Critiques Cinéma

OXANA (Critique)

SYNOPSIS : Ukraine, 2008. La jeune Oxana et son groupe d’amies multiplient les actions, slogans peints sur le corps et couronnes de fleurs dans les cheveux, contre un gouvernement arbitraire et corrompu. C’est la naissance d’un des mouvements les plus importants du XXIe siècle : FEMEN. Réfugiée politique, artiste, activiste, Oxana franchira les frontières et militera sans relâche pour les droits des femmes et la liberté, jusqu’à risquer sa propre vie.

C’est le deuxième long-métrage de la réalisatrice Charlène Favier, révélée en 2020 par son premier, Slalom, exploration d’une emprise et d’un mécanisme d’abus sexuels menée par un fantastique duo Jérémie Rénier/Noée Abita et « présenté » au fameux Festival de Cannes annulé pour cause de pandémie mondiale. Oxana trace un début de ligne pour la filmographie de sa metteuse en scène, plongeant à nouveau dans les méandres du réel, cette fois-ci dans un récit biographique plein de symbolique.


Le film raconte l’histoire d’Oksana Chatchko, étudiante ukrainienne devenue figure féministe militante, l’une des fondatrices originelles du mouvement Femen. En replongeant aux origines pour explorer la vie tortueuse et tragique de la jeune femme, Charlène Favier plante une nouvelle pièce particulièrement fascinante dans sa toute prometteuse filmographie. Au centre de l’image, il y a Oxana/Oksana. La jeune femme est née le 31 janvier 1987 à Khmelnytskyï et prend goût à l’art en dessinant pendant toute son enfance des icônes religieuses pour les Églises du coin. A l’adolescence, son besoin d’émancipation et sa révolte personnelle qui gronde vont l’amener à créer avec des amies les prémices du mouvement Femen (contraction de « femme » et « homme » dans une langue universelle). Leurs actions vont faire naître de nombreux organismes Femen à l’international, puis – lorsque Oxana sera personnellement menacée par les gouvernements qu’elle combat – la jeune femme émigrera vers la France, où une autre branche Femen, loin de ses idéaux, devient de plus en plus importante. Dans le film de Charlène Favier, c’est la comédienne ukrainienne Albina Korzh qui lui prête ses traits, dans une performance sensationnelle, un mélange magnifique de vulnérabilité, d’incandescence et de désillusions, un parcours entrecoupé par une narration fragmentée, un montage en flashbacks qui raconte cette histoire dans le désordre pour mieux capter les différentes facettes de sa protagoniste.

Cette Oxana est une combattante, mais aussi une jeune femme idéaliste, une enfant de la religion orthodoxe qui finira par se rebeller contre elle par symboles lorsqu’elle ne lui apportera plus les réponses dont elle a besoin. 2013, Paris, Oxana est une artiste peintre et s’apprête à présenter un vernissage de ses nouveaux tableaux : des icônes orthodoxe – les mêmes qu’elle peignait étant enfant – au détail près que celles-ci sont blasphématoires. Violentes, sexuelles et révoltées, ces icônes représentent le parcours d’une femme aussi forte que fragile, un personnage fascinant qui prend racine dans le réel pour se voir scanner par la mise en scène brillamment symbolique de Charlène Favier. La réalisatrice fait décoller son style, notamment grâce à la photographie sublime d’Eric Dumont et la musique de Delphine Malaussena, en habillant son film d’un onirisme délicat qui emballe le parcours de son héroïne. L’assemblage de son casting lui permet également de faire briller son long-métrage derrière la performance impeccable de Korzh, avec les présences excellentes de Lada Korovai, Oksana Zhdanova, Maryna Koshkina et Noée Abita (que Favier retrouve après Slalom dans la peau de l’artiste Apolonia Sokol).


Plutôt que d’être un énième biopic qui surfe gentiment sur le récit du personnage qu’il adapte, Oxana est une peinture intelligente d’une jeune femme filmée comme une de ses icônes. De son enfance chargée à ses années révolutionnaires, de sa fuite des dictatures à son destin tragique, Oxana se fait témoin d’une histoire qui se montre beaucoup plus intime que politique (bien que sa portée militante s’est vue rattrapée par l’actualité brûlante), un hommage particulièrement juste à une figure majeure du féminisme moderne, une femme dans l’ère du temps qui se sera heurtée au monde en tentant de faire parler son art face à la violence.

Titre Original: OXANA

Réalisé par: Charlène Favier

Casting :  Albina Korzh, Maryna Koshkina, Lada Korovai…

Genre: Biopic, drame

Sortie le: 16 avril 2025

Distribué par: Diaphana Distribution

EXCELLENT

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