SYNOPSIS : A l’apogée de sa gloire, Marcel Pagnol reçoit la commande d’une rédactrice en chef d’un grand magazine féminin pour l’écriture d’un feuilleton littéraire, dans lequel il pourra raconter son enfance, sa Provence, ses premières amours… En rédigeant les premiers feuillets, l’enfant qu’il a été autrefois, le petit Marcel, lui apparaît soudain. Ainsi, ses souvenirs ressurgissent au fil des mots : l’arrivée du cinéma parlant, le premier grand studio de cinéma, son attachement aux acteurs, l’expérience de l’écriture. Le plus grand conteur de tous les temps devient alors le héros de sa propre histoire.

Avec Marcel et Monsieur Pagnol, le réalisateur Sylvain Chomet, connu pour ses acclamés Les Triplettes de Belleville ou L’Illusionniste, signe un biopic original et profondément attachant. Loin des récits classiques en prises de vue réelles, Chomet choisit l’animation pour retracer la vie de Marcel Pagnol, une décision qui prend tout son sens tant le film s’ancre dans les méandres des souvenirs chargés de nostalgie. Dès les premières minutes, le ton est donné : Marcel Pagnol, désormais célèbre, reçoit une commande inattendue de la part d’une rédactrice en chef d’un grand magazine féminin. Il doit écrire un feuilleton autobiographique. Problème : il avait totalement oublié ce projet. Alors qu’il tente de rédiger les premiers feuillets, une apparition inattendue survient, celle du petit Marcel, l’enfant qu’il a été. À partir de là, c’est à travers les yeux de cet enfant que le récit se déploie, filant les souvenirs comme les pages d’un roman.

Le parti pris narratif, faire revivre les souvenirs de Pagnol à travers son double enfantin, donne au film une dimension sensible et poétique. Ce procédé permet de revisiter, avec un regard tendre et parfois lucide, les grandes étapes de la vie de l’artiste aux multiples savoir-faire. De ses premières amours à ses grandes désillusions, de ses débuts à ses succès au théâtre, en passant par les drames intimes, comme le décès bouleversant de sa fille, Marcel et Monsieur Pagnol trace le portrait d’un homme à la fois ambitieux, rêveur et vulnérable. Le film saute d’une époque à l’autre au fil des souvenirs, reconstituant une vie à la manière d’un patchwork animé. On suit ses ambitions parisiennes, sa quête de reconnaissance, sa passion pour les mots, mais aussi ses doutes, ses échecs et ses moments d’égarement. Le théâtre occupe une place centrale, mais c’est le cinéma qui deviendra, pour Pagnol, un nouveau territoire d’expression. À l’arrivée du cinéma parlant, il saisit cette révolution comme une opportunité : celle de s’émanciper du carcan théâtral qui est devenu trop facile pour lui et de toucher un nouveau public. C’est ainsi qu’il fondera son propre studio, une étape déterminante dans sa carrière, qui permettra notamment la conclusion de sa fameuse trilogie marseillaise.

La grande force du film réside dans sa capacité à mêler légèreté et profondeur. Marcel et Monsieur Pagnol est autant un hommage qu’un conte visuel. L’animation, toute en couleurs chaudes, confère au récit une atmosphère enveloppante. Paris et Marseille, les deux pôles affectifs et créatifs de Pagnol, y sont magnifiés : la première, nerveuse et intellectuelle ; la seconde, solaire et populaire. Chaque décor semble respirer la vie, la mémoire et l’émotion. Les personnages secondaires, nombreux, ne sont jamais réduits à de simples silhouettes, tous participent à la construction d’un univers riche et attachant. Loin de se contenter d’un survol biographique, le film déborde de détails, de clins d’œil, d’anecdotes, rendant justice à la densité d’une carrière hors norme. Mais au-delà de l’hommage, Marcel et Monsieur Pagnol séduit aussi par son accessibilité. Le film ne s’adresse pas uniquement aux connaisseurs de l’artiste ou aux nostalgiques de la Provence. Il réussit le pari d’être à la fois divertissant et instructif, léger sans être superficiel. Un petit bonbon coloré avec une vraie valeur patrimoniale.

Avec Marcel et Monsieur Pagnol, Sylvain Chomet signe une œuvre généreuse et sincère, à l’image de son sujet. En mêlant mémoire intime et fresque culturelle, le film offre un regard singulier sur une figure incontournable de la culture française. Loin de la biographie académique, le réalisateur propose un récit vivant, plein d’humour et d’émotion, où l’on sent l’admiration mais aussi une vraie volonté de faire redécouvrir l’homme derrière le mythe. À travers les yeux du petit Marcel, c’est aussi notre propre rapport à l’enfance, aux rêves et à la création qui est interrogé. Le film devient alors une œuvre sur la mémoire, sur le pouvoir des histoires, et sur la manière dont elles continuent, longtemps après, à nous accompagner.

Titre Original: MARCEL ET MONSIEUR PAGNOL

Réalisé par:  Sylvain Chomet