Critiques Cinéma

CHALLENGERS (Critique)

SYNOPSIS : Durant leurs études, Patrick et Art, tombent amoureux de Tashi. À la fois amis, amants et rivaux, ils voient tous les trois leurs chemins se recroiser des années plus tard. Leur passé et leur présent s’entrechoquent et des tensions jusque-là inavouées refont surface.

Chaque sortie d’un film de Luca Guadagnino est un évènement à part entière. Cela tombe bien, Challengers, son nouveau bijou, débarque ce mercredi en salles. La dernière fois que nous avions eu la chance de visionner un film de Monsieur Guadagnino c’était en 2022 lors de la sortie de son incroyable Bones and All (quel film !). Changement d’ambiance aujourd’hui, nul cannibalisme mais un triangle amoureux et du tennis. Point commun avec Bones and All : la capacité de Luca Guadagnino à s’entourer et à diriger les stars montantes du moment puisqu’après Timothée Chalamet c’est au tour de Zendaya d’évoluer devant sa caméra. Après avoir visionné la bande annonce et lu le pitch de Challengers, difficile toutefois de savoir au premier abord ce que la bête avait sous le capot. Et bien rassurez-vous, loin d’être un divertissement racoleur à destination des teenagers, Challengers offre un scénario malin qui saura ravir les amatrices et amateurs de relations humaines complexes…pour le tennis, disons qu’il est davantage un prétexte que le cœur du sujet donc il ne faudra pas rester bloqué sur cet aspect pour déclencher un élan de motivation ayant vocation à se déplacer jusqu’à la salle de cinéma (l’actualité en termes de support mettant en scène du tennis c’est davantage la sortie, dans quelques jours, du prometteur TopSpin 2K25 où la célèbre licence de jeux vidéo fait son comeback après des années de diète). Étudions de plus près l’issue du match.



Challengers est une surprise inattendue dotée d’un scénario loin de se faciliter la vie. Art (Mike Faist) et Patrick (Josh O’Connor) deux amis très proches tombent amoureux de Tashi (Zendaya), jeune prodige du tennis. Finalement réunis dans une chambre d’hôtel au sein de laquelle le trio s’adonne à une hallucinante scène de baisers, Tashi jette son dévolu sur l’un des deux garçons, donnant le premier coup de pelle dans le trou qui ne fera que se creuser davantage au sein de la relation d’Art et de Patrick. De ce concept de départ Challengers développe une histoire complexe qui s’étend sur plusieurs années. En effet le film, loin d’être linéaire compte bien explorer toutes les failles et possibilités offertes par ce trio au sein duquel Tashi ne sera pas avare en toxicité, elle qui finit sur la touche après une blessure, alors qu’elle vivait majoritairement du pouvoir et de la supériorité que lui conférait le tennis. Débute alors un ensemble d’évènements à la narration exigeante afin que le spectateur remette toutes les pièces dans le bon ordre pour comprendre comment ce qu’il a vu deux minutes plus tôt a pu mener à un postulat présentant l’extrême inverse juste après. C’est sûrement là le seul défaut majeur de Challengers : sa narration un peu chaotique. Comme nous le disions le film est loin de se faciliter la vie et encore moins celle du spectateur. Il est donc fréquent (voire systématique) d’avoir des retours en arrière au cours du film afin de montrer un passage qui avait volontairement été occulté jusqu’à présent. Ce procédé est poussé à son paroxysme lorsque juste après un retour en arrière on nous présente un autre retour en arrière. La narration navigue alors plus vite qu’une balle de tennis, obligeant le spectateur à ronger un peu son frein puisqu’au-delà du procédé en lui-même, ce dernier coupe certaines scènes dans leur élan, occasionnant parfois de la frustration ou un léger ras-le-bol.

En dehors de ce parti pris un peu agaçant mais pas rebutant, le film brille à tous les niveaux. Son talent pour faire vivre son triangle amoureux et les comportements toxiques des uns et des autres qui ne cessent d’alimenter cette entité increvable est assez exceptionnel, bien aidé par un casting archi convaincant et bourré d’alchimie. Explorant toutes les combinaisons possibles il a ce caractère suffocant où chacun de ses personnages sous tension extrême sur le terrain comme à la vie civile communique toutes ses névroses et son stress aux spectateurs. Accompagné d’une bande originale aux petits oignons composée par Trent Reznor et Atticus Ross (déjà à l’œuvre sur Bones and All) le film achève de nous embarquer dans sa folle histoire pour nous placer au sein de péripéties soutenues habillées d’une musique pulsative qui contribue à nous faire entrer pleinement dans cette « transe  » de vie hallucinée. Habile, le film n’hésite pas à réinvoquer des éléments introduits plus tôt pour parachever la métaphore brossée par l’utilisation du tennis et se sert habilement de ce sport pour convoquer, cultiver, amadouer ou décupler chaque ingrédient qu’il garde de côté pour relancer le rythme de sa machinerie infernale qui n’a jamais le temps de ralentir.


Challengers est une surprise que l’on n’attendait pas forcément. Un peu dubitatifs face à la promotion d’un film à l’allure très stylisée et au parti pris un peu mystérieux, nous avions pourtant omis dans l’équation qu’il était dirigé par le talentueux Luca Guadagnino jamais avare en surprises et en savoir-faire. Il en ressort un spectacle extrêmement original comme on n’en voit finalement jamais, avec un scénario solide et intelligent, une réalisation qui ne se repose jamais sur ses lauriers et a la lourde tâche de devoir dynamiser à outrance une histoire dont le rythme ne doit jamais retomber. Avec son casting exemplaire et sa musique aussi hypnotisante qu’écrasante qui accompagne la frénésie ambiante…on peut le dire, Challengers frappe vite et fort. Jeu, set et match.

 

Titre original: CHALLENGERS

Réalisé par:  Luca Guadagnino

Casting: Zendaya, Josh O’Connor, Mike Faist…

Genre: Drame, Romance

Sortie le: 24 Avril 2024

Distribué par : Warner Bros. France

EXCELLENT

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