L’INTERMÉDIAIRE (RELAY) (Critique)

Par Fred Teper le novembre 26, 2025 • ( Poster un commentaire )

SYNOPSIS : Un » fixer » de renommée mondiale, spécialisé dans la négociation de paiements entre entreprises corrompues et ceux qui menacent de les faire tomber, est habitué à garder son identité secrète grâce à une organisation millimétrée et des règles strictes. Il voit son univers basculer lorsqu’une nouvelle cliente sollicite sa protection pour rester en vie.

On n’avait pas vu David Mackenzie derrière la caméra depuis Outlaw King en 2018. Le réalisateur britannique fait son retour au cinéma en raccrochant avec certains classiques de l’espionnage paranoïaque américain des années 70. L’Intermédiaire (Relay en version originale) raconte l’histoire de Sarah Grant, ancienne employée d’une grosse entreprise de biotechnologie, entrée en possession de documents hyper-sensibles capables de faire exploser un immense scandale. Acculée par des hommes de main qui cherchent à remettre la main sur ces documents compromettants, Sarah prend la décision de se taire et de les rendre à leurs propriétaires pour pouvoir retrouver sa vie. Elle est alors mise en contact avec un centre de relai, où sa protection et la négociation vont être prises en charge par notre protagoniste, un mystérieux fixeur taciturne et méticuleux.

On y retrouve au casting un impeccable duo de tête, les talentueux Riz Ahmed et Lily James de part et d’autre du combiné téléphonique, le premier dans la peau de ce fixeur mutique et mélomane et la seconde en lanceuse d’alerte paranoïaque. Dans un équilibre assez savoureux, le scénariste Justin Piasecki installe ses personnages dans un New York à la fois prison à ciel ouvert et rempli de possibilités de fuite. Notre personnage principal, naviguant entre les identités et les déguisements pour semer les hommes de main qui les traquent (menés par un antagoniste très efficace campé par Sam Worthington), se retrouve alors plongé dans un jeu du chat et de la souris pour garantir la sécurité de sa cliente.

Ce double jeu constant, raconté par un montage affuté et une bande-originale à la fois nerveuse et nébuleuse, balise alors l’énergie redoutable de L’Intermédiaire, héritier des thrillers d’espionnage des années 70/80 sans céder ni à l’emprunt paresseux ni à la sirène nostalgique prétentieuse. David Mackenzie construit un divertissement impeccable dans son genre, un concentré de suspense à l’ancienne, dépoussiérant le registre pour plaquer une relative modernité dans le rapport ultra-pernicieux entre l’homme et la technologie. Nous sommes à l’époque contemporaine, mais notre héros communique par machine à écrire pour passer entre les mailles du filet high-tech de ses opposants, prêts à percer n’importe quelle faille de sécurité pour mettre la main sur les documents sensibles tant convoités. Le scénario du film a alors tendance à céder à quelques facilités dans sa dernière partie, forçant la crédibilité de la relation créée entre les personnages de Riz Ahmed et Lily James et fermé par une ultime trouvaille narrative un brin artificielle, qui manque la perfection formelle en déviant légèrement de la réussite évidente de ses deux premiers tiers.

Malgré un finish un peu desservi par sa sous-écriture (même s’il reste suffisamment satisfaisant pour ne pas rebuter le spectateur sous un flot de nœuds peu crédibles), cet Intermédiaire assure un divertissement old school très réussi, une belle surprise dans un genre un brin poussiéreux qui se saisit de la tension et de la nervosité propres à son registre pour habiller une étonnante cavalcade nocturne et taciturne entre ses personnages et son intrigue paranoïaque. Riz Ahmed et Lily James offrent avec ce Relay une prestation incarnée dans un thriller cérébral sensiblement balisé, construisant une belle mise en lumière des laissés-pour-compte des différentes politiques new-yorkaises pour offrir une satisfaisante tension qui vient revitaliser avec talent le genre cadenassé de l’espionnage moderne.