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SYNOPSIS : Aventure à la fois complexe et mystérieuse sur plusieurs niveaux, « Watchmen – Les Gardiens » – se passe dans une Amérique alternative de 1985 où les super-héros font partie du quotidien et où l’Horloge de l’Apocalypse -symbole de la tension entre les Etats-Unis et l’Union Soviétique- indique en permanence minuit moins cinq. Lorsque l’un de ses anciens collègues est assassiné, Rorschach, un justicier masqué un peu à plat mais non moins déterminé, va découvrir un complot qui menace de tuer et de discréditer tous les super-héros du passé et du présent. Alors qu’il reprend contact avec son ancienne légion de justiciers -un groupe hétéroclite de super-héros retraités, seul l’un d’entre-eux possède de véritables pouvoirs- Rorschach entrevoit un complot inquiétant et de grande envergure lié à leur passé commun et qui aura des conséquences catastrophiques pour le futur. Leur mission est de protéger l’humanité… Mais qui veille sur ces gardiens ?
Zack Snyder s’empare de Watchmen avec une audace qui frôle l’insolence, et c’est précisément cette témérité qui donne au film sa puissance. Dès les premières minutes, le générique d’ouverture, porté par Bob Dylan, condense en quelques tableaux une uchronie saisissante, où l’Amérique réécrit son histoire sous l’œil des justiciers masqués. Ce montage virtuose, à la fois hommage au roman graphique et manifeste cinématographique, annonce la couleur : Snyder ne se contente pas d’adapter, il réinterprète. Les influences sont multiples — du film noir à la dystopie politique, en passant par le cinéma de guerre et le thriller paranoïaque — et s’entrelacent dans une mise en scène qui privilégie la stylisation à outrance, sans jamais sombrer dans le maniérisme gratuit. Le réalisateur impose une grammaire visuelle qui lui est propre, faite de ralentis hyperboliques, de contrastes chromatiques exacerbés et de compositions picturales qui transforment chaque plan en tableau.

Là où le film frappe fort, c’est dans sa capacité à préserver les thématiques fondamentales du comic-book tout en les adaptant à la temporalité du médium cinématographique. La déconstruction du mythe du super-héros, la critique du pouvoir, la paranoïa post-nixonienne et l’angoisse nucléaire trouvent une résonance troublante dans notre époque contemporaine, marquée par la défiance envers les élites, la surveillance généralisée et les fractures idéologiques. Snyder accentue la dimension tragique des personnages, en particulier Rorschach et le Dr Manhattan, figures d’un nihilisme radical et d’une transcendance désabusée. Le film ne cherche pas à rendre ses protagonistes aimables, mais à les exposer dans toute leur ambivalence morale. Cette approche, loin des canons hollywoodiens, confère à Watchmen une densité rare, qui exige du spectateur une attention soutenue et une lecture plurielle.

La fidélité au matériau d’origine est à la fois revendiquée et interrogée. Snyder reprend parfois les cases du roman graphique à l’identique, mais opère aussi des choix narratifs qui modifient la structure et le sens de l’œuvre. Le changement de la fin, notamment, substitue à l’attaque extraterrestre une manipulation technologique orchestrée par Manhattan, plus cohérente dans le cadre du film, mais moins subversive que le twist original. Ce glissement, tout en conservant la portée politique du récit, atténue sa dimension grotesque et métatextuelle. Pourtant, le film réussit à préserver l’essentiel : la mise en crise du récit héroïque, la fragmentation des points de vue, et la tension entre déterminisme et libre arbitre. Les dialogues, souvent repris mot pour mot, conservent leur force poétique et leur charge philosophique, tandis que la structure en flashbacks permet d’explorer la psyché des personnages avec une rigueur presque clinique.

Techniquement, Watchmen est une démonstration de maîtrise. La photographie, signée Larry Fong, joue sur les textures granuleuses et les éclairages contrastés pour évoquer une Amérique en décomposition. Les décors, minutieusement reconstitués, plongent le spectateur dans une esthétique rétro-futuriste où chaque détail participe à l’immersion. Les effets spéciaux, notamment pour le Dr Manhattan, atteignent une sophistication qui transcende le simple réalisme numérique pour devenir une véritable incarnation métaphysique. La bande-son, éclectique et savamment agencée, mêle classiques rock, compositions originales et silences éloquents, créant une atmosphère à la fois nostalgique et inquiétante. Le casting, enfin, est d’une justesse remarquable : Jackie Earle Haley incarne Rorschach avec une intensité fiévreuse, Patrick Wilson apporte une humanité fragile au Hibou, et Billy Crudup donne au Dr Manhattan une voix spectrale, détachée du monde. Chaque acteur semble habité par son rôle, et c’est cette incarnation qui donne au film sa chair, son souffle, sa gravité. Conclusion : Watchmen de Zack Snyder est une œuvre clivante, qui, en amalgamant la rigueur formelle du comic-book et l’exubérance de son esthétique propre, fait que Snyder livre un film qui interroge autant qu’il fascine. Peut-être ne fallait-il pas chercher à réconcilier les puristes d’Alan Moore et les amateurs de blockbusters, mais plutôt assumer cette tension comme le cœur même de l’objet cinématographique. Et à ce titre, Watchmen reste une proposition singulière, dérangeante et magnifiquement imparfaite.

Titre Original: WATCHMEN
Réalisé par: Zack Snyder
Casting: Jackie Earle Haley, Patrick Wilson, Malin Åkerman …
Genre: Action, Drame, Science fiction
Sortie le: 4 mars 2009
Distribué par: Paramount Pictures Franceeeeeee
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Catégories :Critiques Cinéma, Les années 2000








































































































































