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JURASSIC WORLD : RENAISSANCE (Critique)

SYNOPSIS : Cinq ans après JURASSIC WORLD : LE MONDE D’APRÈS, l’environnement de la planète s’est révélé hostile pour la plupart des dinosaures. Ceux qui subsistent vivent dans des zones équatoriales isolées, aux conditions proches de celles de leur ère d’origine. Parmi ces créatures terrifiantes, trois spécimens renferment peut-être la clé d’un remède capable de changer le destin de l’humanité.

Jurassic World : Renaissance est le septième long métrage d’une franchise qui semble vouloir survivre coûte que coûte à travers les décennies (presque autant que les dinosaures qu’elle met en scène), au risque parfois de diluer son essence dans une succession d’opus inégaux. Depuis l’inégalable Jurassic Park de 1993, chef-d’œuvre fondateur signé Steven Spielberg, les suites n’ont jamais su égaler la puissance mythique du premier film, tant sur le plan de la mise en scène, de l’histoire ou de l’impact émotionnel. Ce dernier reste, pour plusieurs générations, un choc cinématographique fondamental, un film dont la perfection semble condamner toutes les itérations suivantes à la comparaison défavorable. Il serait vain de dresser un classement des épisodes tant la franchise, à l’image d’autres sagas légendaires comme Star Wars ou Alien, s’est dispersée dans des directions esthétiques et narratives souvent contradictoires. Mais c’est justement là que Jurassic World : Renaissance intrigue : dirigé par Gareth Edwards, le cinéaste britannique révélé avec Monsters et salué pour son éminent Rogue One (probablement le plus respecté des Star Wars de l’ère Disney), ce nouvel opus tente une approche différente. Après un Godzilla bancal mais ambitieux et un The Creator audacieux (mais aussi incroyable d’un certain point de vue quand on connaît le budget) malgré ses imperfections, Edwards s’attaque ici à un monstre sacré du cinéma populaire, sans filet et sans nostalgie trop facile. Et le résultat est étonnamment convaincant.

Dès les premières minutes (enfin presque, on passera la scène d’introduction, certes efficace, mais au placement de produit improbable), Renaissance montre sa différence. Plutôt que de relancer une énième histoire de parc d’attraction ou de dinosaures échappés dans une zone urbaine, le film choisit une voie plus intéressante, presque mythologique. L’intrigue se concentre sur une mission clandestine mêlant scientifique, militaires et milliardaire : il s’agit cette fois de s’aventurer dans des zones équatoriales reculées et hostiles, où subsistent les derniers grands dinosaures, pour y prélever du sang sur des titans marin, volant ou terrestre. L’objectif : créer un remède censé sauver l’humanité d’une bonne partie de ses problèmes médicaux chroniques. Un point de départ qui frôle le ridicule, mais que le film parvient étonnamment à légitimer par son ton, sa rigueur narrative et sa maîtrise du rythme. Là où les précédents Jurassic Park/World échouaient souvent à équilibrer nostalgie et innovation, Renaissance trouve le parfait équilibre car chaque pièce est utile. L’introduction du film, notamment, est l’une des plus belles de la saga depuis longtemps : on y voit les dinosaures évoluer dans le monde moderne avec une banalité inquiétante, un brachiosaure errant sous un pont routier, gênant la circulation comme un éléphant au milieu d’un rond-point, une scène à la fois absurde, poétique et symbolique de cette cohabitation forcée avec l’héritage du passé. Edwards installe un monde où les dinosaures ne sont plus simplement des anomalies, mais des conséquences (ce qu’on attendait d’ailleurs davantage du troisième Jurassic World).

