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SYNOPSIS : Superman se retrouve impliqué dans des conflits aux quatre coins de la planète et ses interventions en faveur de l’humanité commencent à susciter le doute. Percevant sa vulnérabilité, Lex Luthor, milliardaire de la tech et manipulateur de génie, en profite pour tenter de se débarrasser définitivement de Superman. Lois Lane, l’intrépide journaliste du Daily Planet, pourra-t-elle, avec le soutien des autres méta-humains de Metropolis et le fidèle compagnon à quatre pattes de Superman, empêcher Luthor de mener à bien son redoutable plan ?
Superman est un phœnix. Des cendres de l’ex-DCEU (le DC Extended Universe initié par le Man of Steel de Zack Snyder et parti en eau de boudin avec une succession d’échecs critiques et populaires assez retentissants), c’est finalement James Gunn qui occupera la place d’architecte de ce nouvel univers DC Comics en devenir qui a donc la lourde tâche de faire renaître les héros de la firme sous un nouvel étendard à une heure où l’industrie super-héroïque se bat avec une certaine lassitude de son public, un manque de prise de risque et une désertion des auteurs au profit de » Yes Man » appliquant un cahier des charges bien précis. Mais ne soyons pas si pessimistes : le genre super-héroïque ne va pas si mal, il semble simplement en attente de nouveaux auteurs pour se révéler à nouveau.

Chez DC, ce sont Peter Safran et James Gunn qui ont été chargés de construire le renouveau de la Justice League et consorts, rangeant au grenier les précédentes itérations des personnages. Si Gunn (ancien de l’écurie parallèle Marvel Studios puisque papa des Gardiens de la Galaxie) a décidé de – plus ou moins – garder les jouets qu’il avait installé lors de ses passages dans le DCEU (The Suicide Squad semble avoir été soft-rebooté, mais Peacemaker s’offre quand même une saison 2 censée raccrocher les wagons), c’est lui en personne qui signe le départ de ce tout nouvel univers cinématographique : nous sommes au lancement de la première » phase » de ce DCU sous-titrée » Gods and Monsters « . Déjà responsable de l’architecture d’un univers tout entier, pensé pour plusieurs actes sur au moins une décennie à l’avance (selon les dires du studio), James Gunn assume donc lui-même l’installation de son premier » Dieu « , le plus mythique de DC Comics, le Super originel : exit les groupes d’extra-terrestres marginaux censés sauver la galaxie, exit les criminels fond de tiroirs envoyés en missions suicide, le metteur en scène transforme son goût pour les douces bizarreries en un envol du Superman censé lancer tout son univers. Aucune pression donc sur ses épaules ni sur celles de ses nouvelles têtes d’affiche David Corenswet, Rachel Brosnahan et Nicholas Hoult, car ce Superman édition 2025 a tellement d’objectifs inhérents à sa production qu’il aurait aisément pu tourner à la catastrophe totale. Et pourtant, ce n’est pas la première fois qu’on voit Gunn trouver des héros là où personne n’aurait oser chercher.

Nous sommes dans l’ère des » Dieux et des Monstres » nous raconte le texte introductif du film. Avec une chronologie textuelle très astucieuse, James Gunn raconte son envie d’économie : nous ne verrons pas la traditionnelle » origin story » de Kal-El, avec l’explosion de Krypton, le vaisseau qui s’écrase dans le champ des Kent, l’adolescence à Smallville, la rencontre de Loïs Lane… Clark Kent est adulte, il travaille au Daily Planet, a débuté une relation avec la journaliste la plus cool du coin, et Superman est déjà bien installé. Il est le héros de Métropolis, un kryptonien qui tient tête aux méta-humains les plus redoutables de la région – car oui, dans son univers flambant neuf, les monstres et les super-personnes sont à tous les coins de rue. Mais lorsqu’on rencontre David Corenswet dans le costume de l’homme d’acier, il est en bien mauvaise posture. Pour la première fois de sa « carrière », Superman vient de se faire botter les fesses par un certain » Marteau de Boravie « . Et pour cause, quelques semaines plus tôt, Superman a empêché ladite Boravie d’envahir l’état de Jahnanpur, causant une polémique sur les pouvoirs du méta-humain le plus fort du monde. Le conseil des Etats-Unis se méfie du héros, alors que le richissime et calculateur milliardaire Lex Luthor complote en secret pour faire tomber de son piédestal son némésis auto-proclamé. La situation deviendra critique lorsque les armes de Luthor demanderont bien plus que l’homme d’acier et la suffisance du » Justice Gang » sponsorisé par Max Lord pour les arrêter… Pour installer son univers, pour poser les bases de ses héros, de ses nations, de ses personnages secondaires, de ses règles intrinsèques et de ses volontés artistiques futures, James Gunn choisit ici une ouverture particulièrement casse-gueule : le too-much. Dans un massif bac-à-sable super-héroïque, jouant à l’adaptation débridée des comics les plus colorés de Superman (l’inspiration principale dans le » All-Star Superman » écrit par Grant Morrison et dessiné par Frank Quitely se voit assez aisément), le réalisateur choisit – dans une démarche radicale qui tranche avec les itérations torturées de Henry Cavill sous Zack Snyder – de faire de son héros alien éponyme le personnage le plus humain de son étrange galerie. Là où l’on est habitué à le voir tordre des personnages bien installés, ou à farfouiller dans les tréfonds des comics pour réhabiliter des personnages secondaires réputés insauvables (on lui doit le salut des étranges Gardiens de la Galaxie, du désagréable Peacemaker et même du risible Polka-dot-Man), le cinéaste se charge désormais de faire parler son talent pour le divertissement ultra-efficace au service du personnage » Boy scout » par excellence, un humain droit dans ses bottes aux valeurs exemplaires prêt à défendre la veuve et l’orphelin avant tout le reste. Et cette plongée à l’intérieur de son Superman s’avère franchement réussie par sa singularité, faisant de Clark un adulte en construction qui peine à comprendre ses émotions mais qui tire chacune de ses actions vers le meilleur dont il est capable – le tout sur une bande-originale de David Fleming et John Murphy qui » remixe » le thème classique de John Williams.

