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Focus sur: MICHAEL MANN (Dossier)

FOCUS SUR michael mann

Michael Mann est sans doute l’un des réalisateurs les plus respectés d’Hollywood, sa carrière au cinéma ayant débuté il y a plus de 30 ans déjà, en 1981 avec Le solitaire (Thief pour le titre original), dans lequel James Caan tenait le rôle principal. Un polar déjà, pour celui qui produira la série culte des années 80 Miami Vice et qui s’illustrera principalement dans ce genre. En 2015 sort son onzième film au cinéma, Hacker. Le cinéaste doit sa renommée à plusieurs qualités indéniables mais aussi à son style sobre, épuré et souvent empreint d’une efficacité redoutable. La plupart des cinéphiles lui vouent un culte en raison de l’un de ses deux meilleurs films : Heat ou Le dernier des mohicans. Sa riche filmographie, parfois inégale en termes de qualité, contient néanmoins beaucoup de points communs, qui caractérisent son style. On reconnaît un film de Michael Mann et c’est la marque des grands.

dernier mohicanLe metteur en scène de Heat possède un style narratif original, qui constitue souvent l’une des forces de ses plus grands films. Le principal trait caractéristique en est le réalisme, parfois poussé de certains aspects. Que ce soit dans Le solitaire ou dans Heat, la préparation des gangsters est toujours minutieuse, le côté technique est très présent pour renforcer cette sensation de vérité. On voit par exemple Val Kilmer (Heat) et James Caan (Le solitaire) manier le chalumeau pour préparer leur entreprise et ne rien laisser au hasard, quitte à prendre des risques supplémentaires. On se souviendra de cette scène mémorable dans Heat, au cours de laquelle Chris (Val Kilmer) est à l’ouvrage à l’intérieur d’un bâtiment surveillé par la police, tandis que Neil (De Niro) monte la garde à l’extérieur et met brusquement fin aux travaux lorsqu’il entend le bruit presque imperceptible du fusil d’un policier qui cogne dans son dos le métal de la paroi du camion de surveillance. Michael Mann n’hésite parfois pas à opter pour un style plus exagéré, en vue d’un rendu plus spectaculaire, comme dans le traitement de l’histoire de Miami Vice, où les personnages sont sans cesse sur le fil. Ce sera notamment le cas du personnage de Sonny Crockett, interprété par un Colin Farrell méconnaissable. Il en sera de même pour la scène mythique de la fusillade dans les rues de Los Angeles dans Heat. Ici, on oublie le réalisme pour basculer dans une guérilla urbaine…qui parvient à sonner juste grâce notamment au traitement du son des armes lourdes. Mann recycle parfois certaines idées, comme celle de revendre des biens volés à leur propriétaire, en utilisant le concept de l’assurance qui remboursera la partie lésée. C’est ce que fera le personnage joué par James Caan dans Le solitaire et c’est aussi la manœuvre à laquelle se risquera Neil McCauley (De Niro), sur les conseils de Nate (Jon Voight), dans Heat.

the insider
On note une rupture de style en 1999 avec Révélations, qui traite davantage de questions d’éthique et qui utilise le suspense comme moteur du film, pour un résultat à moitié efficace, la faute sans doute à un sujet moins porteur. La machine se grippe en 2001 avec Ali, sans doute l’un des moins bons films de Mann, qui se base sur un scénario mal écrit et qui survole trop de points importants, comme celui de la conversion à l’Islam notamment. Le résultat est sans doute meilleur quand Mann est directement à l’origine de l’histoire et seul à la barre du scénario. La patte Michael Mann se discerne aussi dans un traitement souvent poussé des personnages. Neil Mc Cauley (Heat) et Franck (Le solitaire) sont ainsi des personnages quelque peu similaires, notamment dans la gestion de leur vie privée et amoureuse. Ils sont ainsi affublés d’une capacité à tout quitter en un instant si la situation l’exige, caractéristique marquante du personnage joué par De Niro dans Heat. Dans une moindre mesure, Sonny Crockett agira en suivant le même concept dans le film Miami Vice. Dans Le dernier des mohicans, le héros sacrifiera tout par amour, en complète opposition avec les héros de Miami Vice, Heat ou du Solitaire. C’est l’une des innombrables originalités de ce long-métrage de 1992 par rapport au reste de la filmographie du réalisateur américain. Michael Mann semble mettre un point d’honneur à accorder une importance considérable au traitement des personnages de chaque camp. Heat en est le point culminant, avec un brouillage des lignes assez impressionnant, le spectateur se retrouvant à connaître aussi bien la vie de Neil (De Niro) ou de Chris (Val Kilmer) que celle de Vincent (Pacino). Les trois heures du long métrage aident sans doute aussi cette construction… Cette particularité se retrouve également pour le meilleur dans Le Sixième Sens où les personnages de Will Graham et de Lecter sont tous deux très développés. Michael Mann verse rarement dans le manichéisme, offrant une richesse à ses personnages principaux, quel que soit leur camp. Jamie Foxx incarnera ainsi dans Collateral l’un des side-kicks les plus intéressants du cinéma policier d’action, à l’instar de Samuel L. Jackson dans Die Hard 3 (Une journée en enfer).

