SYNOPSIS: Suite à des problèmes de santé, Victoire Delorme, institutrice, vient s’installer avec son mari Samuel et leurs deux enfants dans un petit village du sud de la France. À la sortie du premier jour d’école, un séduisant quarantenaire interpelle Victoire. L’homme n’est autre que Florent Maléval, le premier amour de Victoire. Ils sont tous les deux mariés, mais la flamme qu’ils croyaient tous deux éteinte se rallume avec une force qui les dépasse. Alors qu’ils prennent la décision de se séparer de leurs conjoints pour vivre ensemble, Marion, la femme de Florent, disparaît subitement…Devant cette situation, Victoire et Florent souhaitent garder leur relation secrète. Où est Marion ? L’a-t-on assassinée ? Et jusqu’où Victoire serait-elle prête à aller par amour ?
En 2016 le réalisateur Lionel Bailliu et le scénariste Yann Le Gal (avec aussi Isabel Sebastian) avaient donné avec Innocente une leçon de classicisme en revisitant efficacement les figures imposées de la saga familiale matinée de thriller. Presque trois ans plus tard le tandem est de retour pour France 3 avec une nouvelle mini-série qui semble épouser le même type de trajectoire. Seulement, là où on aurait pu craindre de voir poindre les prémisses d’une recette, ils nous prennent à contrepied avec deux premiers épisodes qu’il faut laisser infuser pour voir peu à peu se dévoiler le camaïeu de l’intrigue. Là où Innocente entrait assez vite dans le vif du sujet, Soupçons prend le parti de prendre son temps, faisant du même coup se poser la question de la direction choisie. Non pas que l’on s’ennuie même si l’essentiel du premier épisode consiste à poser les enjeux dramatiques en s’attachant à des détails du quotidien qui pourraient à force sembler sur-explicatifs. Si la mise en place peut sembler un peu longue si on ne se laisse pas prendre dans les filets de cet adultère qui va être le point de bascule du récit, le procédé résulte pourtant semble t-il d’un véritable choix d’auteurs maitrisé et permettant de soigner la caractérisation des personnages et d’éviter d’en faire de simples esquisses. Qui plus est, l’issue du premier épisode nous réserve un retournement de situation extrêmement bien amené et totalement inattendu qui dès lors, place Soupçons sous les meilleures auspices, redistribuant les cartes de l’intrigue sentimentale classique qui semblait se déployer pour muter vers le thriller intriguant.
Bien menée, savamment écrite grâce à un vrai sens du rebondissement, la série sait se montrer subtile dans l’avancée de ses pions et évite avec maestria les gros sabots que l’on pressentait à tort à ses débuts. La réalisation de Lionel Bailliu à la fois élégante et discrète accompagne les protagonistes sans le renfort de mouvements opératiques superflus. La maîtrise narrative est non seulement le socle de base de Soupçons, mais la série ne cherche pas à être ce qu’elle n’est pas. Prendre son temps à l’ère de la télévision d’aujourd’hui est un vrai luxe et si il faut happer le téléspectateur pour ne plus le lâcher, Soupçons y parvient aussi grâce à son éclatant casting qui permet de ne pas trop s’impatienter lorsque les indices disséminés çà et là s’avèrent surtout être des fausses pistes destinées à nous embrouiller un peu plus. Julie Gayet et Bruno Debrandt tout d’abord c’est LA très bonne idée de Soupçons. Si on sent qu’ils s’apprivoisent à la manière de leurs personnages, leur pas-de-deux est immédiatement crédible, Julie Gayet gracile et déstabilisée par le retour de cet homme dans sa vie et Bruno Debrandt, qui explore des tonalités encore différentes de ce que l’on connait de lui, amoureux fou et d’une délicatesse renversante. On croit à ce couple séparé par les aléas de la vie que le hasard remet en présence, le jeu des deux comédiens se répondant à merveille et le romantisme échevelé qui les lie faisant craquer nos âmes de midinettes. Puis quand les doutes s’épaississent, quand les soupçons se font jour, on croit tout autant à la tension qui succède. Autour de ce duo, le toujours impeccable Thomas Jouannet (déjà dans Innocente), les excellentes Marie Dompnier (Les Témoins, La dernière vague) et Joyce Bibring (Chefs, Noces Rouges…) ou le vétéran Alain Doutey (Les Yeux d’Hélène). La formidable distribution est, comme c’était le cas pour Innocente, au diapason d’un récit qui ménage ses effets, tant et si bien que l’on serait bien en peine à ce stade de deviner quelle en sera l’issue. On attend avec impatience les quatre épisodes suivants pour estampiller définitivement Soupçons comme une très bonne série, classique peut -être mais qui s’avère au final diablement addictive.
Crédits: France 3 / Elephant Story, AT-Production
avec la participation de France Télévisions