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SYNOPSIS : Un homme piégé dans un couloir de métro cherche la sortie numéro 8. Pour la trouver, il faut traquer les anomalies. S’il en voit une, il fait demi-tour. S’il n’en voit aucune, il continue. S’il se trompe, il est renvoyé à son point de départ. Parviendra-t-il à sortir de ce couloir sans fin ?
Avec Exit 8, Genki Kawamura signe un second long métrage qui intrigue autant qu’il déçoit. Après N’oublie pas les fleurs, que nous n’avons malheureusement pas encore eu l’occasion de découvrir, le réalisateur s’attaque ici à un tout autre genre : celui du thriller mental, à la frontière du fantastique. À l’instar des grandes franchises qui tentent de se renouveler, Kawamura propose une réinterprétation d’un thème usé jusqu’à l’os : la boucle temporelle. Mais loin des habituelles variations, Exit 8 restreint volontairement son espace à un simple couloir de métro, et son enjeu à une série de règles absurdes et impitoyables. Le film avait tout pour évoquer un Silent Hill en version minimaliste, avec ce décor angoissant, ces silhouettes menaçantes, et cette menace sourde. Mais passé l’atmosphère dérangeante des premiers instants, Exit 8 s’en détache totalement, préférant un exercice conceptuel au vrai film d’horreur. Cela devient ainsi un film sur l’erreur, la vigilance, la répétition, mais c’est aussi, et c’est là que le bât blesse, un film qui oublie parfois de donner du sens à son propre dispositif.

Le postulat est aussi simple qu’inédit : un homme se retrouve prisonnier d’un couloir de métro sans fin. Sur les panneaux accrochés au mur, des instructions claires s’affichent : “Si vous voyez une anomalie, faites demi-tour. Si vous n’en voyez pas, continuez.” En cas d’erreur d’interprétation, tout est remis à zéro, littéralement, car le but est d’atteindre le panneau indiquant la sortie 8 (en partant du 0). Ce qui semble être une punition pour une faute légère devient un cycle implacable, une mécanique brutale et obsédante. Dès lors, chaque détail devient suspect, chaque variation dans l’environnement, un bruit, une affiche légèrement déplacée, un personnage qui ne devrait pas être là, peut signer une fin de progression.

Ce système de jeu impose une tension constante, et Kawamura parvient, au moins dans la première moitié du film, à maintenir l’attention du spectateur grâce à une mise en scène rigoureuse. On se prend au jeu : repérer les anomalies devient aussi angoissant pour nous que pour lui. Le rythme est volontairement lent, presque hypnotique, et cela fonctionne étonnamment bien. Là où l’on pouvait craindre l’ennui, le film installe une tension paradoxalement nourrie par la répétition. Il faut saluer cette capacité à faire tenir un long métrage entier sur un concept aussi réduit sans que cela ne paraisse mécaniquement vide. Kawamura réussit à entretenir une forme de suspense mental, proche du puzzle psychologique, où le spectateur devient actif, observateur, attentif au moindre détail. Mais si la forme fonctionne, le fond, lui, laisse à désirer. Rapidement, la mécanique ne suffit plus à masquer une certaine vacuité narrative. Car si Exit 8 repose sur un système malin, il peine à le relier à une véritable trajectoire émotionnelle ou symbolique forte. Les règles de ce monde étrange sont posées, certes, mais elles ne sont jamais véritablement explorées. Que sont exactement ces anomalies ? D’où vient ce monde souterrain ? Pourquoi ce personnage ? Et surtout, pour quoi faire ? Là n’est finalement pas la question…mais pourtant les vraies questions nous importent peu. Le film laisse entrevoir des éléments de réponse mais cette tentative d’ancrage dramatique paraît convenue, voire téléphonée. On devine rapidement une volonté d’évoquer la difficulté de faire face à ses responsabilités…et on en reste à peu près à ce stade. Ce sentiment est d’autant plus frustrant que le spectateur, lui, est sollicité tout au long du film : on observe, on réfléchit, on cherche à comprendre. Mais à la fin, tout tombe comme un soufflé, le final ne bouleverse rien. Ce qui ressemblait à un mystère soigneusement entretenu débouche sur une résolution attendue, presque banale. Une quête simplette, au symbolisme trop transparent pour réellement marquer. Cette faiblesse se ressent d’autant plus fortement dans le rapport à la culture du public : ce qui pourrait faire sens dans une approche plus enracinée dans la tradition japonaise, rapport à la honte, à la faute morale, à la rédemption silencieuse, reste ici un peu trop abstrait pour émouvoir un public occidental. Le cheminement du protagoniste semble finalement gratuit, voire vain. Le spectateur, investi dans les règles du jeu, n’est pas récompensé par une révélation ou une émotion à la hauteur de l’attente. C’est d’autant plus dommage que le concept, lui, méritait clairement mieux.

Exit 8 est donc un film qui fascine par sa forme et déçoit par son fond. À la fois brillant et creux, il donne à voir une mise en scène redoutablement maîtrisée, capable de transformer un couloir sans fin en pur espace de cinéma. Le concept de la boucle temporelle est ici revisité avec une inventivité pertinente, combinant mécanique de jeu vidéo, tension dramatique et exigence esthétique. Mais malgré cette promesse formelle, le film finit par tourner en rond. L’univers, dont les règles sont strictes, ne s’ouvre jamais à autre chose qu’à lui-même et le spectateur, pourtant captivé au départ, sort de la salle un peu frustré, avec l’impression d’avoir participé à une énigme dont la solution importe peu, ou pire, n’existe pas. En définitive, Exit 8 est une œuvre singulière mais inaboutie. Une belle tentative de cinéma conceptuel, aussi intelligente dans sa fabrication que décevante dans sa destination. Une boucle dont on aurait aimé qu’elle débouche sur quelque chose de plus fort, de plus juste, ou simplement de plus percutant.

Titre Original: 8-BAN DEGUCHI
Réalisé par: Genki Kawamura
Casting : Kazunari Ninomiya, Yamato Kôchi, Naru Asanuma …
Genre: Epouvante-Horreur
Sortie le: 03 septembre 2025
Distribué par: ARP Sélection
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Catégories :Critiques Cinéma








































































































































