Critiques Cinéma

SNOWBOARDER (Critique)

2 STARS PAS GENIAL

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SYNOPSIS: Gaspard, un jeune snowboarder talentueux mais peu ambitieux, vit et travaille à l’Alpe d’Huez, dans le magasin de surf de Beshop, un ancien entraîneur professionnel qui l’héberge et l’entraîne en échange de quelques travaux. Mais le rêve de Gaspard, c’est de devenir snowboarder professionnel, tout comme Josh Atterssen, champion charismatique mais imprévisible.Sa vie bascule lorsque ce dernier lui propose de l’entraîner lui-même à Gstaad, en Suisse, et de rejoindre son team. Naïf, n’ayant pas assez confiance en lui, Gaspard accepte l’offre et quitte Beshop sans état d’âme pour retrouver Josh. Une fois à Gstaad, la vie lui semble soudain plus belle et facile. Mais le peu recommandable Josh a un tout autre projet pour lui… 

En ce qui concerne le cinéma d’action français, il y a une bonne et une mauvaise nouvelle. La bonne, c’est qu’il s’est forgé une identité précise. La mauvaise, c’est qu’il est à double visage : d’un côté, Luc Besson poursuit ses études de marché avec des nanars caricaturaux, torchés en quatrième vitesse et calibrés pour cartonner à l’international, et de l’autre, quelques têtes brûlées tentent le coup avec des projets susceptibles de sortir un peu des sentiers battus. Dans le cas de Snowboarder, c’était trop beau pour être vrai : un projet désiré comme l’antithèse d’une astuce commerciale surfant sur une idée marketing (en l’occurrence le snowboard, peu traité au cinéma), une bande-annonce scotchante, un tandem d’acteurs repêchés chez Claire Denis, et un jeune réalisateur aussi passionné par son sujet que réputé pour ses courts-métrages (Olias Barco). De quoi sentir venir l’énorme trip montagnard à base de glissades sur poudreuse et de scènes d’action survoltées. Des espoirs bien trop élevés, tant le projet aura connu ce qu’il est convenu d’appeler une sortie de piste. Mésentente avec les producteurs, scénario trop souvent remanié, casting nanti de « pièces ajoutées » pour faire cool, coupes imposées au montage final… Les justifications délivrées par Barco dans ses interviews ne suffisent pourtant pas à ôter au film son habit de ratage. C’est toutefois un ratage attachant, une sorte de montagne imposante qui engloutit toutes ses bonnes idées sous une avalanche de poncifs et d’enjeux néantisés, mais où quelques fulgurances font figure de rescapés. Et pour cause : malgré une réelle impossibilité à avoir su éviter les bosses sur la piste noire, la promesse de Barco de ne pas livrer un énième produit calibré pour les djeun’s qui font le beurre des multiplexes reste bien présente, insidieuse, au travers d’une narration et d’un rythme presque dérangeants, tant est si bien qu’on ne sait même plus si cela résulte d’un accident ou pas. Sacrée énigme que ce Snowboarder

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Déjà, on pourra affirmer que le film d’action tant attendu n’a pas répondu présent, puisque le film lorgne plutôt vers une sorte de thriller psychologique, bâti autour de l’affrontement entre deux jeunes snowboarders. Le premier, Josh Attersen (Grégoire Colin), est une star internationale qui, à la suite d’une violente altercation avec un sponsor, effectue des travaux d’intérêt général une partie de la journée et passe la nuit en prison (où il casse parfois une chaise contre un mur, allez savoir pourquoi…). Le second, Gaspard (Nicolas Duvauchelle), est un jeune amateur surdoué qui passe sa vie à dévaler les pistes, à se perfectionner pour devenir un champion (Josh étant pour lui une idole et un exemple) et à réparer des planches dans un magasin de snowboard. Alors, forcément, quand le premier propose au deuxième de rejoindre son équipe, le bleu voit l’occasion de quitter la piste verte pour accéder au stade supérieur. Le voilà catapulté dans un village suisse aussi luxueux que la Place Vendôme (vous savez, celui où Johnny Hallyday et Roman Polanski avaient élu résidence…), et où, après avoir s’être habitué au quotidien local des obsédés de la planche, notre gaillard se sent prêt à emprunter la piste noire. Entraîné et manipulé par son idole, il devient un pro, dévale la poudreuse sur les pistes pour ensuite la sniffer dans les bars, se tape des tas de filles faciles (dont une Mélanie Laurent encore débutante), flirte avec la copine de son idole (aïe !), s’enferme dans une attitude rebelle, rejette son entourage, perd son innocence, devient con, etc… Mais forcément, in fine, la morale revient toquer à sa tête pour lui dire que non, le plus important n’est pas de devenir une star sportive, c’est d’oublier le strass et les paillettes, de rester fidèle à la montagne, et de continuer à dévaler les pentes, loin de tout ça, en toute liberté…

