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FAMILIES LIKE OURS (Critique Saison 1) Des moments de bravoures intellectuels mais une série énervante …

SYNOPSIS : C’est un été en apparence ordinaire au Danemark, quand une décision politique fait tout basculer : pour éviter une catastrophe naturelle irréversible, le pays doit être évacué avant d’être entièrement inondé. Le peuple danois se disperse et laisse derrière lui maisons, écoles et rues désertes. Alors que familles et amis sont séparés, en un instant, plus rien n’a de valeur, les destins changent et la chance sourit seulement à quelques exilés. Laura, une lycéenne bientôt bachelière, va voir sa vie changer pour toujours.

Families Like Ours, qui arrive tout juste sur Canal+, est une série aux multiples nationalités qui jouit d’un synopsis particulièrement ambitieux et alléchant : dans un futur plus ou moins proche, face à la montée des eaux et à l’endettement créé par les importants investissements dans des digues, le Danemark décide de fermer son pays et de relocaliser tous ses habitants dans des pays voisins. La catastrophe naturelle étant imminente, le pays préfère ainsi anticiper avant des drames humains (le cynisme étant, comme pour le Covid, que l’idée d’empêcher des drames va en créer tout de même plein d’autres). Désormais, le Danemark ne sera plus qu’une gigantesque friche pourvu d’éoliennes. Le postulat tient ses promesses dans la mesure où les deux ou trois premiers épisodes font presque un sans-faute et étaient bien partis pour nous convaincre de donner quatre jolis beaux points à la série. Malheureusement le show part petit à petit en vrille en nous présentant des péripéties rarement guidées par le bon sens, nous amenant alors à déplorer la façon dont une poignée de personnages torpillent leurs avenirs et en même temps ceux de tous les autres, jusqu’à nous demander : tout ça pour ça ?



A l’instar du Covid pour nos récentes générations (c’est d’ailleurs ce qui tend à nous immerger immédiatement dans le contexte), la fermeture du Danemark s’abat sur les personnages presque du jour au lendemain. Certains, de par leurs postes ou connaissances haut placées le savent toutefois un peu avant les autres ce qui permet d’aborder différents points de vue. Ceux qui savent et qui vont vendre, ou essayer de vendre, leurs biens immobiliers avant que le pays ne ferme et ne les laissent ruinés, et ceux qui doivent entrer dans le système où une relocalisation conditionnée à certains critères de ressources, de diplômes etc. leur est promise, avec à la clé une destination plus ou moins glamour : grosso modo les « loosers » direction Bucarest et les autres ailleurs. Parmi les personnages que nous suivons, tous sont liés les uns aux autres par des liens familiaux ou amicaux, permettant de fait même s’ils sont souvent géographiquement éloignés, des interactions qui tirent chacun vers le haut ou le bas. Comme nous le disions les deux ou trois premiers épisodes sont passionnants puisqu’ils montrent, sur plusieurs mois, l’avant fermeture du pays, les diverses magouilles pour tenter de préparer son avenir avant l’expulsion, l’évacuation du Danemark et le début de l’après. C’est à partir de l’évacuation et de ce qui suit que tout va partir à vau-l’eau.

Pourtant on était bien partis et à fond dedans. Les personnages avaient des réflexions intéressantes, conscients que leur pays allait disparaître et potentiellement leur langue et culture avec, et l’univers restait diablement immersif. On se visualisait tout à fait dans leur situation, à subir les comportements dénués d’empathie des uns ou des autres ou la loi du plus fort tend à se développer à l’approche du chaos de l’évacuation et de la ruine financière de beaucoup ; on se projetait aussi aisément, perdus dans les cheminements administratifs bêtes et méchants qui décideraient d’un avenir plus ou moins radieux alors que le traumatisme de la fermeture du pays était encore tout chaud…Le gros problème est qu’au début on observe des personnages qui font tout pour s’en sortir pour préparer au mieux leur avenir, on les comprend, on aurait sûrement fait (pour certains) les mêmes choix qu’eux, tout s’emboite parfaitement puis c’est la dégringolade. Laura (Amaryllis April August) dont l’interprète est d’ailleurs excellente, est l’un des personnages majeurs et s’avère pleine de ressources et promesses. On s’attend à un protagoniste solide sans venir forcément voir qu’il s’agit en réalité d’une Kim Bauer qui va détruire, pierre par pierre, tout ce que le show avait de bon. Entre des revirements de choix de dernière minute qui vont, sans exagération, ruiner la vie de plusieurs personnages (une destruction bien aidée par son père, tout aussi impulsif et presque aussi bête qu’elle), des péripéties sans queue ni tête dignes donc de celles de la rejetonne de Jack Bauer (on parle bien d’aventures du niveau de celles de la saison 2), on ronge notre frein peu à peu jusqu’à nous crisper de plus en plus. A quoi diable sont donc nous en train d’assister ? On rira d’ailleurs de voir la série justifier le comportement de son personnage par le fait que « les frontières vont fermer, elle ne reverra peut-être jamais sa mère » alors qu’avant la fin de la série elle se sera baladée dans de nombreux pays, obtenant même à la fin un visa de tourisme pour aller ailleurs…on croit rêver. La série pose un cadre réaliste pour ensuite mieux le piétiner. En filigrane heureusement d’autres personnages tirent leur épingle du jeu même si certains nous ont fait très peur et marchaient dans les pas de Laura (en termes de stupidité). Ajoutons à cela également une histoire de dessin potentiellement prémonitoire avec un enfant qui aurait des visions, arc secondaire qui amènera tout de même au destin sordide d’un des personnages principaux (il apparait clairement complètement what the fuck et inutile de lui infliger ça), sous couvert de vouloir nous montrer que demain nous pourrions nous aussi nous retrouver migrants et finir comme lui, alors que le cheminement qui l’amène à subir cela est complétement abscons et guidé par les décisions débiles de Laura…et on se met alors à espérer que la série se termine en ayant eu un minimum de sens car à ce moment-là et quasiment jusqu’à la fin, toute logique s’effrite devant nos yeux effarés.


Brillante durant ses premiers épisodes qui traitent, à travers les yeux de personnages et de leur entourage, de la fermeture définitive du Danemark, Families Like Ours finit par resserrer son récit pour à priori mieux le densifier avant de finalement sombrer dans un tas d’idées stupides et contreproductives où l’on en vient à serrer les fesses pour espérer que les personnages s’en tirent sans que leurs décisions n’aient annulées tout l’intérêt même de la série. On passe ainsi d’un enjeu extrêmement dense aux conséquences très concrètes, davantage liées à la débilité du personnage de Laura, qu’au contexte en lui-même. Une crétinerie de haut vol qui se réverbérera sur le destin de plusieurs personnages, causant un gâchis généralisé qui aurait largement pu être évité. La série s’avère donc parfois trop bête et énervante pour marquer positivement les esprits même si, et c’est toute l’ironie, elle regorge aussi de moments de bravoures intellectuels qui aurait pu en faire un incontournable.

Crédits : Canal+

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