SYNOPSIS: L’incroyable histoire vraie de l’homme qui a infiltré le Black Panther Party. À la fin des années 1960 William O’Neal (LaKeith Stanfield), petit malfrat, accepte de collaborer avec le FBI comme informateur. Au péril de sa vie, il doit infiltrer le Black Panther Party et se rapprocher de son leader charismatique Fred Hampton (Daniel Kaluuya), ciblé par les autorités.
Attendu avec un grande impatience par l’auteur de ces lignes au regard du sujet et du casting, Judas and the Black messiah sort directement sur Canal+ sans être passé par la case cinéma et semble bien parti dans la course aux Oscars. On se méfie toujours de ce label « films à oscars » qui allie souvent deux éléments : un sujet fort accouplé à un académisme ronronnant. Très rapidement, le film de Shaka King (dont c’est le deuxième long-métrage) rentre inévitablement dans cette malheureuse catégorie. Le générique d’introduction en est ainsi un bon exemple : on a l’impression d’avoir vu 150 fois ce générique qui reprend des images d’actualités de l’époque, le tout sur-découpé avec le nom du casting en toile de fond. Et pourtant, il y avait matière à faire un film dérangeant et audacieux. En racontant l’histoire de William O’Neal, petit escroc devenu le principal indic du FBI au temps des Blacks Panthers à la fin des années 60, King aborde son sujet de manière trop superficielle.
Deux sujets sont ainsi survolés alors qu’il aurait dû, selon nous, constituer le cœur de cette tragédie. Tout d’abord, le spectateur n’arrive jamais à percevoir la motivation de certains personnages clés de l’intrigue. Ainsi, on ne saisit pas pourquoi O’Neal décide de trahir sa communauté : est-ce l’argent comme le montre la première scène du film ? Est-ce la peur de la prison comme on peut se douter lors de son interrogatoire ? Est-ce l’absence de scrupules ? Est-ce le nihilisme qui l’habite ? On ne perçoit jamais une quelconque motivation chez ce personnage ce qui nous en éloigne au fur et à mesure. De même pour l’inspecteur du FBI interprété par Jesse Plemons dont le personnage est totalement effleuré et on ne saurait comprendre ses agissements (respect de sa hiérarchie ? raciste patenté ? exerce son travail comme n’importe quel travail ?)
Mais là où le bât blesse vraiment, c’est dans la mise en scène de la relation entre O’Neal et le Black Messiah : Fred Hampton. Ce dernier est un personnage viscéral, qui harangue les foules, qui veut mener la révolution contre cet état capitaliste qui opprime les noirs et les pauvres. Alors qu’on s’attendait à une opposition fraternelle entre ces deux figures (l’opportuniste vs l’idéologue), le réalisateur ne les place jamais au centre de l’intrigue en même temps. Aucune salve entre les deux hommes ne viendra perturber ce film sous forme de fiche wikipedia, très propre dans sa facture. Il aurait fallu insuffler un tant soit peu de menaces, de tension entre ses deux personnages qui sont à l’aube d’un mouvement qui aura marqué son époque. Le casting est pourtant remarquable à l’image de Daniel Kaluuya qui impose son charisme lors de longs monologues électrisants.
On ne peut que vous recommander le livre de Michael Mention Power qui retrace cet épisode absolument scandaleux de l’histoire américaine. En décrivant l’apparition du Black Panther Party à travers quatre personnages, le romancier analysait parfaitement les motivations de chacun et ce qui a mené à l’assassinat de Fred Hampton par le FBI. Ce que ne réussit pas à faire le film malgré ses deux heures que l’on sent bien passer étant donné que King étire ses scènes parfois de manière malencontreuse. Une grosse déception.
Titre Original: JUDAS AND THE BLACK MESSIAH
Réalisé par: Shaka King
Casting : Daniel Kaluuya, Lakeith Stanfield, Jesse Plemons…
Genre: Biopic, Drame
Sortie le : 24 avril 2021 sur myCanal et le 28 avril en achat digital
Distribué par: –
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Catégories :Critiques Cinéma