de comics de super-héros mainstream qu’il adapte et c’est déjà pas mal.
Titre Original: SUICIDE SQUAD
Réalisé par: David Ayer
Casting : Will Smith, Margot Robbie, Viola Davis,
Joel Kinnaman, Jay Courtney, Jay Hernandez …
Genre: Action, Fantastique
Sortie le: 03 août 2016
Distribué par: Warner Bros. France
MOYEN
Catégories :Critiques Cinéma
Énorme déception, pour moi, également. Quelques fulgurances géniales au profit d’un scénario inepte.
Effectivement,même la version longue,ils prennent vraiment du foutage de gueule et ils prennent des gens pour des pigeons à ce stade là.