Depuis 20 ans, Jamel Debbouze fait partie du paysage culturel Français. Catalogué modèle d’intégration, ayant participé à certains des plus grands succès cinéma hexagonaux de ces dernières années (Le Marsupilami, Le Fabuleux Destin d’Amélie Poulain, et surtout Asterix et Obelix : Mission Cléopâtre), Jamel est également devenu l’une des personnalités préférées des Français, de par son engagement citoyen estampillé « banlieue », ce qui est à peine une caricature. Ce petit point sur qui est Jamel Debbouze s’impose car Pourquoi j’ai pas mangé mon père est un projet qui l’a occupé ces sept dernières années, et dans lequel il a mis beaucoup de lui-même. Scénariste, réalisateur et interprète principal de ce film d’animation, le fondateur du Comedy Club qui porte son prénom a fait pour son premier film ce qu’il fait dans la vraie vie : il a été dans tous les sens. Certes, porter pour un premier film un projet de 40 millions d’euros est en soi déjà un exploit. Surtout lorsque ce projet est un film d’animation en motion capture, le premier du genre en France. Et encore plus lorsque l’histoire se déroule durant la préhistoire : ces dernières années, seuls Les Croods sont parvenus à nous faire mourir de rire dans ce contexte, et encore, il s’agissait d’hommes, pas des singes !

S’il y a une chose que l’on peut regretter dans Pourquoi j’ai pas mangé mon père, c’est l’écriture. En voulant aborder de trop nombreuses thématiques (en vrac : l’abandon, l’exclusion, la famille, l’amour, le courage, la tradition contre la modernité, etc..) Jamel Debbouze se perd, transformant son film en une succession de sketches grossièrement scotchés les uns aux autres. Les personnages sont tous des caricatures qui évoluent par à-coups maladroits, tandis que les dialogues tombent la plupart du temps à plat, ce qui est un comble pour un roi de la tchatche comme Jamel. Maître du stand up, il ne parvient pourtant pas à insuffler d’énergie à ses scènes, se reposant trop sur une motion capture et une animation  qui, si elles sont plutôt réussies (les images, bien que répétitives, sont belles, et le travail sur la lumière de qualité), ne sont pas soutenues par un scénario solide. Claudiquant, l’édifice fait du rase-motte, à base d’humour pipi-caca, désuet (l’humour de Jamel n’a pas changé depuis 20 ans) et manquant d’imagination. La meilleure illustration ? L’incompréhensible plagiat de Louis de Funès, déjà rarement bien imité, mais qui passé au moulinet de la 3D devient l’une des pires choses vues cette année. Plutôt que de s’approprier le personnage et de nous le restituer à sa sauce, Jamel se contente d’un copié-collé de ses mimiques les plus célèbres. Outre le fait que cela sente à plein nez le (mauvais) coup marketing, ça n’a surtout rien à faire dans cette histoire. Grosse deception donc que cette première oeuvre. Pas tant pour une histoire mal ficelée et des mécanismes humoristiques anachroniques, mais bien parce que l’on est persuadé que Jamel Debbouze a des choses passionnantes à raconter ! Moins de budget, moins d’envie de trop en dire (lacune classique des premiers films) et un peu plus de réalisme sur les choses qui font rire le public d’aujourd’hui semblent être une bonne voie à suivre pour le prochain film du réalisateur. Qui ne pourra, du coup, n’être qu’une bonne surprise.