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SYNOPSIS : Depuis sa plus tendre enfance, Henry Hill, né d’un père irlandais et d’une mère sicilienne, veut devenir gangster et appartenir à la Mafia. Adolescent dans les années cinquante, il commence par travailler pour le compte de Paul Cicero et voue une grande admiration pour Jimmy Conway, qui a fait du détournement de camions sa grande spécialité. Lucide et ambitieux, il contribue au casse des entrepôts de l’aéroport d’Idlewild et épouse Karen, une jeune Juive qu’il trompe régulièrement. Mais son implication dans le trafic de drogue le fera plonger…
Goodfellas n’est pas un simple film de gangsters. C’est une expérience sensorielle, une plongée vertigineuse dans les coulisses du crime organisé, orchestrée par un Martin Scorsese au sommet de son art. Dès les premières secondes, le spectateur est happé par une mise en scène nerveuse, une narration haletante et une bande-son qui pulse comme un cœur sous cocaïne. Ce film, est bien plus qu’un classique : c’est une œuvre fondatrice, un manifeste cinématographique qui a redéfini les codes du genre.

L’origine de Goodfellas remonte à la lecture par Scorsese du livre Wiseguy de Nicholas Pileggi, chronique journalistique de la vie de Henry Hill, un mafieux repenti. Le réalisateur, fasciné par la précision documentaire et le ton désinvolte du récit, contacte immédiatement Pileggi : « I’ve been waiting for this book all my life », lui dit-il. Leur collaboration est fusionnelle, et le scénario conserve cette authenticité brute, ce regard de l’intérieur sur le quotidien des gangsters, loin des mythes glorieux du Parrain. Scorsese, qui a grandi dans le quartier de Little Italy à New York, connaît intimement cet univers. Il ne cherche pas à le magnifier, mais à le montrer tel qu’il est : violent, absurde, parfois grotesque. Cette volonté de réalisme imprègne chaque plan, chaque dialogue, chaque silence. Scorsese ne cache pas ses influences. Il cite volontiers Jules et Jim de François Truffaut pour le rythme effréné de son montage et l’usage de la voix off. Le début de Goodfellas, avec ses coupes rapides, ses freeze frames et sa narration subjective, est un hommage direct à la Nouvelle Vague. Mais l’inspiration vient aussi du western : la scène où Henry Hill punit l’homme qui a agressé Karen est directement inspirée de Red River (La rivière rouge) de Howard Hawks. Le film est également traversé par l’héritage du cinéma américain classique : The Great Train Robbery, The Untouchables, Mean Streets… Scorsese les digère, les réinvente, les dynamite. Il ne cite pas, il transcende.

Rarement un casting aura été aussi juste, aussi incandescent. Ray Liotta, dans le rôle de Henry Hill, est le fil conducteur du récit. Son regard, à la fois naïf et cynique, nous guide dans cette descente aux enfers. Il incarne à la perfection ce mélange de fascination et de désillusion. Son dernier regard à la caméra, perdu entre nostalgie et vide existentiel, est l’un des plus beaux adieux du cinéma. Joe Pesci, en Tommy DeVito, est une bombe à retardement. Son interprétation, récompensée par un Oscar, est d’une intensité rare. Il est à la fois drôle, terrifiant, imprévisible. La scène du « Funny how? » est devenue culte, et pour cause : elle est improvisée, née d’une anecdote réelle vécue par Pesci. Robert De Niro, en Jimmy Conway, apporte sa gravité habituelle, mais avec une subtilité glaçante. Son regard fixe et son calme apparent, dissimulent une violence froide mais le film déconstruit la fascination pour ce personnage de caïd violent qui finit en homme mesquin et paranoïaque. Lorraine Bracco, en Karen Hill, offre une perspective féminine essentielle, souvent oubliée dans les films de gangsters. Elle est à la fois complice et victime, fascinée et effrayée. La musique dans Goodfellas n’est pas un simple accompagnement : elle est un personnage à part entière. Scorsese choisit chaque morceau avec une précision chirurgicale. Il impose une règle : ne jamais utiliser une chanson postérieure à la scène qu’elle accompagne. Le résultat est bluffant. De Tony Bennett à Sid Vicious, en passant par The Rolling Stones, Cream, Aretha Franklin ou Derek and the Dominos, chaque titre raconte quelque chose. Le montage du massacre post-Lufthansa sur Layla est une leçon de cinéma. Le chaos paranoïaque du dernier jour de Henry, rythmé par Jump Into the Fire et Monkey Man, est une symphonie de la chute. La musique ne commente pas l’action, elle l’amplifie, la transcende. Elle donne au film son rythme, sa pulsation, son âme.

Goodfellas marque un tournant dans la carrière de Scorsese. Après les introspections de Raging Bull et The King of Comedy, il revient au film de gangsters, mais avec une approche radicalement différente. Il abandonne la solennité du Godfather pour une vision plus crue, plus ironique, plus rock’n’roll. Ce film ouvre la voie à Casino, The Departed, The Irishman. Il est le point de départ d’une trilogie informelle sur le crime et la trahison. Mais il est aussi un aboutissement : celui d’un style, d’une vision, d’une obsession. L’impact de Goodfellas sur le cinéma est immense. Il a influencé des films comme Pulp Fiction, American Hustle, Boogie Nights, War Dogs, Lord of War. Il a redéfini le montage, la narration, l’usage de la musique. Il a inspiré des séries comme The Sopranos, dont le créateur David Chase cite Goodfellas comme une référence majeure. Conclusion : Goodfellas est un film qui ne vieillit pas. Il reste aussi percutant, aussi moderne, aussi fascinant qu’en 1990. C’est une œuvre foisonnante, d’une énergie folle, où Scorsese dynamite le film de gangsters avec une mise en scène rock’n’roll. Entre éclats de violence brutale et moments de pure euphorie, le film épouse le rythme effréné de son incroyable soundtrack et change de style au fil des époques, reflétant l’ascension et la chute de ses protagonistes. Et puis, il y a ce dernier regard de Ray Liotta, perdu entre nostalgie et vide existentiel, qui clôt magistralement cette descente aux enfers. Un regard qui nous hante encore, longtemps après la fin du film.

Titre Original: GOODFELLAS
Réalisé par: Martin Scorsese
Casting : Ray Liotta, Robert De Niro, Joe Pesci…
Genre: Drame, Policier
Sortie le : 12 septembre 1990
Distribué par: Warner Bros. France
CHEF-D’ŒUVRE
Catégories :Critiques Cinéma, Les années 90








































































































































