M3GAN 2.0 (Critique)

Par William François le juin 24, 2025 • ( Poster un commentaire )

SYNOPSIS : Deux ans ont passé depuis la destruction de M3GAN, le prototype à la pointe de l’intelligence artificielle devenu incontrôlable lors d’un carnage aussi sanglant qu’impeccablement chorégraphié. Sa créatrice Gemma aujourd’hui auteure de renom milite pour l’encadrement drastique des I.A par le gouvernement, alors que Cady, sa nièce de 14 ans entre dans l’adolescence et se rebelle contre les règles trop strictes de sa tante. Cependant, à l’insu de tous, la technique de pointe mise au point pour M3GAN a été volée et détournée pour créer une arme militaire connue sous le nom d’AM3LIA. À mesure que se développe la conscience de ce bijou d’espionnage, implacable machine à tuer, les ordres qu’elle reçoit lui paraissent de plus en plus superflus. Comme les humains qui les lui donnent. Alors que l’avenir de l’humanité est en jeu, Gemma réalise que M3GAN est sa seule option. Elle la réactive alors et la reprogramme dans une version encore plus rapide, plus puissante et implacablement létale pour affronter une adversaire enfin à sa mesure.

3 ans après son apparition sur les écrans, M3GAN est de retour pour jouer un mauvais tour – toujours chapeauté par les studios BlumHouse/Atomic Monster et écrit-réalisé par Gerard Johnstone. On récapitule : en 2022, M3GAN premier du nom racontait la connexion entre la petite Cady venant tout juste de perdre ses parents dans un accident tragique et une IA next gen programmée pour l’empathie. Évidemment, tout part à vau-l’eau lorsque M3GAN se met en tête de protéger Cady à tout prix, résultant en fin de parcours par un beau massacre Chucky-esque. Ce premier opus n’avait pas réellement réussi à être mémorable malgré un concept assez sympathique et le design réussi de sa poupée IA démoniaque (le marketing de M3GAN s’en donne à cœur-joie pour l’intégrer partout). Il était évident qu’une suite allait voir le jour, c’est désormais le cas. On reprend Johnstone derrière la caméra et tout le casting original (Allison Williams et Violett McGraw retrouvent Gemma et Cady), toujours sous l’ombre de sa classification PG-13 qui empêche les effusions de sang, la violence graphique, les injures et autres joyeusetés pourtant appréciables au sein d’un film d’horreur.

M3GAN reboote dans cet opus 2.0 en reprenant quelques années après son prédécesseur. M3GAN a été mise hors d’état de nuire, Gemma est devenue militante pour la régulation de l’IA et sa relation avec Cady ne s’est pas vraiment améliorée. C’est alors que l’armée américaine se retrouve en possession d’une technologie étonnante : un autre modèle d’IA anthropomorphe nommé AMELIA qui va vite devenir indépendante et hors de contrôle… Gemma se retrouve au pied du mur et prend peut-être la décision la plus étrange possible : faire renaître M3GAN de ses cendres et lui fabriquer un nouveau corps afin de contrecarrer les plans machiavéliques d’AMELIA…

Le premier M3GAN racontait les traumas partagés d’une jeune fille endeuillée et de sa tante pas vraiment calibrée pour élever un enfant, le tout saupoudré d’une réflexion limitée mais intrigante sur l’IA dans la construction sociale d’un enfant, mutant dans son dernier tiers en un jeu de slasher à la Chucky : ce second opus fait fi de tout ça. M3GAN 2.0 est une revisite (à vrai dire, plutôt une joyeuse repompée) de Terminator 2, faisant de son antagoniste d’autrefois une super-héroïne calibrée pour arrêter un complot technologique flambant neuf. Exit l’intimisme générationnel : 2.0 est un croisement étrange et mal fagoté des aventures IA du dernier Mission Impossible et de l’industrie super-héroïque moderne. Plus aucune trace de film d’horreur : Johnstone met en scène un divertissement pop-corn d’une banalité effarante, navigant sur tellement d’idées contradictoires que l’on ne sait jamais sur quel pied danser. M3GAN 2.0 semble calibré autour de ses scènes-clés que l’on imagine déjà tourner sur les réseaux sociaux en boucle de 20 secondes, vidant tous ses personnages de leurs substances pour garder des archétypes exsangues. La Gemma d’Allison Williams est ici particulièrement surprenante, la nature de chacun des choix qu’elle fait dans le film semblant à chaque fois aussi absurde qu’incompréhensible dans le déroulé de son écriture. M3GAN est écrite comme un simple pantin juste bon à délivrer des punchlines edgys, avant de muter en agent secret en wingsuit pro de l’infiltration et de la castagne au corps-à-corps. 2.0 trouve alors le même défaut central que son prédécesseur, à savoir son effacement de la violence graphique à coup d’hors-champ cache-misère, étonnant tant le réalisateur était cette fois au courant du PG-13 du film mais qu’il a malgré tout décidé de frustrer le public à chaque mort en installant des set-ups intéressants avant de couper au moment fatidique.

Il y a néanmoins une lueur d’espoir dans ce deuxième opus, une réussite évidente que l’on ne peut sciemment pas nier, à travers sa méchante AMELIA interprétée brillamment par la comédienne Ivanna Sakhno (vue en apprentie Sith dans la série Ahsoka), qui se dote des meilleurs designs du film en s’offrant la dose de charisme nécessaire au rôle. On déplorera alors l’écriture ultra prévisible de l’antagoniste du film, dont l’identité censée être source de suspense et de retournement de situation est devinable dès l’instant où la caméra se pose sur son visage. Ce souci narratif est alors l’exemple typique d’un scénario malheureusement cousu de fils blancs, s’essayant à un nouveau genre dans un reboot qui ne marche pas – qui a envie de croire que M3GAN pourrait tourner sauveuse de l’humanité après avoir massacré plein de gens à la fin du dernier opus ? A vouloir refaire Terminator 2, Johnstone a mis de côté l’idée que le T-800 du deuxième opus n’est pas le même que celui du premier, ce qui n’est pas le cas de M3GAN, indiscutablement la même. M3GAN 2.0 a alors tenté le tout pour le tout afin d’entrer dans la sphère du spectacle pop-corn grand-public, à coup de complot politique, d’IA machiavélique, de séquences d’infiltration qui feraient pâlir Tom Cruise et de séquences justes bonnes à être découpée pour l’algorithme TikTok : ce second opus ne marche malheureusement pas, à l’exception près de son antagoniste robotique et des quelques séquences de combat du climax étonnamment prenantes. Pour le reste, on passera devant une écriture cadenassée par ses clichés, des personnages insupportables quand ils ne sont pas vides de substance, une réflexion étrangement maladroite sur la régulation de l’IA, un mix des genres grossier et un cruel manque de cinéma au global. Pas le pire de son médium, mais malheureusement pas non plus grand-chose d’intéressant à se mettre sous la dent.