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SYNOPSIS : Les Dieux sont en colère contre Arthur ! Après la destruction de Kaamelott, son refus obstiné de tuer Lancelot précipite le Royaume de Logres à sa perte. Il réunit ses Chevaliers, novices téméraires et vétérans désabusés, autour de la Nouvelle Table Ronde et les envoie prouver leur valeur aux quatre coins du Monde, des Marais Orcaniens aux terres glacées du Dragon Opalescent.
Depuis la sortie de Kaamelott – Premier Volet (KV1) en juillet 2021, les plans d’Alexandre Astier ont évolué. Initialement annoncée comme une trilogie concluant l’histoire entamée dans la série, la saga cinématographique a changé de forme : il est désormais question d’un deuxième volet scindé en deux parties, dont la seconde est prévue pour le 11 novembre 2026. De quoi perdre un peu les repères des spectateurs, surtout ceux qui attendent depuis des années une suite directe au Livre VI. En théorie un film supplémentaire c’est davantage de plaisir, en théorie oui, car le premier film n’avait pas fédéré malgré son excellent score au box-office. Ce Kaamelott – Deuxième Volet : Partie 1 (que nous appellerons KV2.1) arrive donc chargé d’enjeux : convaincre après un premier film accueilli froidement, proposer un vrai récit, faire évoluer ses personnages… et commencer à honorer la promesse d’un monde d’heroic fantasy pleinement incarné. La promotion a été au rendez-vous ces dernières semaines, mais aussi son lot de rumeurs et de frustrations, à commencer par l’absence remarquée de Franck Pitiot (Perceval), absence confirmée dans KV2.1, malgré les spéculations de certains fans.

Le premier film avait, à juste titre, divisé. Entre les fans de la série (au sein desquels il y avait déjà une dissension depuis les livres V et VI) et ceux des BD, les attentes étaient multiples. Or, ce KV1 avait peiné à s’imposer : manque d’ampleur, univers fantastique à peine esquissé, absence de souffle dramatique, et surtout un Arthur encore morne et dépressif, trahissant en quelque sorte le sursaut final du Livre VI, qui laissait espérer un retour triomphal (au même titre qu’une affiche promotionnelle qui promettait qu’il ne revenait pas pour trier les lentilles, alors que le film le montrait à nouveau en train d’essayer de se suicider…). Astier a récemment indiqué qu’une version longue du premier film était en projet, avec une quinzaine de minutes supplémentaires ; KV1 s’était apparemment retrouvé à l’époque légèrement amputé à cause du contexte sanitaire, afin de permettre aux exploitants de programmer davantage de séances en salles. Peut-être que cette version pourra atténuer certains défauts (par exemple, ne pas voir les retrouvailles entre Arthur, Léodagan et Séli était parfaitement incompréhensible)… mais en attendant, il fallait redresser la barre. KV2.1 corrige en grande partie le tir : l’univers prend de l’ampleur, les effets spéciaux sont plus nombreux et largement convaincants, la photographie et la direction artistique impressionnent. La réalisation est plus inspirée, plus ample, les décors naturels magnifiques et variés (plusieurs pays, notamment l’Islande, ont accueilli le tournage), les scènes sont mieux découpées, mieux rythmées. En somme, on y croit enfin, et l’on retrouve un univers plus proche de ce que les BD ou certains épisodes laissaient entrevoir. Mention spéciale aux costumes de Marylin Fitoussi, toujours aussi grandioses.

Malgré cette montée en gamme, un problème persiste : le personnage d’Arthur reste trop figé. Dès la bande-annonce, le ton est donné : Arthur replante Excalibur, désormais noire, refusant d’achever Lancelot après leur dernier duel. Or, les dieux veulent qu’il le tue. Mais Arthur, fidèle à son humanisme, s’y refuse. Ce refus incessant d’agir, répété à l’envi depuis plusieurs années, est désormais une impasse. Ce que l’on pouvait comprendre dans le cadre du drame politique et psychologique des Livres V et VI devient ici une redite épuisante : Arthur est toujours dépressif, toujours désabusé, toujours bloqué entre fatalité et renoncement (même si pour une fois depuis longtemps, il va enfin commencer à se sortir les doigts). Et c’est là que surgit le vrai problème de la trilogie ou de ce qu’elle est devenue : on ne regarde pas vraiment une suite, mais une forme de soft reboot. Les enjeux, les dynamiques et les conflits sont les mêmes, mais reconfigurés, rethématisés, dans un nouvel écrin plus grand, plus soigné. Le récit patine, répète ce qui a déjà été dit, et malgré la beauté formelle de l’ensemble, on a parfois l’impression que tout cela tourne en rond.

