
SYNOPSIS : Danny Boyle, réalisateur oscarisé, et Alex Garland, scénariste nommé à l’Oscar, se retrouvent pour 28 ANS PLUS TARD, nouvel opus terrifiant de la saga initiée par le film 28 JOURS PLUS TARD. Cela fait près de trente ans que le Virus de la Fureur s’est échappé d’un laboratoire d’armement biologique. Alors qu’un confinement très strict a été mis en place, certains ont trouvé le moyen de survivre parmi les personnes infectées. C’est ainsi qu’une communauté de rescapés s’est réfugiée sur une petite île seulement reliée au continent par une route, placée sous haute protection. Lorsque l’un des habitants de l’île est envoyé en mission sur le continent, il découvre que non seulement les infectés ont muté, mais que d’autres survivants aussi, dans un contexte à la fois mystérieux et terrifiant…
28 Ans plus tard marque le retour triomphal (et largement attendu) de Danny Boyle à la réalisation et d’Alex Garland au scénario, duo mythique derrière 28 Jours plus tard, film culte sorti en France en mai 2003 qui avait redéfini le film de zombies avec son image volontairement granuleuse et imparfaite et son énergie brute immersive. Entre-temps, 28 Semaines plus tard avait pris le relais en septembre 2007 sans les deux créateurs originaux. Si cette suite offrait quelques scènes mémorables, en particulier son incroyable introduction et une bande originale percutante, elle ne semble jamais avoir su atteindre dans l’esprit des gens le statut iconique de son prédécesseur, la faute à une approche plus conventionnelle, davantage axée action et aussi certainement moins personnelle. Attention, ne crachons pas dans la soupe pour autant, cette suite de Juan Carlos Fresnadillo restait un bon film qui a de nombreux défenseurs (et à juste titre). Depuis, un long silence s’est abattu sur la franchise, largement étouffée par la surexploitation du genre à travers des œuvres comme The Walking Dead, et ses innombrables récits recyclés qui ont totalement asphyxié le marché. L’essoufflement de The Walking Dead couplé à la médiocrité généralisée de la perception des différentes séries dans l’esprit des gens et l’abandon de leur fidélité jusque-là acquise a ouvert la porte à une nouvelle ère : le retour de la saga 28. C’est donc avec une certaine appréhension (en réalité pas tant que ça, nous restions majoritairement confiants) mêlée d’enthousiasme que nous attendions ce troisième opus, et le résultat dépasse nos attentes.

Contrairement à ce que laissait présager une introduction tape-à-l’œil, superficielle et presque arrogante (qui n’égale selon nous pas celles des deux premiers opus, vous l’aurez compris), un faux pas rapidement oublié, 28 Ans plus tard s’impose rapidement comme une œuvre originale, qui prend ses distances avec les précédents films tout en respectant leur héritage. Cette suite nous plonge dans une petite communauté isolée, vivant sur une petite île loin de la côte, reliée au continent uniquement par une route submersible à marée haute. Ce décor de toute beauté offre un contraste fort avec les environnements urbains claustrophobes des films précédents, et Boyle y capture des paysages naturels à la fois sublimes et inquiétants, contribuant à une atmosphère tout à fait inédite. Le diaporama, c’est déjà le premier point fort du film, et pas des moindres. En 2025 c’est devenu si rares les décors naturels dans les films de cet acabit.

Boyle et Garland ont eux aussi évolué avec le temps, et cela se ressent dans la mise en scène et l’écriture : plus expérimentales, jouant souvent sur le montage pour évoquer un monde en décomposition et les hallucinations psychologiques des personnages ou juste celle d’un symbolisme illustratif qu’on ne sait pas à quoi relier de prime abord, car ce monde on le redécouvre, on y revient, après une longue absence, où plusieurs vies (surtout qu’elles sont devenues courtes) se sont succédées. Le film flirte parfois avec le mysticisme, ce qui le distingue nettement du ton plus terre-à-terre de ses prédécesseurs. Et en même temps quoi de plus logique face à un nouveau monde installé qui a régressé ? Ce retour du duo d’origine permet donc de retrouver une certaine sophistication narrative et visuelle, qui donne au film une vraie identité, à la fois familière et inédite. L’introduction du village et de ses habitants, confrontés à un monde qu’ils n’ont jamais vraiment quitté, mais qu’ils n’ont plus les moyens de comprendre, comme victimes d’un gigantesque reboot doublé d’un abandon de la part des autres pays qui s’en sont pour certains bien mieux sortis, apporte une richesse émotionnelle et dramatique bienvenues qui font écho à une année 2025 (et celles d’avant) bien morose.

