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SYNOPSIS : 1983, François Mitterrand décide de lancer un concours d’architecture international pour le projet phare de sa présidence : la Grande Arche de la Défense, dans l’axe du Louvre et de l’Arc de Triomphe ! A la surprise générale, Otto von Spreckelsen, architecte danois, remporte le concours. Du jour au lendemain, cet homme de 53 ans, inconnu en France, débarque à Paris où il est propulsé à la tête de ce chantier pharaonique. Et si l’architecte entend bâtir la Grande Arche telle qu’il l’a imaginée, ses idées vont très vite se heurter à la complexité du réel et aux aléas de la politique.
Cinquième long métrage de Stéphane Demoustier après avoir nous avoir déjà bien transporté avec La Fille au bracelet (2020) et Borgo (2024), L’Inconnu de la Grande Arche retrace le tragique destin de l’architecte danois Johann Otto von Spreckelsen (1929-1987), lauréat surprise du concours initié par François Mitterrand. Un film qui s’inspire du livre de Laurence Cossé, La grande arche, publié en 2016.
On connaît la finesse du filmage de Stéphane Demoustier, accompagné qui plus est par un casting très alléchant avec le danois Claes Bang, révélé par Ruben Östlund dans The Square, palme d’or en 2017. On retrouvera également l’indispensable Swann Arlaud, Xavier Dolan et Sidse Babett Knudsen, inoubliable dans la série Borgen. A l’écran, pas de doute, on est chez Demoustier, tant on reconnaît ses qualités de grand filmeur de la complexité des hommes, de leurs failles. Ici, avec Von Spreckelsen, on va le voir presque sombrer progressivement dans une forme de folie, face aux contradictoires et frustrants arbitrages politiques, et leur lot de crasses inconstances. Taper à côté est comme érigé en art ! Le film décrit avec minutie l’opposition entre une forme d’intransigeance légitime de l’architecte artiste et le mur administratif, politique et financier à la Française. Comme une rencontre qui de toute façon ne peut pas se faire.

« Le cube, c’est l’œuvre de ma vie » répète à souhait et même hurle Von Spreckelsen à propos de la grande arche. C’est même en fait toute sa vie. Avec donc le risque de la perte. L’inconnu de la grande arche, c’est aussi cet hommage que rend le cinéaste à la créativité puis à la détermination d’un homme. Derrière les grandes œuvres, des petits hommes. Ici, Von Spreckelsen paraît comme nonchalant et radical dans sa démarche, ses propos, ses idées. Sa relation avec Mitterrand est aussi très singulière où c’est finalement la rencontre de deux hautes aspirations intellectuelles, avant que le capitalisme de la cohabitation de 1986 vienne geler le projet. C’est une certaine idée du romantisme qui vient se heurter à un pragmatisme d’état, encore très vivace et ravageur aujourd’hui. C’est aussi un film très physique, il y a cette raideur de l’architecte, qui est comme un grand échalas, face à la constante nervosité de Subilon, technocrate auprès de Mitterrand. L’un est immense, puissant, presque interminable quand l’autre est plus petit et toujours à la recherche du meilleur des compromis. Vient s’ajouter Paul Andreu, l’autre architecte qui s’adaptera aussi aux exigences politiques. Et dans cette histoire d’hommes, on sent pourtant que Subilon et Andreu admirent sincèrement ce grand viking qui ne lâche jamais rien. L’inconnu de la grande arche, c’est aussi ce film sur le renoncement, avec les curseurs de chacun, ses limites, ses impossibles.

Dans sa mise en scène, le film a comme une exigence, il n’est sciemment pas flamboyant, y compris car il se met au service de son personnage principal. C’est aussi car cette histoire est finalement peu reluisante, nous parlant celle des ambitions contrariées. Le casting est aussi impressionnant à l’écran qu’il était prometteur sur le papier. Claes Bang dans le rôle de Von Sperckelsen, on l’a dit avec cette apparente mollesse dans sa démarche semble pourtant dominer tous les autres. Il impose son physique autant qu’il souhaiterait le faire pour ses idées. Cet acteur, c’est un corps, c’est une gueule. Il prend la lumière et vient apporter toute la puissance dramatique et tragique tant il a beau être habité, et se confrontera quand même à l’infranchissable. La force ne suffira pas, et c’est presque bouleversant en cet endroit. L’acteur incarne cette mort lente des illusions, mais pas sans lutter, et ce, dans un combat onirique. Sidse Babett Knudsen n’a pas le rôle le plus facile, tant cette histoire des années 80 est une affaire de messieurs. Pour autant, elle incarne avec la justesse qu’on lui sait l’ancrage avec le réel pour Von Sperckelsen. Sobre mais diablement efficace Sidse Babett !! Xavier Dolan est parfait pour le rôle de Subilon. Toujours débordé, pressé et inquiet. Il est coincé entre la commande politique et son admiration pour le grand danois. Là où Dolan fait très fort, c’est que par les subtilités de son jeu, il semble incarner à lui seul toutes les impossibilités françaises administratives et politiques. Lourde responsabilité pleinement assumée. Il y a enfin le délicieux Swann Arlaud dans le rôle de Paul Andreu, qui est comme à mi-chemin entre pragmatisme et artiste. Lui aussi admire profondément et sincèrement son homologue, mais va se conformer davantage. L’acteur est juste génial pour jouer cette variation de la mesure, de la nuance, tout en laissant passer l’émotion. Toujours aussi juste et impressionnant. Au final, L’inconnu de la grande arche, contrairement à son sujet est très abouti, et nous parle avec une immense subtilité du renoncement, et de la tristesse des ambitions inassouvies. On passe un moment réflexif, jamais ennuyeux et c’est aussi ça le cinéma !
Titre Original: L’INCONNU DE LA GRANDE ARCHE
Réalisé par: Stéphane Demoustier
Casting : Claes Bang, Sidse Babett Knudsen, Michel Fau …
Genre: Drame
Sortie le: Prochainement
Distribué par: Le Pacte
TRÈS BIEN
Catégories :Critiques Cinéma









































































































































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