Critiques Cinéma

MON ROI (Critique)

3 STARS BIEN

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SYNOPSIS: Tony est admise dans un centre de rééducation après une grave chute de ski. Dépendante du personnel médical et des antidouleurs, elle prend le temps de se remémorer l’histoire tumultueuse qu’elle a vécue avec Georgio. Pourquoi se sont-ils aimés ? Qui est réellement l’homme qu’elle a adoré? Comment  a-t-elle pu se soumettre à cette passion étouffante et destructrice ? Pour Tony c’est une difficile reconstruction qui commence désormais, un travail corporel qui lui permettra peut-être de définitivement se libérer …

A J+5 du Festival de Cannes, il y avait Mon Roi, le nouveau long-métrage de Maïwenn. Un projet attendu pour plusieurs raisons : primo, la cinéaste française est de retour sur la croisette après le succès de Polisse, son dernier film en date, acclamé par la grande majorité de la critique lors de son passage en compétition en 2011 (avec en bonus une récompense au palmarès : Prix du Jury) et auréolé d’un joli triomphe en salles lors de sa sortie, avec 2,4 millions d’entrées dans l’hexagone. Secundo, Mon Roi est rempli de mystères. Une seule image a filtré sur la toile, tout juste connaît-on son pitch – les remémorations d’une vie de couple par une jeune femme admise dans un centre de rééducation après une grave chute de ski – et son casting (la paire Emmanuelle Bercot/Vincent Cassel, accompagnée par quelques noms improbables de la jeune garde du cinéma français : Louis Garrel et Laetitia Dosch, mais aussi le winner du web Norman Thavaud). Emmanuelle Bercot, connue pour avoir largement contribué au scénario de Polisse, est repartie du festival avec le prix d’interprétation féminine en poche (co-gagné avec Rooney Mara, pour sa prestation dans Carol), tandis que Vincent Cassel a également été honoré par la critique pour sa performance. Le film a en revanche reçu un accueil mitigé, avec des avis plutôt favorables en France alors que nos voisins d’outre-Atlantique n’ont pas hésité à le brûler sur le bûcher. Verdict ?

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Balayons tout de suite les craintes : Mon Roi n’est ni Pardonnez-moi, ni Le Bal des Actrices, ni Polisse, et c’est tant mieux. Si le film porte indéniablement le sceau « Maïwenn » (dialogues criants de vérités, histoire de couple de la vie de tous les jours, comédiens qui se livrent entièrement, quitte à tutoyer régulièrement l’hystérie, pathos à gogo…), on est tout de même soulagé par la forme empruntée (pas de récit choral cette fois, ni d’aspect pseudo-documentaire à impact), l’absence face caméra de l’insupportable JoeyStarr et de la cinéaste-actrice, et le gage d’une trame prenante. Mon Roi raconte en effet sous forme de flash-backs la relation passionnante et dévorante qui unit Tony, une avocate affirmée, et Giorgio, un restaurateur dragueur et provocateur. Au présent, Tony, désormais célibataire, est victime d’un malheureux accident de ski et tente de se reconstruire progressivement dans un centre de rééducation en bord de mer, trouvant son salut auprès de jeunes pensionnaires de l’institut, de classe sociale différente de la sienne. A l’instar de Polisse, Mon Roi alterne des moments très durs et des scènes de franche rigolade. Le film est néanmoins beaucoup plus intimiste, à la fois drôle et triste, parcouru d’indénombrables fulgurances et d’instants précieux, à commencer par cette rencontre hilarante en boîte de nuit entre Giorgio et Tony. Une ouverture qui pose d’emblée le ton et les enjeux avec efficacité, suivie essentiellement de tranches de vie instantanées et pourtant si durables dans les esprits (exaltation des émotions, premiers rapports, mariage, fêtes, disputes, désir de grossesse, fonte des sentiments, séances chez le psy, séparation, garde du petit…). L’incursion dans cette relation chaotique est bluffante d’authenticité ; l’écriture, pleine de rage et d’amour, est saisissante. On partage les douleurs et les doutes de Tony, aussi bien que ses joies et sa colère.

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Mon Roi doit énormément aux principaux comédiens, un tandem époustouflant du début à la fin. Emmanuelle Bercot, d’un côté, filmée avec une empathie bouleversante – on vit donc constamment à ses côtés, sous l’emprise de son roi – Vincent Cassel de l’autre, le monstre cruel découvert sous tous les angles. Le duo devrait très probablement se retrouver au théâtre du Châtelet en février 2016, du moins on l’espère. Mention également à Louis Garrel, improbable acolyte amusant de Bercot, et à Laetitia Dosch, même si on peut regretter son faible temps de présence à l’écran. La mise en scène de Maïwenn, une nouvelle fois énergique sans toutefois baigner dans l’excès d’effets, fonctionne quant à elle plutôt bien (les ellipses temporelles astucieuses dans le passé pour mieux retranscrire l’électricité et la toxicité qui anime ces deux êtres). Hélas, toutes ces valeurs ne transforment pas Mon Roi en chef- d’œuvre pour autant. On est souvent agacé de l’hystérie ambiante, vraiment too much, notamment lorsque Maïwenn s’oblige à filmer jusqu’à la déraison une scène de pétage de plombs de Tony lors d’un repas familial. La séquence, censée être dramatique, vire au ridicule et au racolage passé quelques minutes d’ hurlements et de gestes exagérés ce qui est bien dommage. De même, les vieux démons de Maïwenn semblent reprendre le dessus lors des séquences dans le centre spécialisé : biberonnée au langage des djeun’s (ce n’est pas un hasard si Norman figure au générique), la réalisatrice verse dans une caricature sociale nauséabonde, qui n’a pas vraiment lieu d’être dans ce film. Sans compter que son montage donne naturellement raison au couple, avec une balance de temps alloué totalement en défaveur de toutes ces scènes, ce qui laisse un arrière-goût d’inachevé à cette sous-intrigue, qui plus est bourrée de maladresses (sur-symbolisme flagrant, cool attitude superficielle, répliques ingrates ou ringardes, discours malavisé sur la banlieue). Mon Roi n’est pas encore le film de la consécration pour Maïwenn. Il faut toutefois lui reconnaître d’indéniables qualités, qui devraient convaincre le public. Prix amplement méritée pour Emmanuelle Bercot.

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Titre Original: MON ROI

Réalisé par: Maïwenn

Casting: Emmanuelle Bercot, Vincent Cassel, Louis Garrel,

Laetitia Dosch, Norman Thavaud, Isild Le Besco

Genre: Drame

Sortie le: 21 Octobre 2015

Distribué par: StudioCanal

3 STARS BIENBIEN

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