Critiques Cinéma

A SON IMAGE (Critique)

 

SYNOPSIS : Fragments de la vie d’Antonia, jeune photographe de Corse-Matin à Ajaccio. Son engagement, ses amis, ses amours se mélangent aux grands événements de l’histoire politique de l’île, des années 1980 à l’aube du XXIe siècle. C’est la fresque d’une génération.

Adapté du roman éponyme de Jérôme Ferrari, publié en 2018, A son image fait revenir son réalisateur Thierry De Peretti sur sa terre d’origine en Corse après être allé investiguer du côté du très remarqué Enquête sur un scandale d’état (2021). Une terre natale qu’il avait déjà passionnément filmée avec Une vie violente (2017). Un cinéaste dont on sait qu’il peut se démarquer par une belle sensibilité, ce qui est indéniablement le cas dans A son image. Antonia nous embarque avec elle dans un parcours de femme sensible, amoureuse et en en quête de sens. Elle côtoie les militants Corses mais sans réellement s’y engager. Ce n’est pas sa recherche première contrairement à son premier grand amour, elle n’y consacrera pas sa vie. Si elle partage la cause, elle ne veut pas s’y enfermer tant elle pressent qu’aucun retour en arrière n’est possible, ce qui s’avérera pleinement réaliste au regard des règlements de compte meurtriers pour simples désaccords idéologiques. Des amis qui tuent des amis. Elle sera au milieu et prenant même parfois de macabres photos puisqu’il le faut.


Telle va la vie d’Antonia entre sphère de l’intime et une cause politique qui la relègue parfois à un rôle d’assistante. Avec notamment des militants qui discutent interminablement sur leurs pensées idéologiques, et toujours cette volonté d’être plus engagé que le voisin. Le cinéaste nous épargne plutôt ces débats pour nous montrer ce qu’ils génèrent autant chez Antonia que tous les personnages. Leurs réactions physiques, leurs gestuelles. C’est ici que A son image touche à son objet. C’est une affaire de sensibilité, d’émotions, de corps qui parlent plus que ce qu’ils disent qu’on imagine volontiers. Un film d’intériorité et d’une grande finesse.


C’est aussi en miroir de ce film de l’âme un film de l’image. Bien sûr les paysages romantiques de l’ile de beauté mais bien au-delà, à travers le rapport d’Antonia à la photographie. Elle fige des images, qu’elle pense parfois inutiles, ineptes comme le bal de l’EPHAD ou la fête de l’école. Mais elle fige en fait la vie. A peine le clic de l’appareil, et tout disparaît. C’est alors toute la mise en scène qui suit ce profond mouvement entre lenteurs et par moments violentes accélérations avec des épisodes d’accident de voiture, de meurtres. A son image, c’est aussi une affaire de mélancolie, un décryptage de nos empêchements, de nos aspirations contrariées. La fable est touchante car empathique dans ce qui est finalement comme une confrontation entre la recherche du bonheur et l’obstination de l’honneur. Le réalisateur est un véritable funambule tant il mêle la petite à la grande histoire, avec un focus permanent qui s’attache à la sphère de l’intime, peut-être la seule qui compte finalement. Et puis, comme A son image est un film de vie, l’humour n’y est évidemment pas écarté, avec notamment le rôle du père d’Antonia et de véritables moments hilarants, face à sa fille qui quand elle veut partir sur un terrain de guerre, ironise dans sa colère « c’est sûr qu’ils attendent là-bas« , mu qu’il est par le souci de protection paternel. Et il va enchainer l’acidité dans un vrai festival de vannes car elles sont spontanées.


Le casting est porté avec talent et grâce par Clara-Maria Laredo dans le rôle d’Antonia, qui avec une infinie sobriété arrive pourtant à faire passer tant d’émotions. La femme amoureuse évidemment, la résignation, et la constance de l’empêchement. Elle est particulièrement touchante dans la simplicité qui est la sienne. Au final, A son image malgré le sujet traité, est délicat, subtil et en partageant l’itinéraire d’Antonia, c’est nous tous que le film scrute dans les yeux, et qui nous invite donc à la réciprocité pour un film qui se regarde avec l’émotion de la plus grande histoire du monde : la vie.

Titre Original: A SON IMAGE

Réalisé par : Thierry de Peretti

Casting: Clara-Maria Laredo, Marc Antonu Mozziconacci, Louis Starace    …

Genre: Drame

Sortie le: 4 septembre 2024

Distribué par: Pyramide distribution

TRÈS BIEN

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