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Voilà pour le scénario, et autant l’avouer tout de suite, spoiler une bonne partie de son contenu n’a rien d’un acte de traîtrise. Sans doute parce que son intérêt, quasi nul pour ceux qui ont déjà touillé cent fois le cocktail « succès + déchéance », est à la mesure d’une multitude de dialogues édifiants (grand moment : « Tu penses souvent à la mort ? – Non, il n’y a pas de neige au paradis »). De quoi réitérer le plantage total du ringard The eXtremists, gros nanar signé Christian Duguay et sorti quasiment au même moment ? Curieusement non. La question est pourtant très simple : en tant que spectateur, pourquoi s’intéresser à un film sur le snowboard ? Déjà, certainement pas pour qu’on nous ressorte le traditionnel couplet sur « le succès, ce n’est pas important, et la célébrité, c’est un monde pourri », tout juste bon à garnir les scripts ni faits ni à faire des sitcoms AB. En revanche, il était intéressant de découvrir comment les sensations fortes d’un sport aussi évasif allaient être retranscrites. Sur ce point, c’est peu dire si Barco a réussi l’essentiel : dès son éblouissante scène d’ouverture, la montagne y est décrite comme un paysage vierge, quasi paradisiaque, qu’il va s’agir d’apprivoiser et d’investir en toute liberté, et dans lequel l’humain s’abandonne à sa quête d’absolu, ce qui donne aux scènes de glisse un caractère sensoriel plutôt rare. Littéralement époustouflants et nimbés d’une musique techno tout bonnement sensationnelle (signée Jean-Baptiste Loussier), ces quelques instants d’action pure constituent le point fort du film et révèlent la dimension planante de cette discipline sportive fascinante sous bien des aspects.

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Reste que, pour investir cette belle apesanteur neigeuse, il faut tout de même se coltiner un infernal fourre-tout de poncifs qui, en soi, laisse planer de sérieux doutes sur l’élaboration initiale du projet, des enjeux du scénario jusqu’au choix des acteurs. Les acteurs, parlons-en : Nicolas Duvauchelle n’a jamais été aussi mauvais à force de surjouer le rebelle avec le charisme d’un minet de la Star Ac’, Grégoire Colin semble avoir la tête ailleurs avec son air de skinhead déphasé, Juliette Goudot révèle un surprenant teint neigeux (serait-ce pour ça que nos deux snowboarders craquent pour elle ?), Mélanie Laurent n’est là que pour faire acte de présence (pour info, lors d’une interview pour Première en 2006, elle confiait avoir honte du film), Thierry Lhermitte fait un clin d’œil sans finalité aux Bronzés font du ski et même la magnifique Clara Morgane nous offre un superbe striptease dans un coin lounge d’une boîte VIP. Tous semblent végéter dans des scènes qui hésitent entre le néant intégral et le racolage branchouille, le film ne devenant rien d’autre qu’un produit de fast-food, bombardé de clichés et de placements de produits. Ici, on montre un jeu vidéo Atari entre deux scènes sans que cela ne serve à quoi que ce soit et quand le héros veut une bière, il demande une Desperado (pour être sûr qu’on ait bien compris, la serveuse répète le nom une seconde fois…). D’où un sentiment d’échec clair et net, aussitôt digéré aussitôt oublié, mais pas anodin pour autant dans ses ambitions… De son côté, revenu d’un long passage à vide (presque sept ans !) depuis l’échec du film, Olias Barco aura finalement rattrapé le coup avec l’excellent Kill me please (sorti en 2010), qui, malgré une distribution limitée, aura multiplié les récompenses et les retours très positifs. Comme quoi un surdoué peut toujours se relever après une gamelle à la lisière du hors-piste.

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Titre Original: SNOWBOARDER

Réalisé par: Olias Barco

Casting : Nicolas Duvauchelle, Grégoire Colin, Mélanie Laurent,

Juliette Goudot, Clara Morgane, Thierry Lhermitte…

Genre: Action, Aventure

Sortie le: 02 avril 2003

Distribué par: Mars Films

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