SYNOPSIS : Dans la campagne française, une femme se bat contre ses propres démons.

Grande habituée du Festival de Cannes avec 8 sélections, la réalisatrice de Die, My Love Lynne Ramsay fait son retour en compétition plusieurs années après avoir remporté le Prix du Scénario pour A Beautiful Day en 2017. Elle réunit un casting totalement star avec Jennifer Lawrence et Robert Pattinson !! Die, My Love est une adaptation du roman Crève, mon amour d’Ariana Harwicz, publié en 2019 au sujet d’une jeune mère qui développe une dépression post-partum et se retrouve comme figée dans une psychose totalement destructrice. Le résultat est largement à la hauteur, car Die, My love, c’est fou et c’est bon ! Ça envoie et on en prend plutôt plein la tronche, à l’image de celle que Grace va projeter contre le miroir. Celui de sa folie et de celle qui ne se supporte plus. Die, My love, c’est du romantisme désespéré. C’est l’insupportable acceptation de cette foutue normalité qui va pousser Grace dans les abysses. C’est violent de voir ainsi l’amour flirter avec l’alinéation et ce risque de la perte à tout moment. Car tout le temps, on a peur pour eux, et plus particulièrement pour Grace et le bébé, tant elle n’a plus de filtre et semble capable de n’importe quoi. Son regard à un moment dans la voiture est glaçant et ferait jusqu’à flipper la petite Regan dans l’Exorciste (1973).

Evidemment, on sera d’autant plus touchés qu’on aura vu avant le basculement, le couple s’aimer follement, faire n’importe quoi ensemble et se laisser bercer par la douce musique des amours insouciantes. Notre lancinante empathie sera à son apogée pile au moment où Grace va commencer à déraper sévère ! Talent de mise en scène ! Et en face, la mollesse masculine est sidérante. Très certainement que Jackson est sidéré lui-même, mais à part lui dire timidement et sans convictions :  » Je vais faire des efforts « , pépère il bouge pas vraiment l’orteil de sa pantoufle. Car cette dépression de sa femme, c’est aussi la privation qu’elle pressent d’une forme de liberté. Devenue elle-même mère, elle n’est pas l’enfant de la sienne, qui elle-même a bien dû lui refiler ses angoisses de mort, comme tout bon parent qui se respecte. Elle devient celle qui va se livrer inconditionnellement dans un amour violent et inconnu pour cet être difforme qui crie, pleure, vomit et fait dans sa couche ! Et en face, y’a l’insidieuse insinuation qu’elle va devoir s’effacer pour n’être plus que ça. Et monsieur en face : « je vais faire des efforts« . A devenir fous qu’on vous dit !

Pour filmer cette déliquescence du quotidien, et cette folie trop ordinaire, la cinéaste y met les moyens, en nous offrant de la somptuosité dans la photographie, mais aussi de l’explosivité autant de couleurs que de sons, car quand Grâce hurle sa folie, on en prend plein les oreilles et c’est normal !! Une folie quasi immersive. Le film donne l’impression parfois de tenir sur un fil, presque comme une instabilité. Tout simplement car la caméra est à hauteur de son héroïne. Et sans que Die, my love soit malaisant, il perturbe juste ce qu’il faut. Au casting, Jennifer Lawrence dans le rôle de Grace est tout simplement magistrale. Elle s’est emparée de codes de cette dépression avec une rage folle. Elle est sublime tout le temps, et si le film était raté ce qui n’est pas le cas, on l’aimerait quand même rien que pour elle. Oui, c’est un rôle sur mesure, mais on a déjà vu des croutes en la matière. Ici, elle est dérangeante à souhait, et complétement habitée par son personnage. Elle est rock, pop, et glamour à souhait tout en étant parfois à ramasser à la petite cuillère, toute débrayée et en sang. C’est une immense interprétation, largement palmable à Cannes, ce que nous ne savons pas à la rédaction de ces quelques lignes. Une prestation complètement dingue et follement incandescente.

Face à elle, dans le registre opposé, et confiné dans une insupportable placidité et lenteur, Robert Pattinson joue très bien le mec mou qui ne sait pas comment faire ou qui fait mal. Si Jennifer Lawrence réussit un tel numéro, il n’y est pas pour rien tant la complémentarité fonctionne. On adore détester son personnage, ce qui est gage là aussi d’une très belle interprétation. Au final, Die, My love est un bonbon qui pique fort et vient aussi dire quelque chose sur ce qui se joue dans les couples, plus précisément à la naissance du premier et ce refus de l’assignation est un message fort, servi par un très bon film de cinéma, donc c’est parfait !!

Titre Original: DIE, MY LOVE

Réalisé par : Lynne Ramsay