SYNOPSIS : Alors qu’ils cherchent à s’affranchir d’un lourd passé, deux frères jumeaux reviennent dans leur ville natale pour repartir à zéro. Mais ils comprennent qu’une puissance maléfique bien plus redoutable guette leur retour avec impatience…

La carrière de Ryan Coogler est peut-être l’exemple parfait d’un jeune cinéaste talentueux de son époque qui a bâti sa carrière et son influence à Hollywood avec une méthode experte et progressive. S’étant imposé, avec le bouleversant drame indépendant Fruitvale Station (en 2013, inspiré du meurtre d’Oscar Grant par la police des transports de San Francisco en 2009), il a par la suite été propulsé vers des franchises de plus en plus importantes avec Creed (2015), le spin-off astucieux et touchant de Rocky, puis a accédé au trône du blockbuster avec le triomphe du véritable phénomène culturel Black Panther (2018) et de sa suite. Le réalisateur Ryan Coogler se lance avec audace dans son cinquième long métrage, une fantaisie horrifique défiant les genres.

Le réalisateur retrouve Michael B. Jordan (pour la 5ème fois) pour une histoire spirituelle, fantastique et sanglante qui se déroule dans les années 1930. L’action se déroule précisément en 1932, au cours d’une longue journée et d’une longue nuit dans la petite ville rurale de Clarksdale, dans le Mississippi. Smoke et Stack (tous deux interprétés par Michael B. Jordan) sont des jumeaux contrebandiers craints dans tout le delta du Mississippi avant de migrer vers le nord pour servir, comme ils le racontent, d’hommes de main d’Al Capone. Ils sont de retour dans leur ville natale avec des liasses de billets et des caisses de bière pour ouvrir un juke-joint dans une scierie désaffectée, achetée à un homme blanc raciste. Les jumeaux passent toute leur après-midi à organiser l’ouverture (qui a lieu le soir même), ils offrent aux musiciens de blues locaux des sommes alléchantes pour se produire. On suit alors leurs recrutements avec le bluesman alcoolique Delta Slim (Delroy Lindo) pour le divertissement, Grace (Li Jun Li) et Bo Chow (Yao) pour tenir le bar, et Cornbread (Omar Benson Miller) pour faire office de vigile. On découvre également d’anciens amours, comme Mary (Hailee Steinfeld), l’ancienne amante de Stack, ainsi que la magicienne Hoodoo nommée Annie (Wunmi Mosaku) que retrouve Smoke. Tandis que la romance cède la place à une violence croissante, les ennuis arrivent et transforment un espace de libération et de plaisir en véritable champ de bataille…

La distribution du film est un assortiment de talents dont la constitution prend du temps et illustre l’ampleur du film. Celui-ci s’ouvre brièvement sur un Miles Caton balafré et débraillé, brandissant le manche tranché de sa guitare dans l’église blanche de son père. Quant à la double performance de Michael B. Jordan, elle est introduite par des astuces numériques de pointe et le film prend soin de ne pas les distinguer de manière trop évidente. Smoke porte une casquette bleue, tandis que Stack porte un chapeau à bord rouge et deux de ses dents sont en or. L’acteur rend ces différences discrètes, subtiles et profondes. Les jumeaux sont la version corrompue d’un bon et d’un méchant flic, mais avec des esprits bien habillés. Et Michael B. Jordan les incarne avec un certain panache.

Sinners coche beaucoup de cases dans le monde du fantastique mais malheureusement, l’effet de surprise n’en fait pas parti, car la seconde moitié nous rappelle indéniablement Une nuit en enfer. Il s’agit donc d’un film sans suspense mais qui est malgré tout somptueux et captivant. Les films de vampires peinent souvent à inventer ou à se réinventer. Les formules et les mythologies du genre sont usées, répétées et reformulées : eau bénite, ail, le soleil brûlant et autres pieux en bois plantés dans le cœur sont les principaux outils utilisés. Ici Ryan Coogler prend volontairement son temps pour nous immerger narrativement et visuellement dans cet univers. De plus, Sinners est l’un des rares films d’horreur grand public à aborder un sujet difficile et émouvant : le salaire du péché dans l’Amérique noire. Aidé par la sublime photographie d’Autumn Durald Arkapaw qui nous plonge dans la splendeur ensoleillée et l’atmosphère inquiétante de l’arrière-pays du Mississippi tout en s’appuyant sur des plans panoramiques, pour nous transporter. Ajoutez à cela une musique de Ludwig Göransson qui gagne en acuité lorsqu’on entend du blues, joué par Sammie ou par l’équipe de vétérans locaux et vous obtenez une véritable surprise de 2025 (peut-être pas la dernière). Ryan Coogler nous offre un chant de louange passionné et débordant d’émotion sur la vie et l’amour, y compris l’amour du cinéma.

Disponible en DVD, Blu-Ray et 4K UHD le 20 août 2025

Suppléments:

Découvrez plus profondément le film SINNERS avec plus de 60 minutes de bonus comprenant des scènes coupées et des explications sur les effets spéciaux, visuels, et sur la musique du film. 

Titre Original: SINNERS