Critiques Cinéma

THE GREEN INFERNO (Critique)

3,5 STARS TRES BIEN

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SYNOPSIS: Un groupe d’activistes new-yorkais se rend en Amazonie et tombe entre les mains d’une tribu particulièrement hostile.

Il revient de loin. Voilà ce qu’on a en tête lorsqu’on pense à The Green Inferno, le film d’horreur cannibale d’Eli Roth. Présenté en séance de minuit au festival de Deauville 2015 (hasard du calendrier, son nouvel opus, Knock Knock, y est aussi dévoilé), The Green Inferno a été tourné au Chili et au Pérou il y a quelques temps déjà. 2012 pour être précis. Cet hommage – remake officieux – au cultissime Cannibal Holocaust de l’italien Ruggero Deodato était au départ prévu pour 2014, avant d’être perpétuellement repoussé. Après moult rebondissements, le film sort finalement au USA en septembre prochain et chez nous le mois suivant via la formule e-cinema. C’est Jason Blum, le pape de l’horreur low-cost (Insidious, Sinister, The Visit …) qui a décidé de reprendre le film en main cette année et de le distribuer au pays de l’Oncle Sam. Entre 2012 et aujourd’hui, notons tout de même un passage remarqué au festival de Toronto 2013, sélection « Midnight Madness ». C’est un Eli Roth déchaîné (et imbibé) qui est venu révéler son bébé en avant-première à Deauville. Banane sur le visage, présentation dans un franglais hilarant, aux côtés de sa jolie compagne Lorenza Izzo (héroïne du film) … le petit protégé de Tarantino manifestait une joie immense que The Green Inferno soit exposé sur grand écran, sans masquer une certaine colère face à la perspective d’une sortie VOD dans l’hexagone, rappelant haut et fort que « les salles obscures se doivent d’accueillir le gore ! ». Force est d’avouer en fin de projo à quel point on le comprend, tant c’est avec un plaisir non dissimulé qu’on est sorti de cette séance spéciale.

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Le pitch est simple : de jeunes américains arrogants et ingénus se rendent au Pérou pour arrêter une compagnie pétrolière sur le point d’exterminer une tribu ancestrale, en cherchant à obtenir les droits du terrain sur lequel elle vit, afin de le déboiser. En chemin, tout ne se passe pas exactement comme prévu et la troupe se trouve confrontée aux dangers de l’Amazonie, mais surtout aux autochtones qu’elle tentait de protéger. Soyons clairs : The Green Inferno ne réconciliera pas Roth avec ses détracteurs. Ne dérogeant pas à la règle de la « formule Eli Roth » (combinaison de scènes extrêmement gores et d’humour souvent potache) et bâti sur un modèle narratif similaire à celui de Cabin Fever et Hostel 1&2, incluant à peu près les mêmes qualités (film d’horreur sans concession avec du fond) et défauts (exposition beaucoup trop longue, acting digne des pires productions AB), The Green Inferno voit dans sa première partie des adolescents engager un comportement pour lequel ils sont ensuite punis lors d’un second acte, assez barbare. C’est par son propos que The Green Inferno se montre le plus intéressant, poursuivant et enrichissant les grands thèmes Rothiens. Avec ses ados-héros insupportables, tout le temps connectés (via les réseaux sociaux), qui se la jouent apprentis membres greenpeace, confrontés dans un second temps à la dangereuse réalité du terrain (cannibales, milice paramilitaire), Eli Roth espère ainsi, après avoir taclé le tourisme sexuel et le délire consumérisme sur un mode cauchemardesque dans les deux volets Hostel, faire la nique à l’activisme écolo du dimanche (et plus largement, à la suprématie du monde accidental), pratiqué dans l’unique but de satisfaire un égo qui n’a rien d’altruiste. L’héroïne, la belle Justine, en est l’incarnation même. Fille d’un riche exécutant des Nations Unies et locataire d’un appartement new-yorkais huppé, Justine aspire tellement à quitter sa zone de confort qu’elle en vient à s’engager un peu bêtement, attirée par le leader charismatique de la bande, dans une cause militante douteuse. À cet égard, The Green Inferno ne souffre d’ailleurs pas tellement de la comparaison avec Cannibal Holocaust, étalon doré du genre. Les temps ont changé, Eli Roth, moins putassier que ses prédécesseurs (ni viol, ni maltraitance animale ici), le sait, actualise son sujet en injectant un peu d’humour scato de séries Z (le mec qui se masturbe pour déstresser juste après une exécution atroce, la nana qui se vide littéralement dans un coin) et adresse davantage son discours à la génération Y, en vue de les alerter. Sa volonté de tourner en dérision la bonne conscience humanitaire et sa vision des défenseurs de la nature sont certes un peu taquines et grossières mais elles déclenchent irrémédiablement une réaction, prolongeant l’expérience filmique au-delà du simple matraquage gore.

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Le gore, parlons-en. Eli Roth joue à fond la carte de l’imaginaire collectif (« les indigènes d’Amazonie sont des barbares cannibales »), tire le meilleur de ses décors naturels, s’amuse comme un fou avec les figurants (peinturés tout le corps en un rouge vif) et enchaîne les scènes trash avec une redoutable efficacité. The Green Inferno est beaucoup plus dégoûtant et choquant que la plupart des productions actuelles, ce qui offre un vent de liberté dans un genre souvent parasité par un désir de préserver l’audience. Énucléations, démembrages, ablation linguale, dépeçage, sévices génitaux, égorgements, piqûres de fourmis … la seconde partie de Green Inferno, jouissive à souhait, devra ravir les amateurs de sensations fortes. Parmi les gros ratés du spectacle, gageons tout de même le manque de teneur de certains effets spéciaux (l’accident d’avion, les fourmis numériques), ainsi que le jeu à la ramasse de la plupart des comédiens, y compris Lorenza Izzo, qui campent des personnages-achétypes mal écrits (le fumeur de weed, le meneur salopard, le gros débile, la relou…). On regrette également le manque d’audace dans la réalisation, qui fait même parfois un peu tâche au début (certains plans semblent sortir d’une télénovela chilienne). The Green Inferno marque le retour du mauvais garçon Eli Roth derrière la caméra après des années passées à jouer les producteurs (Aftershock, Le Dernier Exorcisme part I & II) et acteur (Inglourious Basterds, Clown) chez ses copains. Le plaisir de trouver ce type d’œuvre, sans concession à la fois dans son propos (critique de la jeunesse américaine individualiste qui pense changer le monde en quelques tweets) et son traitement (nombreuses effusions d’hémoglobine), dans un genre devenu formaté, est là, ce qui est en soi déjà pas si mal.

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Titre Original: THE GREEN INFERNO

Réalisé par: Eli Roth

Casting: Lorenza Izzo, Ariel Levy, Aaron Burns,

Kirby Bliss Blanton, Magda Apanowicz, Daryl Sabara  …

Genre: Epouvante-Horreur, Thriller

Sortie le: 16 octobre 2015 en e-cinema

Distribué par: Wild Side

3,5 STARS TRES BIENTRÈS BIEN

 

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