L’autre faiblesse majeure du film tient à sa structure narrative. En tant que Partie 1, le film est par définition incomplet, et malheureusement, cela se ressent. Il n’y a pas de véritable climax, pas de surprise finale, pas de retournement ou de tragédie. Le film se termine brutalement, sans émotion forte, sans point d’orgue. Même la scène post-générique semble dispensable. C’est d’autant plus frustrant que le film regorge de promesses : le casting s’étoffe, avec une mise en avant des jeunes recrues (la plupart déjà vues dans le premier film), qui gagnent (très vaguement toutefois) en épaisseur. On retrouve aussi avec plaisir Karadoc, la Dame du Lac, le tavernier, Venec… Tous cohabitent plutôt harmonieusement, dans une dynamique de groupe plus fluide que précédemment. Mais là encore, certaines intrigues secondaires peinent à convaincre. La quête de Géran (Moguiz) et ses compagnons aboutit pour eux à une révélation certes potentiellement utile, mais dont la mise en scène dramatique est inexistante, donnant l’impression d’un gigantesque brassage de vent. D’autres fils narratifs, comme le jeune chevalier lourdingue obsédé par l’idée de tuer son frère, manquent d’intérêt. Certaines séquences (les altercations à la table ronde, Karadoc se faisant frapper à coups de poulpe et légumes) virent même parfois à l’absurde gratuit et un peu trop lourd, déstabilisant le ton du film, manquant de naturel. Et pour en revenir brièvement au sujet Perceval, lui qui était d’ailleurs parfaitement insupportable dans le premier film à toujours crier, non il ne manque pas spécialement. Nous comprenons d’ailleurs que son interprète n’ait pas voulu revenir mais espérons malgré tout qu’il aura sa place dans le dernier volet, car conclure Kaamelott sans Perceval laisserait un goût d’inachevé. Cette absence demeure d’ailleurs relative, car même si Perceval n’est pas présent en chair et en os, il est évoqué à plusieurs reprises.

Il se passe néanmoins quelque chose dans ce KV2.1. Pour la première fois depuis longtemps, on retrouve dans Kaamelott cette chaleur particulière, ce sentiment de retrouver un monde familier et foisonnant. Les scènes de couloirs, les vieilles disputes, les jumelles du pêcheur, l’humour absurde et les regards de côté nous rappellent que l’on est bien chez Astier, que son univers n’a pas été trahi. Mais cette nostalgie, si elle est touchante, ne suffit plus. L’histoire n’avance pas. Le cœur du récit reste comme nous le disions figé : Arthur dépressif face à un Lancelot clochard en guenilles, Méléagant comme ombre constante qui n’explique pas grand-chose de concret… Et rien ne change vraiment. On attendait enfin une montée en tension, un moment dramatique, une mort, une perte, un tournant. Mais tout est désamorcé par des actes ou dialogues systématiquement atténuants, comme si Astier refusait encore de passer à la vitesse supérieure. Malgré cela, KV2.1 reste meilleur en tous points que le premier film : plus beau, plus maîtrisé, plus vivant. Il est sans aucun doute ce que le Premier Volet aurait dû être pour relancer l’univers au cinéma, surtout que nous avons enfin ici des monstres en CGI destinés à faire vivre le monde foisonnant souvent évoqué mais jamais trop montré. On ne s’ennuie pas, on rit ou sourit souvent, on admire parfois. Mais ce n’est pas encore la suite du Livre VI. Ce n’est pas encore le récit que l’on attend depuis plus de dix ans.

KV2.1 est (encore…) un film de transition, mais vers un passage qui semble pour une fois proposer du concret. Plus abouti que son prédécesseur, plus généreux, plus fidèle à l’univers d’origine, il rassure sur la direction artistique et la cohérence interne. Il fait renaître l’intérêt et l’espoir. Mais il souffre aussi de choix narratifs frileux, d’un rythme parfois inégal, et surtout d’un refus d’avancer. On ne veut plus voir Arthur replanter l’épée. On veut qu’il s’en serve. Il est temps que Kaamelott passe un cap, qu’il cesse de ressasser ses douleurs passées pour enfin bâtir ce qu’il avait promis : un destin épique. Espérons que la Partie 2, prévue en 2026, saura concrétiser cela. Il est encore temps de rectifier le tir, mais il faut que ça commence vraiment et non pas au bout de quatre films…

Titre Original: KAAMELOTT – DEUXIÈME VOLET [Partie 1]
Réalisé par: Alexandre Astier
Casting: Alexandre Astier, Anne Girouard, Jean-Christophe Hembert …
Genre: Comédie, Historique, Aventure
Sortie le: 22 Octobre 2025
Distribué par: SND
TRÈS BIEN
Catégories :Critiques Cinéma, Les années 2020








































































































































