PAPA WAS NOT A ROLLING STONE (Critique)

Par Fred Teper le octobre 6, 2014 • ( 1 commentaire )

SYNOPSIS: Dans les années 80, Stéphanie grandit à La Courneuve auprès d’une mère absente et d’un beau-père brutal. Très vite, elle décide de se sortir de son quotidien morose. Grâce à l’amour de sa grand-mère, à ses lectures, sa passion pour la danse et pour Jean-Jacques Goldman, elle se débat dans cette cité colorée où l’amitié est primordiale. Un jour, elle le sait, Stéphanie quittera la cité pour mener la vie dont elle a toujours rêvé. Le film raconte l’histoire de cet envol.
Un film inspiré du livre autobiographique de la réalisatrice

En adaptant son propre livre, Sylvie Ohayon fait une entrée dans le monde du cinéma avec un joli film, un brin naïf par moments mais d’une sincérité à tout crin qui en fait toute la valeur et le rend si sympathique. Énergique et vivant et ancré dans les années 80, Papa Was Not A Rolling Stone est une chronique sur les premières fois mais surtout sur l’envie chevillé au corps de s’affranchir d’un destin dont tout l’entourage de l’héroïne cherche consciemment ou non, à la convaincre qu’elle n’aura pas droit à mieux. Comment, lorsque l’on est issue d’une banlieue métissée où tout le monde se connait et se tolère, mais où l’on n’a pas envie de végéter, parvenir à dépasser la hauteur des tours qui semblent boucher l’horizon? A force de travail et de croyance en des espoirs qu’elle se construit seule, Stéphanie va parvenir à se dépasser malgré les obstacles qui vont se dresser devant elle. Le propos n’est jamais mièvre ou faux et décrit avec justesse une jeunesse qui refuse « la peur, la soumission ou l’abandon » comme le chante Jean-Jaques Goldman dans Envole moi, hymne de la jeune fille (et de la cinéaste).

Papa Was Not A Rolling Stone est un film vif et plein d’humour, dopé par des dialogues extrêmement efficaces. Le ping-pong verbal auquel se livre les jeunes interprètes est l’une des réussites majeures de l’ensemble et la complicité flagrante entre Doria Achour et Soumaye Bocoum est particulièrement savoureux. Les deux jeunes actrices sont confondantes de naturel et leur alchimie tantôt touchante tantôt amusante permet certaines scènes très réussies. C’est leur relation et leur interaction qui fait avancer le film. Le versant plus dramatique du film fonctionne un peu moins bien et est en tout cas moins convaincant, même si Marc Lavoine est très bien dans le rôle du beau-père violent et que Aure Atika ne démérite pas non plus en mère permissive et égoïste. La relation entre la mère et la fille d’ailleurs faite de reproches réciproques est malgré tout plein d’un amour qui passe en filigrane de séquences émouvantes. L’émotion justement, Papa Was Not A Rolling Stone en est parfois un peu dépourvu, au profit d’un humour désenchanté et les autres seconds rôles sont un peu moins bien caractérisés et passent plus comme des silhouettes que comme de véritables personnages, manquant quelque peu de chair. Mais, débarrassé de ces légers scories, le film, traversé par la musique de Goldman, reste un début assez réussi et a l’immense mérite d’être un bel écrin pour les révélations des tempéraments formidables de Doria Achour et Soumaye Bocoum. On attend le prochain film de Sylvie Ohayon de pied ferme car avec son punch et sa gouaille, elle a surement d’autres histoires en réserve.