Le film embrasse ensuite le film d’aventure, presque d’expédition, avec ses zones interdites, ses tensions internes au groupe et ses confrontations brutales avec une nature redevenue incontrôlable. Le groupe, volontairement hétérogène, rassemble des archétypes : le capitaine de bateau traumatisé par un drame personnel (Mahershala Ali très charismatique et attachant), le scientifique idéaliste (Jonathan Bailey qui crève l’écran, on ne doute pas que ce film lui ouvrira de nombreuses portes au cinéma), le financier (Rupert Friend qui s’impose dans le rôle le plus manichéen du film) aux motivations capitalistes, la mercenaire en quête de rédemption inavouée (Scarlett, mais on y reviendra)… mais le traitement est suffisamment nuancé pour qu’on dépasse la caricature. Et surtout, les personnages sont bien intégrés à l’action, chacun ayant un rôle réel à jouer, une trajectoire, un poids dramatique. Là où Jurassic World : Renaissance impressionne le plus, c’est dans sa mise en scène. Gareth Edwards confirme qu’il sait filmer le gigantisme sans sacrifier l’humanité. Ses dinosaures ne sont pas que des effets spéciaux : ce sont des présences. Ils surgissent et ils impressionnent. Chaque scène de rencontre avec une créature majeure est pensée comme un moment de tension ou d’émerveillement, à l’instar du boss d’un jeu vidéo ; il y a une vraie économie dans les effets, un refus du spectaculaire gratuit. Cela n’empêche pas le film d’offrir des scènes d’action de haute volée : la séquence d’attaque aquatique est un bijou de plaisir, tandis que la confrontation dans les hauteurs offre un vertige bienvenu dans la saga. Le rythme du film, loin d’être linéaire, alterne entre montée dramatique et respiration. Il prend le temps de construire ses enjeux, d’installer ses décors, de nourrir ses relations humaines. Et surtout, il ose quelques moments de silence, voire de contemplation. L’un d’eux, que l’on taira volontairement, s’impose comme l’un des moments les plus forts de toute la saga, un instant suspendu qui dit tout ce que les mots ne peuvent exprimer, et où les personnages, mêmes les plus « durs », savent briser la carapace.

Du côté des interprétations, le casting est solide. Scarlett Johansson, enfin intégrée à une franchise qu’elle semblait vouloir rejoindre depuis longtemps, livre une prestation investie, loin des rôles mécaniques qu’on lui attribue parfois malgré le fait qu’elle démarre en jouant un archétype assez basique. Elle incarne une protagoniste à la fois forte, blessée et porteuse d’un véritable dilemme moral. Les autres rôles sont tenus avec justesse, et les dialogues, bien que parfois convenus, évitent le cynisme ou la caricature trop prononcée (hormis le personnage de Rupert Friend). Même les civils embarqués “par accident” dans l’expédition ne font pas figure de simples témoins : ils enrichissent l’intrigue, apportent une dimension émotionnelle et renforcent la tension. Les compositions d’Alexandre Desplat habillent bien l’ensemble, sans forcément marquer les esprits, puisque s’il y a bien un morceau que l’on retiendra en sortant c’est le thème originel.

Avec ce nouveau volet, la franchise Jurassic semble enfin avoir trouvé son second souffle. Là où les précédents films s’épuisaient à courir après le prestige du premier ou à flatter une nostalgie épuisée, Renaissance choisit d’être un vrai film de cinéma, avec sa logique, son identité visuelle et sa propre ambition. Gareth Edwards réussit l’exploit de respecter l’univers tout en s’en affranchissant, en proposant une aventure plus viscérale, plus immersive et surtout plus cohérente. L’idée que les dinosaures, autrefois symboles d’émerveillement ou de danger, deviennent ici des ressources vitales pour l’avenir de l’humanité, après avoir lassés les humains pourris gâtés, est une exploration tout à fait innovante, bien loin des délires de clonage humain à la mords-moi-le-nœuds des précédents opus. Ce Jurassic World est donc une vraie surprise, non parce qu’il bouleverse le genre, mais parce qu’il le respecte tout en le revitalisant. On y retrouve le frisson, le danger, la beauté brute, et parfois même la grâce. Ce n’est donc pas un simple épisode de plus, c’est une proposition forte, probablement le film le plus réussi depuis bien longtemps, voire depuis le tout premier. Une expérience sensorielle et cinématographique, un blockbuster comme on n’en fait plus : intelligent, généreux, et parfaitement réalisé. Gareth Edwards semble donc décidément le couteau suisse capable de sauver presque n’importe quelle franchise.

Titre Original: JURASSIC WORLD : REBIRTH

Réalisé par: Gareth Edwards

Casting : Scarlett Johansson, Jonathan Bailey, Mahershala Ali  …

Genre: Action, Aventure

Date de sortie: 04  juillet 2025

Distribué par: Universal Pictures International France

EXCELLENT

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