Critique Blu-Ray

LA STRADA (Critique)


SYNOPSIS : Gelsomina, une jeune femme naïve et généreuse, a été vendue par sa mère à Zampano, un être frustre et brutal, qui présente un numéro de briseur de chaînes sur les places publiques. Le duo sillonne les routes d’Italie, menant la rude vie des forains.

La Strada (1954) est véritablement le premier film que l’on puisse qualifier de « fellinien ». L’œuvre de Federico Fellini raconte une fable simple avec des caractéristiques visuelles obsessionnelles qui le définisse et avec lesquelles il reviendra sans cesse dans ses films futurs : des défilés au cirque en passant par une figure suspendue entre terre et ciel, des orphelins et bien sûr le bord de mer. Tel un peintre ayant ses thèmes favoris, Federico Fellini retravaillera ces images jusqu’à la fin de sa vie. Ce film s’inscrit comme un pionner avant les chefs-d’œuvre que sont La Dolce Vita (1960), Huit et demi (1963) ou encore Amarcord (1974).

la strada 1954 Real : Federico Fellini Giulietta Masina Collection Christophel

Se déroulant dans l’Italie d’après-guerre, La Strada raconte une des histoires des plus connues du cinéma, celle d’un homme brutal et fort nommé Zampanò (Anthony Quinn) qui parcoure l’Italie, vivant dans une caravane délabrée tirée par une moto. Il a besoin d’une assistante pour lui servir de compagne et d’acolyte pour son spectacle. Il achète à une veuve pauvre du bord de mer, sa fille Gelsomina (Giulietta Masina). La volonté de Gelsomina d’accepter le compromis de sa mère et de Zampanò sert à montrer au spectateur à quel point la vie était désespérée et dictée par la nécessité pour de nombreuses personnes dans l’Europe d’après-guerre. Zampanò se montre cruel envers la jeune femme, mais elle possède une innocence chaplinesque qui la protège des pires aléas de la vie. Se déplaçant de ville en ville, elle interprète des introductions musicales tout en supportant ses mauvais traitements. Cherchant à échapper à sa vie d’artiste itinérant, Gelsomina est frappée de stupeur par le Fou (Richard Basehart), un funambule qui travaille au-dessus des rues de la ville et dont la légèreté et la gentillesse contrastent avec l’amertume et la violence de Zampanò. Le Fou est attiré par Gelsomina, mais constate qu’elle a tissé un lien fort avec l’homme fort, c’est alors que la jalousie et la rage de Zampanò reprennent de plus belle…

la strada 1954 Real : Federico Fellini Giulietta Masina Anthony Quinn Collection Christophel

La Strada est un film magnifique et mélodramatique qui met en scène les épreuves de gens ordinaires au lendemain d’une Italie ravagée par la guerre. Sa teneur émotionnelle puise ses racines dans la souffrance de ceux qui sont ignorés, alors même qu’ils sont ceux qui peuvent offrir la rédemption. Gelsomina n’est pas une simple victime. Son insistance sur son rôle d’artiste est une façon pour elle de revendiquer une certaine influence sur le monde. Ces éléments sociaux contribuent certainement à la grandeur du film mais ce qui en fait une oeuvre marquante c’est avant tout les deux interprétations d’Anthony Quinn et de Giulietta Masina. Lui, véritable pilier hollywoodien à ce stade de sa carrière, se rend en Italie pour tenter une expérience différente en incarnant Zampanò, un homme brutal et autodestructeur. Il démontre une capacité à s’appuyer fortement sur sa performance physique pour donner à son personnage l’impression d’être plus qu’une simple brute, mais plutôt un homme brutal qui craint de perdre sa liberté. Il arrive à nous montrer cela, sans véritable dialogue percutant mais simplement par son regard et son langage corporel. Son incontestable tragédie est qu’il aime Gelsomina sans le savoir, c’est le drame central de nombreux personnages de Fellini. Et c’est bien elle, le point central du film, une femme naïve qui doit garder son sang-froid face à la brutalité du monde. Bien que vendue comme servante, elle se définit comme une artiste, manifestant un amour et un talent pour la musique.

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Dans le monde brutal du film, le rire semble davantage une affirmation de l’humanité. Le plus proche de la comparaison est le personnage de Charlot de Chaplin : Gelsomina et Charlot sont des personnages à la fois naïfs et au cœur joyeux au sein d’un monde brutal et changeant. Le regard et le sourire de Giulietta Masina, son expressivité et sa capacité à exprimer clairement ses émotions contribuent grandement à la communication de son personnage. Elle parvient à être à la fois drôle et triste, d’une manière si rare chez le clown triste. Elle interprète parfaitement ce rôle en exprimant à la fois l’émerveillement enfantin et le désespoir déchirant. Et on peut même dire qu’elle n’en ressortira pas vraiment, puisqu’elle interprète des rôles similaires dans Juliette des esprits, Ginger et Fred. Lauréat du tout premier Oscar du meilleur film en langue étrangère, La strada possède la pureté et la résonance intemporelle d’une fable. La musique de Nino Rota fusionne avec celle du cirque et les sons tristement lyriques des accordéons et des trompettes solitaires. Cette œuvre demeure comme l’une des visions les plus touchantes du cinéma sur l’humanité luttant pour survivre face aux cruautés de la vie.

Détail des suppléments :

Titre Original: LA STRADA

Réalisé par: Federico Fellini

Casting : Giulietta Masina, Anthony Quinn, Richard Basehart …

Genre: Drame

Sortie le : 11 mars 1955

Sortie en DVD et Blu-Ray le 6 mai 2025 chez Rimini Editions

5 STARS CHEF D'OEUVRECHEF-D’ŒUVRE

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