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SYNOPSIS : Fallout raconte l’histoire des survivants d’un monde où il n’y a presque plus rien à avoir. 200 ans après l’apocalypse, les habitants des luxueux abris antiatomiques sont contraints de retourner dans le paysage apocalyptique irradié que leurs ancêtres ont laissé derrière eux et se retrouvent sous le choc de découvrir ce monde incroyablement complexe, joyeusement étrange et extrêmement violent qui les attend.
Drôle de timing : alors que Christopher Nolan vient de boucler son Oppenheimer avec un très grand succès public et une poignée d’Oscars, c’est au tour de son frère Jonathan de passer de l’autre côté de l’ère atomique en adaptant la saga vidéoludique culte. Fallout, la série, démarre sur une apocalypse nucléaire, la même qui boucle le film de Christopher dans une prémonition terrifiante du physicien. D’un Nolan à un autre, cette adaptation menée par Prime Video et Bethesda se voit dotée d’une mission ardue, à savoir réussir à trouver un sens à l’existence d’une transposition télévisée des jeux vidéo du même nom. Le premier argument de Fallout se trouve dans l’histoire qu’elle raconte. Choisie originale – plutôt qu’un récit déjà raconté dans les jeux – cette toute nouvelle aventure prend le pari d’installer son monde dévasté par le prisme d’une triade de personnages conçus pour l’occasion. Tout d’abord, il y a Lucy. Jeune habitante de l’Abri 33 construit par Vault-Tec, elle est d’une nature curieuse et naïve. Lorsque l’Abri se retrouve menacé par l’extérieur, Lucy décide d’en sortir pour affronter le vrai monde. Dehors, on rencontre Maximus, jeune recrue de la Confrérie d’Acier, des soldats portant de massives armures en métal. Alors qu’il est fait écuyer d’un Chevalier peu sympathique, il se retrouve par un concours de circonstance à porter l’armure. Au milieu d’un champ de bataille radioactif qui se profile, une Goule mercenaire, ancien acteur star d’Hollywood, cherche à encaisser des primes… Ces trois personnages, issus de trois mondes radicalement différents, se confrontent alors dans la recherche d’un artéfact qui pourrait changer la face du monde…

Créée par Geneva Robertson-Dworet et Graham Wagner, sous la production de Jonathan Nolan et Lisa Joy (qui réalisent et écrivent les trois premiers épisodes), ce changement de médium de la saga Fallout a de quoi attirer les curieux, de par le mélange de genres que proposent les jeux vidéo. Se balisant dans le registre de l’uchronie (changer le passé pour réinventer un futur ; ici, en l’occurrence, la Guerre Froide a escaladé jusqu’à l’Apocalypse nucléaire), suivant les rares survivants de la fin du monde séparés par leurs modes de vie (les riches se sont cachés dans des abris antiatomiques et vivent dans une fausse harmonie alors qu’à l’extérieur la violence et les radiations sont reines), le concept de l’univers Fallout propose de s’aventurer dans un foisonnant récit de science-fiction aux embouchures de Western et de thriller, dans une démarche visuelle et musicale rétrofuturiste. La série accompagne l’idée, rendant la présence de Nolan et Joy d’autant plus logique qu’ils ont déjà maîtrisé le western d’anticipation dans leur Westworld. La force et la singularité de Fallout se trouve alors dans son ton, oscillant entre le vrai suspense et l’humour morbide omniprésent, s’offrant un grand spectacle diaboliquement bien écrit et savamment jouissif. Perdre un membre devient un inconvénient routinier tant les corps sont maltraités par l’Amérique postapocalyptique dans laquelle errent nos personnages, donnant à ses réalisateurs et ses scénaristes le moyen de planter les graines d’une adaptation extrêmement riche qui s’attaque aux racines de sa franchise. La série embrasse alors le sarcasme lancinant des jeux vidéo en traitant des ravages du consumérisme par le prisme de multinationales qui capitalisent sur la fin du monde.

Le scénario de Fallout se révèle très solidement construit, empilant les intrigues et les mystères pour lancer le spectateur dans une spirale de révélations qui fabriquent la fin de la saison. Cette surcharge a cependant un défaut majeur, donnant au premier épisode une narration un brin saturée où l’on ne perçoit pas encore tout à fait la direction et le ton de la série. Ces incertitudes se dissipent alors dès l’ « impasse mexicaine » qui fait exploser la fin de l’épisode 2, laquelle fait se croiser les arcs des trois personnages principaux en posant clairement ses enjeux, son humour cinglant, sa soif d’action bourrine et sa violence graphique qui ne s’arrête devant rien. Fallout ne se refuse rien et réussit pleinement ce qu’elle entreprend, notamment grâce à une mise en scène extrêmement efficace, une bande-originale génialement rétro (des titres préexistants à la pelle emballés par les jolies compositions de Ramin Djawadi) et une écriture très précise qui donne une place de luxe à ses comédiens. Ella Purnell est excellente dans la peau de cette naïve enfant d’Abri, découvrant la sauvagerie du monde extérieur et se retrouvant au fil de ses aventures face au pire de la violence humaine. Aaron Moten, même si son Maximus est probablement le personnage le plus faible du trio de tête, accomplit sa mission avec beaucoup de justesse, en incarnant ce jeune survivant à l’envie appuyée de trouver sa place dans un monde écorché. Mais malgré les talents de l’intégralité du casting, c’est Walton Goggins qui l’emporte dans un rôle de composition comme Hollywood en fournit bien peu. Sous un maquillage zombiesque, faisant d’une Goule sans foi ni loi inspirée par les classiques du western un protagoniste follement charismatique et méchamment violent, le comédien s’offre une interprétation en or massif qui restera dans les mémoires, à n’en pas douter. On retrouve également à l’affiche un beau parterre de stars, avec notamment Kyle MacLachlan, Moisés Arias, Sarita Choudhury ou encore Michael Emerson au rendez-vous.

Si la tâche semblait ardue à cause de la liberté de ton assumée et de la proposition graphique de la saga qu’elle adapte, cette relecture télévisuelle de Fallout fait un carton plein, grâce à une approche habile de son univers, une charte graphique appliquée et une absence de retenue qui fait un bien fou. Dans un jeu de mystères, de bains de sang, de blagues crasses et de déflagrations visuelles, Fallout façon 2024 réinvente la fin du monde avec une singularité réjouissante, une histoire diaboliquement addictive et une intelligence formelle fascinante. Avec, à la fin du 8ème et dernier épisode, la piquante envie de retourner faire un tour dans l’Abri 33…
Crédits : Prime Video








































































































