Donc oui, le Superman de James Gunn fait des blagues. Beaucoup de blagues, même. Dans un festival comique tantôt hilarant tantôt essoufflant qui rebutera une bonne partie du public habitué aux super-héros plus sérieux, le réalisateur s’empare du mythe de Superman à 100%, marquant de sa patte les collants de l’Homme d’Acier pour l’habiller de bizarre, d’absurde et de cœur battant. Sa mise en scène s’articule sous les trouvailles virevoltantes trouvées de consort avec son directeur de la photographie Henry Braham, et colorées par les décors impressionnants de Beth Mickle et les costumes parfaits de Juliana Makovsky. La direction artistique du film, riche en constructions plateau et en effets spéciaux (impeccables dans l’ensemble à quelques petites exceptions – un bébé en CGI un peu déroutant par exemple) tout son corps à des scènes d’action spectaculaires, dont on peut citer la plongée dans la rivière de neutrons, ou l’arrivée de Mister Terrific au camp de Luthor – deux » James Gunn moments » réjouissants qui témoignent du soin porté au divertissement offert à leur public par le studio. Le tout est porté par un casting en tout point idéal, à commencer par le triangle » amoureux » de tête. Corenswet a la lourde tâche de donner son corps et son visage au plus grand héros de la Terre et s’en sort à merveille dans un équilibre sensationnel entre charisme grandiloquent, potentiel cool flamboyant et humanité débordante – bref, son Clark Kent/Kal-El/Superman donne un sourire bêta sur le visage pendant les 2h de film. Rachel Brosnahan est un casting parfait pour une Loïs Lane savamment écrite et pas seulement » love interest » de fonction, et Nicholas Hoult déjoue tous les pronostics en fournissant un Lex Luthor ébouriffant (on se permet le terme car il y est particulièrement chauve). Le comédien s’empare du bad guy avec une aisance redoutable, en faisant un méchant cartoonesque, haineux à l’excès et machiavéliquement calculateur, dont la présence fait un bien fou dans un registre super-héroïque qui avait presque oublié l’intérêt des bad guys juste bon à être des ordures démoniaques qui veulent détruire le monde par simple orgueil. On notera aussi les présences de Nathan Fillion, Isabela Merced et Edi Gathegi dans ce » Justice Gang » au nom savoureux qui devrait mener logiquement à la suite des histoires de Superman dans cet univers, ou encore Sara Sampaio, Anthony Carrigan et María Gabriela de Faría aux côtés de Luthor (même s’il est vrai qu’on aurait aimé voir plus de l’Ingénieure, un peu reléguée au rang de sous-fifre, bien que l’on suppose logiquement sa place centrale dans le film The Authority initialement prévu par Gunn dans son calendrier). Superman mouture 2025 présente donc un catalogue volontairement surchargé, un feu d’artifices totalement pulp et bizarrement plus « punk rock » que prévu, qui cache derrière ses airs caustiques, son optimisme salvateur et son humour tarabiscoté une vraie force humaniste, un discours politique qui saisit ses responsabilités en faisant résonner le réel à travers ses héros en collants (on pourra lire dans certains personnages ou dans certaines intrigues des parallèles avec des évènements d’actualité, notamment autour d’invasions militaires téléguidées par des grandes puissances, les manipulations de l’opinion publique par des technocrates sans cœur, un rejet des populations immigrées poussé par des discours xénophobes et la volonté de représentation d’une Amérique au grand cœur oubliée derrière la haine répandue par ses dirigeants – oui, tout ça). Tout ça nous offre un grand spectacle élégamment spectaculaire qui perdra beaucoup de monde en chemin par son registre comique volontairement décalé et son goût pour l’étrange, mais dirigé par le simple amour de ses penseurs pour son matériau d’origine. Gunn signe une ode à l’humanité de son Superman, une peinture lumineuse habile et rafraîchissante qui tient ses promesses en laissant une quantité effarante de pistes pour la continuité de l’univers qu’il pave. Ce Superman n’était pas nécessairement celui que l’on attendait, mais c’est désespérément celui dont le monde a aujourd’hui besoin.

Titre Original: SUPERMAN
Réalisé par : James Gunn
Casting : David Corenswet, Rachel Brosnahan, Nathan Fillion …
Genre: Action, Science Fiction, Aventure
Sortie le: 9 juillet 2025
Distribué par: Warner Bros. France
EXCELLENT
Catégories :Critiques Cinéma, Les années 2020








































































































