L’autre grande réussite de 28 Ans plus tard réside dans sa capacité à marier l’intimisme de son cadre à l’ampleur et à la brutalité de ses scènes d’action. Très vite, l’intrigue nous confronte à une nouvelle génération d’infectés, évolués durant l’ellipse. Des infectés classiques que nous connaissons déjà aux rampants, jusqu’aux terrifiants Alphas, le film développe un bestiaire concis mais suffisamment varié pour être impressionnant lors des confrontations qui nous mettent instinctivement dans l’appréhension de l’inconnu. Ces créatures redéfinissent la menace et offrent au spectateur plusieurs scènes de tension d’une efficacité redoutable. Parmi elles, impossible d’oublier la séquence SPOILER : où le père et son fils s’enfoncent dans la forêt, tentant de ralentir les infectés à l’arc, dans une scène aussi haletante que millimétrée qui sait jouer avec nos nerfs. Mais la plus impressionnante reste celle SPOILER : de l’Alpha traversant l’eau à toute allure après un long moment d’immobilisme, pourchassant les survivants sans aucune retenue ni obstacle apparent. Grâce à une mise en scène viscérale et inventive, notamment avec l’usage assumé de prises faites à l’iPhone (fait largement médiatisé avant la sortie du film), Boyle démontre qu’il n’a rien perdu de sa fougue et surtout qu’il n’est pas là pour utiliser des gadgets : tous les effets fonctionnent. A noter également les excellents choix musicaux qui habillent le film tout le long.

Là où le film faiblit légèrement, c’est dans la quête plus classique d’un médecin, pivot scénaristique qui relance l’intrigue mais n’atteint que rarement la même intensité que la première moitié. Toutefois, Garland parvient à insuffler dès le début du film des éléments symboliques qui ont le mérite de prendre un vrai sens au fur et à mesure de l’aventure, comme le fameux poème Boots de Rudyard Kipling récité et enregistré en 1915 par le comédien Taylor Holmes, déjà entendu dans la bande-annonce, et ici intégré de manière très marquante dans un montage au ressenti fortement déstabilisant. Côté personnages, presque tout le monde a de quoi s’amuser, Aaron Taylor-Johnson brille, loin de ses rôles éclatés comme Kraven, tandis que le jeune Alfie Williams incarne à merveille l’innocence face à la barbarie théorique devenue pratique. Ralph Fiennes surprend dans un rôle à contre-emploi par rapport à ce qu’on a eu l’habitude de voir dans la saga ; seule Jodie Comer semble un peu en retrait, bien que son personnage apporte une réflexion intéressante sur la maladie et la résilience dans un contexte où le mal qui la ronge n’a rien à voir avec l’infection.

28 Ans plus tard réussit l’exploit de faire renaître une saga que l’on croyait morte, avec un souffle nouveau, une ambition artistique largement incarnée, et plusieurs scènes de survie inoubliables. Si son introduction et son final, volontairement énigmatiques voire complètement what the fuck, mais préparant la suite (intitulée, sauf changement, The Bone Temple), peuvent diviser, le cœur du film est d’une solidité impressionnante. Boyle et Garland livrent là un film différent de ses prédécesseurs, tout en rendant hommage à l’univers qu’ils ont contribué à créer. En réintroduisant une mise en scène surprenante qui ne se repose pas sur ses lauriers, une direction artistique forte et un propos clair au sein d’un genre saturé de produits formatés, 28 Ans plus tard frappe fort et pose les bases d’un nouvel élan pour la franchise. À voir absolument, surtout pour ceux qui pensaient avoir tout vu dans le domaine du film de survie post-apocalyptique. Et après un tel retour, difficile de ne pas craindre l’absence de Boyle à la réalisation du prochain volet. Car ici, c’est bien en grande partie sa patte qui élève le film au-delà du simple divertissement de genre.

Titre Original: 28 YEARS LATER
Réalisé par: Danny Boyle
Casting: Aaron Taylor-Johnson, Jodie Comer, Alfie Williams …
Genre: Epouvante-Horreur, Thriller
Sortie le: 18 Juin 2025
Distribué par: Sony Pictures Releasing France
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