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SYNOPSIS : Le quotidien de Douglas, présentateur respecté du journal des informations et de sa coprésentatrice, Madeline, qui est plus maligne et plus avisée que lui.
Steven Moffat, le scénariste et créateur de Douglas is Cancelled, adoré et multirécompensé outre-Manche pour son travail, notamment sur les séries Doctor Who (2005/2022) et Sherlock (2010/2017), connaît l’art des intrigues explosives, qui semblent partir dans tous les sens, mais toujours avec une solide et féroce cohérence. C’est clairement le point commun avec Douglas is cancelled, tant ce qui ressemble au départ à une série agréable presque pantouflarde, sciemment à l’image du pépère Douglas, monte en puissance jusqu’à un épilogue complètement délirant et inoubliable.

Douglas is Cancelled mijotait initialement dans l’esprit du scénariste sous la forme d’une pièce de théâtre dès 2017. Le scénariste nous amène sur une satire assez jubilatoire, mais presque conventionnelle de la « cancel culture » qu’il fait dériver vers une implacable mais très méthodique, réfléchie et glaciale vengeance. On pense à une grande farce très efficace sur l’usage abusif des réseaux sociaux mais le déroulé progressif des épisodes vient apporter une toute autre dimension à une série qui va se révéler dans son dénouement addictive et fascinante. En effet, les deux premiers épisodes sont plutôt très funs et déjà bien mordants, car on sait que Douglas, un tantinet aviné à un mariage a osé une blague sexiste, et il semble complètement dépassé par les progressives proportions que prennent l’affaire sur la toile. Comme une réalité parallèle avec une mise à mort façon lapidation en place publique. Sauf qu’à ce moment-là, on ne sait pas de quelle mauvaise vanne il s’agit. Et c’est bien en cet endroit que cette première partie de la série est captivante. Car si Douglas incarne l’atypisme du mal blanc dominant dans sa mollesse intellectuelle bien embourgeoisé, se dresse face à lui un déchainement aveugle et parfois même fascisant alors qu’on ne sait pas encore quel est le degré de sa mauvaise blague. Tout le monde y prend pour son grade pour notre plus grand plaisir, et chacun dans sa stéréotypie et sa myopie sur sa propre caricature.

Puis, la série part complètement en sucette sur l’avant dernier et troisième épisode. On n’en dira évidemment jamais trop, mais ce troisième acte est le témoin du pire de l’horreur de la violence ordinaire masculine qui sadiquement jouissent de leur pouvoir. C’est sans concession et avec un terrible réalisme que se déploie le mal et mâle libidineux pervers qui dégouline abominablement de domination misogyne. C’est violent mais finalement indispensable, tant le frisson qui nous parcourt est inspiré par la fétide réalité de la situation. La répartie de Madeline y est pourtant fabuleuse. Le dernier épisode est quant à lui un total modèle jouissif de rebondissements et autres faux semblants. On est tout chamboulés, c’est drôlement bon et on n’a pas envie que ça s’arrête. Sceau ultime de la réussite sérielle. Vengeance et manipulations dans tous ses états, la fin qui justifie les moyens avec des joutes oratoires jubilatoires. Les dialogues sont vifs, à couper au couteau et chaque réplique est une balle de magnum 357. Dialogue entre la femme de Douglas et Madeline :
– « Vous baisez avec mon mari ?
– Non et vous ? «
Ou encore : « On va pas te remettre une médaille parce que t’es pas un connard. »

Au casting, Karen Gillan toute à son implacable vengeance est glaçante, flippante et joyeusement manipulatrice. Elle habite son personnage avec une foi inébranlable. Une performance de haut vol, où elle porte en elle le secret d’une série détonante, on veut la voir sur les tous les plans. Hugh Bonneville (Downtown Abbey, Paddington…), considéré outre-manche comme un véritable « trésor national » façon joyau de la couronne est parfait en star cathodique traquée, menacée et potentiellement piégée. Il est parfait car il porte cette médiocrité ordinaire assez insupportable mais que l’on ne sait pas non plus pleinement détester. Douglas is cancelled est un vrai kiff, avec trois premiers épisodes qui sont là pour amener au gros lâchage de l’épilogue, que l’on pourrait regarder en boucle frôlant l’orgasme sériel. Il faut se ruer sur cette pépite so british qui fait du bien, mais du bien…
Crédits : Arte








































































































































