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LA MEILLEURE SÉRIE QUE VOUS N’AVEZ PEUT-ÊTRE JAMAIS VUE – PARTIE 10 : CAGNEY & LACEY

LA MEILLEURE SÉRIE QUE VOUS N’AVEZ PEUT-ÊTRE JAMAIS VUE PARTIE 10 : CAGNEY & LACEY

Le buddy cop show marche aussi féminin. Avec Cagney & Lacey, les clichés sur les femmes flics sont-ils véhiculés non stop ou au contraire est-ce la subtilité qui est de mise ? Cagney & Lacey : une série visionnaire, puissante et profondément humaine créée par Barbara Avedon et Barbara Corday, a été diffusée entre 1982 et 1988 — et prolongée par quatre téléfilms dans les années 90 — a posé les bases d’un genre encore trop rare à l’époque : celui du cop show féministe, ancré dans un réalisme social saisissant.

En mettant en scène les enquêtes de deux femmes flics du NYPD, Cagney & Lacey fut au début des années 80 précurseur d’une tendance décuplée par le mouvement de libération de la femme. La série fut arrêtée au terme de la saison 1 avant que la pression du public ne contraigne la chaîne à la relancer en changeant malgré tout une des héroïnes, Sharon Gless remplaçant Meg Foster. Du coup le tandem Sharon Gless-Tyne Daly au physique plus contrasté contribua également à la cohésion du duo malgré une situation familiale elle aussi différente (Lacey est mariée et a deux enfants, tandis que Cagney est célibataire et aime prendre du bon temps). La série mêle avec bonheur et de manière étroite la vie privée et la vie professionnelle du duo et bénéficie clairement d’un traitement réaliste tant dans les affaires dont elles sont en charge que dans la sensibilité féminine bien différente de celle de leurs collègues masculins et qui est mise largement à contribution. Les rapports humains entre Cagney et Lacey sont autant au centre de la série que les affaires sur lesquelles elles travaillent. Programme ouvertement féministe et au caractère social prégnant, Cagney & Lacey rencontra un succès public considérable et valut à ses deux comédiennes de multiples récompenses.

Autour de ce duo exceptionnel gravitent plusieurs seconds rôles masculins qui, s’ils sont généralement moins nuancés que les deux héroïnes, participent activement à l’ancrage réaliste de la série. On pense notamment à Al Waxman, qui incarne le capitaine Samuels avec un mélange d’autorité bourrue et de bienveillance paternaliste, ou à Martin Kove, plus rugueux dans le rôle du détective Isbecki, souvent dépassé par la complexité émotionnelle de ses collègues féminines. Ces personnages reflètent l’univers masculin traditionnel dans lequel Cagney et Lacey doivent sans cesse s’imposer. Toutefois, une exception notable mérite d’être soulignée : Sidney Clute, qui interprète le détective LaGuardia avec une humanité discrète, une sensibilité et une retenue qui en font un véritable allié silencieux du duo. Son jeu subtil tranche avec la caricature du « flic macho » et offre un contrepoint masculin touchant.

Ce qui rend Cagney & Lacey si remarquable, c’est sa capacité à conjuguer polar, chronique sociale et portrait de femmes en profondeur. À travers les 7 saisons, la série ose aborder l’alcoolisme, le sexisme systémique, l’homophobie, le stress post-traumatique, ou encore les difficultés des mères actives. Ce n’est pas un simple décor, c’est le cœur battant de chaque épisode. Loin des archétypes, Christine Cagney et Mary Beth Lacey sont montrées avec leurs failles, leurs contradictions, leurs forces, dans une écriture qui n’a rien perdu de sa finesse.

Leur duo est sans doute l’un des plus justes et touchants jamais vus à la télévision. On rit avec elles, on pleure avec elles, on doute, on se relève. Elles sont nos sœurs, nos amies, nos héroïnes du quotidien. Et c’est peut-être là la plus grande force de la série : son humanité. Réaliste, puissante et portée par deux actrices de haut vol, Cagney & Lacey gagne à être redécouverte par sa modernité et son souffle narratif. Car oui, c’est peut-être la meilleure série que vous n’avez jamais vue.

Catégories :Critiques, Séries

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