MISSION : IMPOSSIBLE 3 (Critique)

Par Quentin Delahaye le août 11, 2015 • ( 1 commentaire )

SYNOPSIS: Ethan espérait avoir tourné une page en quittant le service actif de la Force Mission Impossible pour un poste de formateur ; pouvoir enfin mener une vie « normale », se consacrer tout entier à sa ravissante épouse, Julia…
Mais lorsque Lindsey, la plus brillante recrue de l’IMF « tombe » à Berlin, Ethan se sent moralement obligé de lui porter secours. Assisté de ses fidèles coéquipiers Luther, Zhen et Declan, il infiltre le repaire du trafiquant Owen Davian et arrache la jeune femme des mains d’une quinzaine de ses sbires. Trop tard : quelques instants plus tard, une mini-capsule de magnésium explose dans la tête de Lindsey, la tuant sur le coup. Davian avait tout prévu…
Pour Ethan, c’est bien plus qu’un ratage – c’est une faillite personnelle dont il lui faut au plus vite se racheter…

Après le grand succès de Mission : Impossible 2, pas handicapé par des critiques moins élogieuses que pour l’original de De Palma, il était logique que Tom Cruise reparte pour un troisième tour des aventures d’Ethan Hunt. Il se passe pourtant six ans entre le film de John Woo et la sortie de M:I III, la faute à des désaccords sur le scénario et une valse de réalisateurs et d’ acteurs attachés au projet. David Fincher et Joe Carnahan, pour la réalisation, Kenneth Branagh, Scarlett Johansson, Carrie Ann-Moss et Thandie Newton (invitée à reprendre son rôle de l’épisode précédent) passent chacun leur tour. Tom Cruise, qui a souvent le nez creux, a alors la bonne idée de proposer la mise en scène à un producteur et scénariste de série (entre autres talent, il est également compositeur), qui n’a jamais pris la caméra pour le grand écran, un certain J.J Abrams. Créateur des séries Félicity, Alias et Lost, alors en plein boom, le futur réalisateur de Star Trek et Star Wars accepte immédiatement cette mission. Depuis les deux premiers Mission : Impossible, le monde du film d’action/espionnage/thriller a bien changé : les Jason Bourne sont passé par là, et même James Bond connaitra cette même année un lifting musclé grâce au Casino Royale de Martin Campbell. Mais Cruise est loin d’être un imbécile, et a parfaitement compris à la fois les attentes des spectateurs de la 2e moitié des années 2000, et les reproches qui avaient été fait au film de John Woo (en résumé, des personnages et un scénario trop creux). Le contre-pied sera le maitre-mot du film, et J.J. Abrams s’avère être l’homme de la situation.

Mission Impossible 3 est le meilleur film de la franchise, alors que, paradoxalement, il est celui qui a le moins rapporté au box office mondial (un tout petit 400 millions de dollars, presque une contre performance). Première prouesse du réalisateur : reprendre l’ensemble des éléments de la saga (les masques, les missions minutées, l’association entre des agents de terrain, un logisticien et un informaticien, les chausse-trappes, les trahisons internes, les scènes d’action impressionnantes, Tom Cruise) et les porter au plus haut. Mission accomplie, avec des séquences au Vatican, en Russie, en Chine et dans les Keys Island particulièrement réussies. L’implication sans limites (il réalise encore la plupart de ses nombreuses cascades) et le talent de Tom Cruise font beaucoup, mais le réalisateur a également un sens du rythme et des idées particulièrement brillantes. Deuxième prouesse : rajouter quelques éléments complémentaire à ce cocktail original pour alléger une franchise qui était tombée à la limite de la lourdeur avec un John Woo plombant chaque scène d’une symbolique oppressante et d’une mise en scène certes virtuose, mais à la longue épuisante. Dans Mission : Impossible 3, on découvre un Ethan Hunt en amoureux crédible (pas de coup de foudre alambiqué comme dans l’opus précédent) dans une scène d’ouverture tout à fait réussie. Le héros dévoile aussi un aspect plus humain, par les liens qu’il a noué avec l’une de ses élèves. L’humour fait également son entrée, avec un Simon Pegg pas encore suffisamment mis en avant, mais assez présent et talentueux pour détendre l’atmosphère quand il le faut.

Troisième et plus remarquable prouesse : le casting. Exit les seconds couteaux vite oubliés, place à Keri Russel en élève préférée d’Ethan Hunt, Jonathan Rhys-Meyers et Maggie Q en coéquipiers de choc, l’indéboulonnable Ving Rhames en Luther toujours aussi attachant, et Michelle Monaghan en épouse toute mignonnette. Billy Crudup et Laurence Fishburne complètent l’équipe du MIF avec talent et sérieux. Mais surtout, le tour de force d’Abrams, c’est d’avoir choisi l’incroyable Philip Seymour Hoffman pour jouer le bad guy du film. Rarement un méchant aura été aussi glaçant dans une saga aussi grand public. Tout simplement exceptionnel, l’acteur pose la barre très très haut. Ce qui ne pose pas de problèmes à un Tom Cruise qui est, somme toute, à la maison, et qui maitrise son rôle à la perfection. Nous gratifiant encore de scènes particulièrement impressionnantes, il incarne un Ethan Hunt qui pour la première fois semble mis au pied du mur, et qui n’a plus un tour d’avance sur tout le monde. L’alchimie entre tous les acteurs fonctionne à plein tubes, et Abrams a su le capter. Sous tension constante, nous offrant des scènes d’action particulièrement soignées et des idées de mise en scène maligne (l’ellipse dans l’immeuble de Shangaï pour récupérer la patte de lapin, géniale), ce Mission : Impossible 3 est une œuvre totalement maitrisée d’un bout à l’autre, le summum de la saga. Si vous ne deviez regarder qu’un film de la franchise, c’est celui-ci.