TOUTES POUR UNE (Critique)

Par William François le janvier 21, 2025 • ( Poster un commentaire )

SYNOPSIS : Quand Sara, jeune fille en fuite, découvre que les Trois Mousquetaires qui protègent la Reine de France sont en réalité des femmes, elle décide de partir avec elles et de suivre leur exemple : se transformer pour être libre, se transformer pour être soi…

Les écrits de Dumas ont le vent en poupe pour sûr. Après l’adaptation du Comte de Monte-Cristo par Alexandre de la Pattelière et Matthieu Delaporte et celle en deux volumes des Trois Mousquetaires mise en boîte par Martin Bourboulon, c’est à la réalisatrice Houda Benyamina (révélée par Divines, auréolé du César du Meilleur Premier Film) de s’approprier l’histoire des mousquetaires les plus célèbres de France et de Navarre pour en inventer sa propre version. Toutes pour Une suit le récit de Sara, une jeune morisque qui croise un jour la route des célèbres Trois Mousquetaires du Roi, alors sur une mission qui pourrait définir l’avenir de la couronne de France : la Reine est repartie chez elle, en Espagne, et les mousquetaires sont chargés de la ramener à Paris. Mais Sara découvre vite le pot-aux-roses : Athos, Aramitz et Portau sont en réalité des femmes se faisant passer pour des hommes ! Ni une ni deux, les femmes adoptent Sara, la rebaptisent D’Artagnan et embarquent dans une périlleuse mission pour sauver la France…

Avec son film, Houda Benyamina met le pied dans le récit de cape et d’épée pour revisiter très librement les écrits de Dumas, en commençant par une actualisation radicale dans le traitement de sa mise en scène. Les séquences d’action sont ainsi rythmées par des chansons modernes pour dynamiser l’ensemble – et si dans l’idée ça peut vraiment marcher, on pense au western The Harder they Fall de Jaymes Samuel qui faisait s’entretuer des cow-boys sur fond de Jay-Z, ici l’équilibre ne fonctionne jamais vraiment, donnant plus l’impression que la bande-son du film a été collée pendant le montage.

Globalement, tout le long-métrage se trouve heurté par ce même défaut : si quelques idées fonctionnent sur le papier, l’exécution plus que moyenne l’empêche constamment de se développer et d’aller plus loin qu’un simple parti pris. Il en est de même pour le concept de base du film, à savoir le switch de genre des mousquetaires – le propos n’étant jamais suffisamment étayé pour justifier le film. Houda Benyamina, avec ses deux co-scénaristes Fabien Suarez et Juliette Salles, se retrouve coincée entre deux visions différentes : d’un côté une comédie d’aventure populaire, et de l’autre une satire engagée sur l’émancipation. Ces deux facettes ne trouvent jamais vraiment d’équilibre stable, notamment à cause d’un manque d’amplitude scénaristique (le scénario reste en ligne droite et, à l’exception de D’Artagnan et d’Athos, les personnages souffrent de grosses lacunes narratives qui empêchent la charge émotionnelle de vraiment prendre) et d’une mise en scène trop peu inspirée.

On reste tout de même séduit par la proposition d’un casting qui semble s’éclater, à commencer par les excellentes Oulaya Amamra, Sabrina Ouazani et Déborah Lukumuena (c’est surtout elle qui envoie la majorité des punchs comiques du film). Daphné Patakia, elle, s’empare de son rôle avec beaucoup de talent, c’est elle qui est la plus convaincante en mousquetaire et en leadeuse de chaque instant. Mais malgré leurs belles forces de proposition, Toutes pour Une a bien du mal à élever son récit, notamment à cause d’un manque global de panache dans la mise en scène et d’une écriture cruellement sous-développée qui ne semble jamais vraiment savoir ce qu’elle compte thématiquement faire de ses personnages tout en abordant sans grand succès son registre « cape et épée » On aurait pu en attendre plus, mais Toutes pour Une s’avère être une comédie malheureusement moyenne et rarement intéressante où l’on trouve la plus belle éclaircie dans le potentiel non exploré d’un très joli casting qui méritait sans doute mieux.