Critiques Cinéma

MONKEY MAN (Critique)

SYNOPSIS : En Inde, un jeune homme sort de prison. Il se retrouve dans un monde où règne la cupidité des chefs d’entreprise et, à l’inverse, l’érosion des valeurs spirituelles.

Qui aurait pu prévoir que le passage à la réalisation du comédien Dev Patel (découvert jeune dans Skins, puis vu au cinéma dans Slumdog Millionaire, Chappie, Lion ou encore The Green Knight) prendrait la forme de ce très curieux Monkey Man ? Si sa promotion évoque grandement les excès de néons et de bastons ultra-pulp de John Wick (auquel la silhouette de Patel, cheveux longs et veste de costard, fait frontalement penser), il s’avère que le premier long-métrage conduit intégralement par son comédien principal a d’autres ambitions bien plus singulières qu’un énième rip-off sans originalité… Monkey Man raconte le destin de son protagoniste, jamais réellement nommé mais désigné par son passé traumatique et son désir de vengeance. Le jour, il travaille au service dans un hôtel réservé aux personnalités influentes de Mumbai. La nuit, il revêt un masque de singe et perd des combats clandestins truqués pour se faire de l’argent. Mais lorsqu’il aperçoit la possibilité de prendre sa revanche sur ceux qui lui ont tout enlevé, le « Kid » met le pied dans un terrible engrenage…



Produit par Monkey Paw, la société de production de Jordan Peele qui y applique son tampon « approuvé », ce premier long-métrage conçu par Dev Patel (il co-écrit également son scénario avec John Collee et Paul Angunawela) renoue avec les origines de son metteur en scène, proposant de poser ses caméras en plein Mumbai pour y explorer la corruption des élites, la violence de certaines approches de la spiritualité mais également la soif de pouvoir de ses politiques. Le film suit la perspective de son jeune protagoniste vengeur par la structure d’un revenge-movie bien rôdé où l’on découvre avec surprise un grand appétit spirituel. En explorant des coins de l’Inde rarement approchés au cinéma (la légende d’Hanumān, les temples, la communauté hijra…), Patel conçoit avec son directeur de la photographie Sharone Meir un vrai univers aux frontières de l’onirique, gardant constamment sa caméra en mouvement – que ce soit dans ses scènes d’action ultra dynamiques ou pendant les séquences sous hallucinogène qui composent les pertes de repères et les reconstructions intimistes de son héros. La mise en scène profite alors de ce contexte richissime pour ne prendre aucun gant et pour exploser les acquis, se livrant à un véritable festival d’idées rythmiques pour garder la singularité de l’histoire racontée par le film. Monkey Man est une véritable montagne russe, probablement surchargée et pesée par une structure narrative un peu brisée par ses ruptures (notamment dans un ventre mou au milieu du film), mais terriblement impressionnant dans ses ambitions intimistes et dans sa propre approche de son univers graphique.

Pour échapper aux fantômes de John Wick, Patel et son équipe exorcisent ses influences grâce à quelques micro-références et avec une vraie tendance à tout miser sur l’onirisme de sa proposition plutôt que de faire une emphase non-stop sur sa propre violence. Monkey Man est un bain de sang, c’est sûr, mais c’est avant tout le « voyage du héros » d’un enfant en quête de vengeance habité par la détermination d’une légende locale. Son désir de justice embarque alors le film dans un tourbillon politique, n’hésitant absolument pas à mettre le doigt sur certaines problématiques sociétales et autres abus autoritaires, suffisamment bien exploités pour rester particulièrement notables dans un film de ce calibre.



En résulte alors un long-métrage bouillonnant et furieusement vengeresque, en marge de ses semblables par son traitement hautement spirituel et par l’application généreuse de ses séquences d’action (bien qu’elles soient parfois pesées par un sur-découpage et par des caméras trop tremblotantes). Habité par la performance dantesque d’un Dev Patel animal et par les excellentes présences de Sikandar Kher, Pitobash, Sharlto Copley, Vipin Sharma et Sobhita Dhulipala, le film s’affirme brutalement mais sensiblement comme l’un des premiers films les plus uniques et les plus sensationnels de l’année, Patel conférant à l’ensemble une magie furieuse totalement hors-piste qui fournit son lot de séquences mémorables et de coups fatals simplement jouissifs. Monkey Man est une mécanique en acier trempé, à la fois burnée et cramée par ses propres ambitions, réussissant à être sensible et humaniste tout en enflammant la mèche de la société putride et corrompue qu’elle met en scène.

Titre original: MONKEY MAN

Réalisé par:  Dev Patel

Casting: Dev Patel, Sikandar Kher, Sharlto Copley…

Genre: Action, Thriller

Sortie le: 17 avril 2024

Distribué par : Universal Pictures International France

EXCELLENT

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