PUBLIC ENEMIESMichael Mann parvient à tirer le meilleur de ses acteurs, à chacun de ses films. Même si la qualité du choix de son cast est sans doute la première chose à souligner (quelques uns des plus grands comédiens américains sont ainsi passés devant sa caméra), sa capacité à diriger ses acteurs force le respect. Mann aura réussi le coup de génie de réunir Al Pacino, Robert de Niro, Tom Sizemore, Val Kilmer, William Fichtner et Ashley Judd au sommet de leur carrière. Jamais plus aucun de ces acteurs ne parviendra à retrouver une justesse de jeu comparable par la suite. On pourrait aussi citer Tom Cruise, impeccable dans Collateral et la liste serait encore longue. Michael Mann possède un style visuel à la fois remarquable et caractéristique. Le pêché mignon du réalisateur semble être le décor urbain, tant sa propension à filmer les grandes villes de nuit est importante. Dans Collateral, la cité nocturne deviendra presque le troisième personnage du film. On retrouve souvent des plans aériens de la ville, des points de vue des toits, d’avion ou d’hélicoptère. Heat, Le solitaire et Miami Vice en sont les exemples les plus frappants. Michael Mann semble aussi avoir un faible pour les maisons aux baies vitrées donnant sur la mer, qu’on retrouve dans Le sixième sens, dans Heat ou encore dans Miami Vice. Mann travaille également énormément sur la photo de ses films et parvient souvent à faire ressortir les lumières de la ville la nuit de façon magistrale. Ce sera le cas dans Miami Vice, dans Heat et évidemment dans Collateral, dont la colorimétrie (sans doute due à l’utilisation du numérique) et la photo sont uniques.

HEAT BAIE VITREELe genre de prédilection de Mann est incontestablement le polar, auquel il revient sans cesse, malgré quelques incursions dans d’autres genres (biopic, thriller psychologique). C’est sans conteste avec Heat que le réalisateur aura atteint son point d’orgue et peut-être même celui du genre, puisque le film se révèle parfait de bout en bout, même après plus d’une dizaine de visionnages. Pour son originalité dans le traitement, Miami Vice tient également une place de choix dans les polars réalisés par Mann, aidé par une distribution impeccable et une technique parfaite. Au palmarès, Collateral ne sera qu’un bon polar, puisque le film, malgré ses qualités et le plaisir indéniable qu’il procure n’aura finalement rien d’exceptionnel, à côté des deux précédemment cités. Mann réalisera même un polar moyen en 2009, avec Public enemies. On assiste à une chasse à l’homme peut-être sensée recréer le jeu du chat et de la souris auquel se livrent Pacino et De Niro dans Heat, mais les acteurs n’ont pas la hargne suffisante, le scénario est trop basique et le film ne sera jamais assez enlevé, malgré quelques soubresauts. Est-ce la volonté de ne pas se répéter ? D’offrir un nouvel angle ? A l’arrivée, tous les polars de Mann seront comparés à Heat, sans qu’aucun ne parvienne à sa hauteur. Michael Mann sait mettre en scène l’action, d’une manière qui lui est particulière et qu’on ne retrouve pas ailleurs. Il montre souvent une violence sèche. Il met sans cesse l’accent sur l’efficacité, sur la force des impacts de balles et des détonations. Que ce soit dans Heat, dans Miami Vice, dans Collateral ou même déjà dans Le solitaire. Pourtant, Michael Mann peut livrer un film comportant de l’action, dans un contexte plus épique ou lyrique : Le dernier des mohicans en est l’exemple, sans doute son film le plus romantique et poétique. Au-delà de son style affirmé et de sa maîtrise technique incontestable, Michael Mann figure désormais parmi les plus grands réalisateurs américains en vie. Maître du polar, directeur d’acteurs incomparable, il excelle aussi dans l’art de mettre en scène une fusillade, de manier la tension ou le suspens. En résumé, il est capable de toucher la perfection dans plusieurs domaines, comme il l’avait fait avec Heat. Peut-on en dire autant de beaucoup d’autres réalisateurs? Rien n’est moins sûr.

FILMOGRAPHIE MICHAEL MANN

1981 / Le solitaire (Thief)

1983 / La forteresse noire (The Keep)

1986 / Le sixième sens (Manhunter)

1992 / Le dernier des Mohicans (The Last of the Mohicans)

1995 / Heat

1999 / Révélations (The Insider)

2001 / Ali

2004 / Collatéral

2006 / Miami Vice: Deux flics à Miami (Miami Vice)

2009 / Public Enemies

2015 / Hacker (Blackhat)

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