Critiques Cinéma

L’OMBRE D’EMILY 2 (Critique)


SYNOPSIS : Stephanie Smothers et Emily Nelson se retrouvent sur la magnifique île de Capri, en Italie, pour le mariage extravagant d’Emily avec un riche homme d’affaires italien. En plus des invités glamours, meurtres et trahisons s’invitent dans ce mariage riche en rebondissements.

Sorti sur Prime Video ce jeudi 1er mai, L’Ombre d’Emily 2 arrive avec la lourde tâche de succéder à un premier volet qui avait eu son succès d’estime auprès du public, mais qui n’appelait pourtant pas vraiment de suite. Le premier film, qui se concluait sur la condamnation et l’incarcération d’Emily à vingt ans (bien mérités) de prison, semblait apporter une fin naturelle à ce thriller à l’intrigue tarabiscotée et aux personnages troubles, d’autant plus qu’un épilogue écrit achevait de révéler le destin à court terme des personnages. La page semblait tournée. Pourtant voilà que la franchise réussit à se renouveler en transformant le premier film en un concept à part entière qu’elle développe ici tout en laissant entrevoir une possible suite à venir. Le film parvient ainsi à faire vivre son univers d’une manière aussi inattendue qu’ambitieuse, tout en restant fidèle aux excès et à l’ambiguïté du premier volet. Pourtant, l’arrivée de cette suite sur une plateforme ne nous laissait que très peu confiants.

L’une des grandes réussites de L’Ombre d’Emily 2 réside dans sa capacité à tordre l’intrigue du premier film pour justifier le retour d’Emily, qui avait pourtant été condamnée à une longue peine de prison. Nous ne disons pas cela dans le sens où ce retour est crédible puisque le film ne s’embarrasse aucunement de détails pour justifier la libération d’Emily, qui n’est pas crédible pour un sou, mais plutôt dans le sens où cette suite arrive à nous la faire avaler sans broncher en asseyant une bonne fois pour toute que l’univers n’a pas vocation à être réaliste. Le spectateur pourrait donc s’attendre à ce que cette suite parte d’une base fragile, mais les scénaristes parviennent à manipuler cet aspect de manière ingénieuse. En réintroduisant Emily grâce à un jeu de pseudo failles juridiques et de mystères non résolus autour de l’affaire, le film parvient à rendre très vaguement plausible son retour (elle avait quand même été vue en train d’essayer de tuer les personnages en plein live sur internet…). Cette marque de fabrique semble vouloir générer l’idée d’un véritable tour de force qui, bien que rarement crédible, sert l’objectif de l’intrigue : maintenir une tension permanente et surprendre le spectateur. Ce deuxième film nous plonge donc à nouveau dans un tourbillon de manipulations, de pouvoir et de faux-semblants, surtout que cette fois il y a bien plus de personnages, et notamment une bande de mafieux. Emily, toujours interprétée par Blake Lively, garde cette aura de mystère et de danger qui fait sa force, la nouvelle configuration de l’intrigue permettant d’explorer davantage sa psychologie complexe, bien qu’on reste un peu sur notre faim là-dessus ; elle était plus intrigante dans le premier volet. Ce n’est toutefois pas seulement une reprise de l’histoire, mais bien une évolution du personnage, qui semble avoir gagné en profondeur et en ambition de vie.

Loin de se contenter de répéter la formule du volet originel, L’Ombre d’Emily 2 décide d’élargir son univers et d’en faire comme nous le disions, une franchise à part entière. L’histoire prend une nouvelle direction tout en s’appuyant sur la base de manipulation psychologique et de suspense qui avait fait le succès du premier film. Ce changement de cap transforme l’intrigue en un concept que le film semble vouloir exploiter sur plusieurs volets. Ce n’est pas seulement une suite, mais une extension de cet univers, avec des ramifications qui vont au-delà du simple jeu de dupes entre Emily et ses proches. Pourtant, cet aspect de la saga présente également ses limites. Le film, comme le premier, n’hésite pas à tirer sur les grosses ficelles pour faire avancer son récit. Des rebondissements qui frôlent parfois l’absurde, mais qui, paradoxalement, sont intégrés au concept global du film. L’Ombre d’Emily 2 fait de ces excès une force, une marque de fabrique qui contribue à l’identité de la franchise. En d’autres termes, l’histoire est volontairement excessive dans ses incohérences et ses twists improbables, et c’est ce qui lui permet de garder son ton unique et de ne jamais se prendre trop au sérieux. Côté décors l’histoire se délocalise à Capri, ce qui amène un peu de dépaysement, quant à l’ambiance musicale elle nous a moins marqués que celle du précédent volet où beaucoup de morceaux français étaient à l’honneur.

