Critiques Cinéma

ARRÊTE-MOI SI TU PEUX (Critique)

5 STARS CHEF D'OEUVRE

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SYNOPSIS: Dans les années soixante, le jeune Frank Abagnale Jr. est passé maître dans l’art de l’escroquerie, allant jusqu’à détourner 2,5 millions de dollars et à figurer sur les listes du FBI comme l’un des dix individus les plus recherchés des Etats-Unis. Véritable caméléon, Frank revêt des identités aussi diverses que celles de pilote de ligne, de médecin, de professeur d’université ou encore d’assistant du procureur. Carl Hanratty, agent du FBI à l’apparence stricte, fait de la traque de Frank Abagnale Jr. sa mission prioritaire, mais ce dernier reste pendant longtemps insaisissable…

Nous sommes en 2002 et Spielby est en grande forme. Sa version perso de Pinocchio (A.I) et son manifeste post-11 septembre précoce (Minority Report) marquent son grand retour à la SF et prouvent à qui veut bien l’entendre son aplomb pour sauter d’un genre à l’autre. Pour le premier biopic du réalisateur, retrouver Tom Hanks (après leur seconde collaboration sur la série télé Band Of Brothers) relèverait presque de la nécessité tant le duo fait des étincelles ensemble. Bien qu’il ait affaire à un genre qui fait souvent peur de part ses limites en terme d’enjeux narratifs, Spielberg n’aura pas à s’en faire puisque le personnage qu’il aura à filmer sera en parfaite adéquation avec ses obsessions de réalisateur et d’homme. Un héros spielbergien par excellence. Petits airs de saxophone jazzy et motifs stylisés portés par l’influence de Saul Bass, le générique d’ouverture somptueux plante le décor d’une Amérique sixties gracieuse comme une carte postale. En son sein, Frank Abagnale Jr. (Leonardo DiCaprio), un jeune ado de 16 ans admiratif de la réussite de son père et obnubilé par le récit si romantique de la construction de son foyer. Alors que la cellule familiale, qu’il contemple avec euphorie dans son salon, constitue une valeur inestimable à ses yeux, tout son petit monde s’effondre quand il assiste impuissant à la chute sociale de son père, précipitée par un État abusif, et surtout au traumatisme du divorce de ses parents. Horrifié, Frank se résout à fuguer avant de se faire passer pour ce qu’il n’est pas. On peut d’abord deviner un parallèle certain entre le parcours du jeune homme et celui de Spielberg lui-même. Le Steven adolescent a en effet lui aussi très mal vécu le divorce de ses parents. Cet élément personnel se retrouvera alors dans toute son œuvre, traitant quasi exclusivement de familles dysfonctionnelles (E.T, La Guerre Des Mondes, Rencontres du Troisième Type…). Par la suite, il passe aussi ses journées à faire des films avec la caméra Super 8 empruntée à son père. Pareillement à Frank qui imite son père en empruntant ses combines, il se réfugie dans la mise en scène pour surmonter son trauma d’adolescent et n’en restera pas là. A 18 ans, il se fait passer pendant tout un été, pour un employé des studios Universal en s’y rendant tous les jours en costard cravate et attaché-case à la main. Et c’est cette imposture qui lui offrira finalement ses premiers jobs de cinéaste. Conscient de ce que cela implique, Spielberg monte alors dans Arrête-Moi Si Tu Peux tout un discours sur le pouvoir du cinéma et de la tromperie.

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S’il se heurte à des échecs pour ses premières tentatives d’escroquerie, c’est parce que Frank ne porte pas le bon costume. L’habit a l’air de faire le moine et l’hypocrisie de la société est dès lors pointée du doigt quand le prestige de l’uniforme d’un pilote de ligne s’avère plus convaincant en face du banquier que la dégaine de l’étudiant fauché. Quand l’agent Carl Hanratty (Tom Hanks) est sur le point de lui passer les menottes dans une chambre d’hôtel, c’est la mise en scène, le jeu de l’acteur et la gestion de l’environnement qui lui permettront de s’en sortir. Figure de l’ado qui cherche sa propre identité, Frank va trouver son inspiration à la meilleure des écoles : au cinéma et surtout à la télévision. Comme pour Spielberg, une fascination s’exerce envers le petit écran qui lui offre ses premiers exemples dans le métier, à travers les séries télé. Pas loin d’incarner le Bip Bip échappant sans cesse au Coyote, il est une sorte d’acteur caméléon qui change de rôle au gré de la situation. Pas tant un homme qui fuit pour prospérer mais un gamin à la recherche d’un idéal, d’une famille comme objectif ultime. Pensant que son père pourra reconquérir sa mère grâce à une Cadillac et un beau costume, pour Frank, ce chromo familial perdu et si cher à Spielberg (qu’il revoit chez ses beaux-parents), ne pourra être retrouvé qu’à travers cette culture de la fortune inculquée par le père biologique. Car de père, Frank en a 2. Quand l’un le pousse à continuer de tricher au nom de la réussite sociale (Christopher Walken), l’autre cherche à l’arrêter au nom de la morale et de la justice (Tom Hanks). Égaré entre ces 2 figures paternelles qui s’opposent, il devra trouver la rédemption dans l’adhésion même à un nouveau foyer familial qu’il n’aurait jamais redouté et sous son véritable visage. Film d’arnaqueur ludique et comédie dramatique parfaitement dosée, Arrête-Moi Si Tu Peux se montre généreux aussi bien en plans-séquences audacieux qu’en instants de bravoure inoubliables (la scène de l’aéroport sous Come Fly With Me de Sinatra, l’irruption successive des revolvers dans le cadre), fait preuve d’une esthétique extrêmement soignée (restitution de l’ambiance via de subtils jeux de lumière) et où le montage concilie avec une maîtrise rare les aller et retours du récit pour mettre en place un ordre d’évènement clé qui prend tout son sens. Direction d’acteurs irréprochable et casting sans fausse note (de Christopher Walken à Nathalie Baye en passant par Amy Adams), Spielberg offre ici à Tom Hanks et Leonardo DiCaprio l’une des plus belles compositions de leur carrière respective en leur donnant l’occasion d’explorer une relation père-fils expressive, touchante, drôle et à la mesure de leur talent. Jeu de faux semblants et condition familiale, Arrête-Moi Si Tu Peux vient s’ajouter à la (longue) liste des chefs-d’œuvre mésestimés de Steven Spielberg, en entretenant une authentique cohérence avec la filmo et la vie du réalisateur.

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Titre Original: CATCH ME IF YOU CAN

Réalisé par: Steven Spielberg

Casting : Tom Hanks, Leonardo DiCaprio, Christopher Walken,

Nathalie Baye, Amy Adams, Martin Sheen  …

Genre: Comédie, Drame, Thriller

Sortie le: 12 Février 2003

Distribué par: United International Pictures (UIP

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