Critiques Cinéma

EYE IN THE SKY (Critique)

2,5 STARS MOYEN

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SYNOPSIS: Le colonel Katherine Powell (Helen Mirren), officier du service d’espionnage, est placé aux commandes d’une opération top-secrète impliquant plusieurs nations. Un groupe de terroristes réfugié à Nairobi doit être capturé ; les services secrets découvrent que le groupe prépare une attaque suicide. Le risque est imminent, il faut agir très vite pour stopper les terroristes coûte que coûte. Dans une base du Nevada, Steve Watts (Aaron Paul), pilote de drones, est prêt à intervenir pour éliminer la menace. Une petite fille entre dans la zone de tir… Entre dommages collatéraux et pressions politiques, sauront-ils prendre la bonne décision ? 

Gavin Hood fait partie de ces réalisateurs au sujet duquel il est difficile d’avoir un avis bien arrêté, tant ses films sont d’une qualité inégale. Après 2 premiers films anonymes, Mon nom est Tsotsi qui reçu d’excellentes critiques et gagna de nombreux prix, lui permis de réaliser le solide Rendition avec un casting 4 etoiles (Meryl Streep, Jack Gyllenhaal, Reese Witherspoon, Alan Arkin) puis d’être choisi pour réaliser Wolverine. Après avoir atteint ce qui semblait constituer le sommet de sa carrière, les critiques négatives et un succès mitigé au box office, le firent retomber dans un relatif anonymat dont il sorti une première fois en 2013, pour La stratégie Ender incursion très oubliable dans la science fiction. Avec Eye in the sky, Gavin Hood revient avec un casting prometteur (Helen Mirren, Alan Rickman dont c’est le dernier rôle et Aaron Paul) et un sujet encore peu traité au cinéma, à l’exception récente de Good Kill d’Andrew Niccol. Si ce dernier s’intéressait au dernier maillon de la chaîne, au pilote du drone tenu d’exécuter un ordre dont la conséquence immédiate peut lui être insupportable, Gavin Hood s’attache plus précisément au processus de décision et à tous ses acteurs, état major militaire, secrétaire d’état, soldats sur le terrain.

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Le récit d’Eye in the sky se concentre sur une mission et le dilemme autant militaire et moral qu’il posera à ses protagonistes. La vie d’un innocent peut elle être sacrifiée pour les besoins d’une opération militaire visant à éliminer des ennemis qui pourraient faire des centaines de victimes? De ce dilemme pourrait accoucher un débat manichéen entre le camp du bien qui refuserait par principe ce type d’opération et le camp des cyniques, le doigt sur le bouton du lancement de missile. Heureusement, Eye in the sky nous emmène dans une zone grise, où il est avant tout question de stratégie, où le point de vue diffère selon que l’on est un militaire ou un politicien conscient des possibles répercussions de cette décision sur l’autre champ de bataille de cette guerre, celui de la communication. Faire une victime collatérale, ce n’est pas seulement tuer un innocent c’est courir le risque que ces images, largement diffusées et utilisées par ses ennemis, ne servent à discréditer son action. Le champ de ces guerres lointaines contre des ennemis cachés au milieu de la population, se porte en effet aussi sur le terrain des images.

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La bonne idée du film est de se concentrer sur un cas bien particulier qu’il donne l’impression de traiter en « temps réel », ajoutant ainsi la dimension d’urgence inhérente à ces décisions. S’il pêche c’est sur l’exécution plus que sur le fond. La mise en place des pions de cet échiquier est en effet plutôt laborieuse et trop longue. Dans un film mettant en jeu autant de personnages, lesquels une fois en place, seront statiques, limités par leur fonction et dont les interactions se font par téléphone ou visioconférence, il s’agit pour chacun d’entre eux de leur donner une exposition suffisante pour qu’une fois la  » partie » commencée, le spectateur ne soit pas perdu ou extérieur aux enjeux. Il s’agit surtout de trouver le ton juste pour que la tension monte crescendo et d’avoir la main légère pour ne pas sur-dramatiser les conséquences de l’issue de cette partie. Gavin Hood a malheureusement la main un peu lourde, notamment lorsqu’il s’agit de montrer cette petite fille dont le sort sera au centre des débats entre le lieutenant général Benson (Alan Rickman) le colonel Katherine Powell (Helen Mirren) et James Willen, le secrétaire d’Etat aux affaire étrangères (Iain Glen aka Jorah Mormont pour les fidèles de Game of Thrones). Ce dernier est d’ailleurs victime d’un scénario qui a pensé avoir la bonne idée de l’utiliser pour, sans aucune finesse, introduire de la « farce »au milieu de cette pièce dramatique. Ses problèmes gastriques causés par une intoxication alimentaire devenant un running gag très embarrassant. Lorsque tous les pions sont enfin en place et que la partie commence, on sort un peu de sa torpeur mais tout cela a du mal à prendre , la faute à une réalisation peu inspirée, peinant à donner du rythme aux échanges et à faire monter la tension, même si le scénario se charge d’injecter régulièrement de nouveaux rebondissements. La direction d’acteurs pose elle aussi problème. Aaron Paul en fait trop dans le rôle de ce pilote de drone auquel le mauvais rôle de bourreau est dévolu. Helen Mirren quant à elle, paraît jouer seule face à un écran vert, sur un tempo différent, notamment dans ses échanges avec Alan Rickman qui lui est, heureusement, parfait.

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Le fond reste intéressant ce qui permet de passer outre les problèmes cités sans que cela ne soit déplaisant mais on est plus en train de voir un potentiel inexploité, qu’un film accompli. Il y avait là une très belle matière, une idée de départ intéressante et la frustration que l’on ressent devant ce résultat aura au moins le mérite de nous rappeler à quel point Fail Safe de Sidney Lumet, sur une construction similaire, était un triomphe. A la différence de Eye in the sky, Fail safe parvenait à maintenir une tension constante, à être concis en s’attachant avant tout à transmettre l’énergie de ses formidables acteurs pour immerger le spectateur au cœur d’un récit au suspense irrespirable. Eye in the Sky manque singulièrement de rythme, gère très mal les échanges entre ses personnages et repose sur trop d’artifices pour être convaincant. Quant à la fin pour le moins téléphonée mais qu’on ne vous spoilera évidemment pas, on a envie de se lever pour s’adresser à Gavin Hood en reprenant les paroles de la chanson homonyme d’Alan Parsons Project « I am the eye in the sky/ Looking at you/ I can read your mind ». Désolant mais surtout vraiment frustrant.

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Titre Original: EYE IN THE SKY

Réalisé par: Gavin Hood

Casting :  Helen Mirren, Aaron Paul, Alan Rickman…

Genre: Thriller, Guerre, Drame

Sortie en e-cinema le: 09 septembre 2016

Distribué par: UGC Distribution

2,5 STARS MOYENMOYEN

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