L’un des changements les plus évidents entre le premier et le deuxième volet est l’évolution du contexte sociétal. Tandis que le premier film semblait ancré dans une époque plus intemporelle, L’Ombre d’Emily 2 prend nettement les traces de 2025. Les réseaux sociaux sont davantage présents, et leur influence sur la narration et sur les personnages, notamment celui d’Anna Kendrick (toujours aussi excellente) est palpable. Cet ancrage dans le présent donne lieu à une galerie de personnages secondaires souvent plus caricaturaux et superficiels que dans le premier film qui ne brillait déjà pas par sa subtilité en la matière. Si certains d’entre eux ajoutent une dimension humoristique ou une critique subtile de notre époque obsédée par l’image, d’autres semblent plus proches de stéréotypes qu’on attendrait dans une série estampillée Netflix. Cela reflète un léger changement de ton par rapport au premier volet, où les personnages, bien que mystérieux, avaient une certaine profondeur. Ici, la superficialité de certains personnages semble délibérée, et bien qu’elle puisse déranger par moments, elle est une réponse directe, consciente ou inconsciente, aux standards actuels.


Du côté du casting, L’Ombre d’Emily 2 reste fidèle à ses personnages principaux, avec Blake Lively qui reprend son rôle d’Emily avec brio. Son charisme et sa capacité à manipuler ses interlocuteurs restent des atouts majeurs du film. Quant à Anne Kendrick elle est toujours aussi pétillante et dynamique et confirme qu’elle est le contrepouvoir idéal face à la folie ambiante. Quasiment tout le casting du premier film revient, achevant cette idée de continuité et de prolongement. Ce deuxième volet voit également l’arrivée de quelques nouveaux personnages, comme Vicky, l’éditrice d’Emily interprétée par Alex Newell, une figure accessoire dans l’intrigue, avec une utilité assez limitée et qui ne fait que renforcer les aspects caricaturaux de l’histoire que nous abordions plus haut. Le film souffre aussi d’un changement regrettable dans le casting : Elizabeth Perkins reprend le rôle de Margaret McLanden qui était initialement incarnée par Jean Smart. Si Perkins livre une prestation correcte et que le personnage n’était que peu présent par le passé, difficile de faire une croix sur Jean Smart qui crève l’écran dans chacun de ses rôles et qui aurait contribué à rendre le personnage plus marquant.

En dépit de ses défauts, L’Ombre d’Emily 2 est donc une suite qui semble savoir exactement ce qu’elle veut être. On craignait de la voir sombrer avec ce nouveau volet dans la vague commerciale du whodunit, surtout au vu du nombre de personnages, mais il n’en est rien. L’histoire est parfois improbable, mais c’est un choix assumé. Le renouvellement des rapports entre les personnages est un véritable point fort, et contribue à donner au film une certaine fraîcheur tout en restant fidèle aux éléments qui ont fait le succès du premier volet. Il est indéniable que certains aspects de l’intrigue restent tirés par les cheveux, et les excès, tant dans le côté guignolesque des personnages que dans certains rebondissements volontairement improbables, peuvent déstabiliser. Toutefois, ces choix font partie intégrante de l’ADN de la franchise. Si l’on accepte cette approche débridée, avec ses gimmicks et ses manipulations exagérées, L’Ombre d’Emily 2 s’affirme comme une suite étonnamment réussie dans son genre. Elle transforme ces excès en une marque de fabrique, un élément clé pour bâtir une véritable franchise autour de son concept singulier.

Titre Original: ANOTHER SIMPLE FAVOR

Réalisé par: Paul Feig

Casting : Anna Kendrick, Blake Lively, Henry Golding …

Genre: Comédie, Thriller

Sortie le : 1er mai 2025

Distribué par: Prime Video

BIEN

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