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SYNOPSIS : Alors qu’une série de vols a lieu en salle des profs, Carla Nowak mène l’enquête dans le collège où elle enseigne. Très vite, tout l’établissement est ébranlé par ses découvertes.
Ce n’est rien d’autre que le partage de souvenirs d’enfance entre le réalisateur Ilker Çatak et son co-scénariste, Johannes Duncker qui explique la genèse de La salle des profs. Une fois son sujet trouvé, le réalisateur l’a creusé et trituré en revenant au sein de son propre ancien collège pour mieux appréhender les rouages de ce double collectif qui cohabite presque à marche forcée, les profs et les élèves. A noter que La Salle des profs, après avoir conquis les cœurs germaniques, avec 5 récompenses dont celle du meilleur film lors de la cérémonie outre-Rhin équivalente à nos César, concourt l’air de rien aux Oscars 2024 dans la catégorie Meilleur film international, aux côtés de Moi, capitaine, Perfect Days, Le Cercle des neiges et La Zone d’intérêt. C’est comme une tension sociologique permanente qui nous est ici communiquée telle une urgence. C’est vraiment toute cette propension artistique de Ilker Çatak de filmer un collectif qui va progressivement s’écrouler. Et pourtant, ce qui sidère dans La salle des profs, est que cette chute va se faire malgré que le spectateur soit un peu avec tout le monde. On comprend chaque protagoniste, ses motivations, ses actions, l’empathie fonctionne à plein. Et invariablement, malgré cette juxtaposition de légitimités, on assiste à l’irrémédiable engrenage de la machine institutionnelle qui se grippe, et un tout un système qui va dérailler et très souvent vers l’absurdité la plus totale, sans qu’aucun individu ne dérape vraiment lui-même.

C’est un peu une formation en systémie avec les moyens du cinéma et forcément c’est passionnant ! Le seul moment où l’individu peut devenir bête dans La salle des profs, c’est quand il va faire groupe, autant les collégiens prêts à se rebeller contre tout ce qui bouge pourvu qu’ils aient le sentiment que c’est injuste que les enseignants, autant d’adultes qui ensemble dans une crasse inconséquence vient juger aux seules apparences, sans jamais chercher à ne pas rester en surface. C’est ici semble-t-il au-delà de l’intérêt du cinéaste pour le collectif de la chose scolaire, une véritable allégorie de nos déliquescences contemporaines. On crée des murs, des cadres, des… systèmes, mais on a beau penser bien faire, justement rien n’y fait. L’homme se met toujours dans cette perpétuelle situation de tout bruler, sciemment ou malgré lui, mais avec un résultat toujours identique.

Tout va alors y passer, le droit à l’erreur, à la seconde chance mais les meutes hurlent toujours plus forts. A cet égard, la scène du cri libérateur proposée par Carla à ses élèves est un modèle de salutaire décharge, mais même celle-ci ne suffira pas à remettre de l’intelligence collective et de la cohérence. Pas plus que ses autres tentatives, comme celle de l’union des corps en cours de sports. Le tout servi par une mise en scène millimétrée, chirurgicale et jouant parfois même sur les symétries. Le collège devient un angoissant et harassant huis-clos dans des plans habiles, des astucieuses séquences qui font de l’enceinte un personnage clé du film. Le cadre c’est le règlement, c’est comment on se protège entre groupe sociaux, mais c’est aussi matériellement parlant les murs de l’enceinte de l’établissement scolaire. Des murs qui vont un peu nous étouffer, avec cette majoration de lancinants violons qui accrochent gentiment le spectateur au fauteuil fouge.

Au casting, la sobriété du jeu de Leonie Benesch dans le rôle de Carla est impressionnante. Pour un personnage tout en maîtrise qu’il est d’autant plus jouissif de voir exploser. A ce petit jeu-là, l’actrice rend une copie parfaite pour ce rôle de prof !! Ensuite, ce sont tous ces êtres bizarres et flippants nommés collégiens qui tiennent le devant de la scène, avec le souci d’authenticité de leur réalisateur, en ne créant pas une uniformité parmi eux, mais bien une série d’atypisme sans en faire des caisses. On les devine et c’est tout à fait crédible. Dans ce groupe d’ados, le jeune Leo Stettnisch dans le rôle d’Oskar est juste à tomber en parfait petit diable, du haut de son agaçant statut de petit génie des bacs à sables !! Au final, il serait possible d’assimiler La salle des profs à une sorte de thriller, mais il se démarque surtout par son anatomie d’une dégringolade collective, dans des mécanismes intuitifs et psychologiques assez passionnants. On en sort encore un peu plus convaincus de l’insatiable capacité de la nature humaine à se tirer une balle dans le pied !!

Titre Original: DAS LEHRERZIMMER
Réalisé par: İlker Çatak
Casting: Leonie Benesch, Michael Klammer, Rafael Stachowiak…
Genre: Drame
Sortie le: 6 mars 2024
Distribué par: Tandem
TRÈS BIEN
Catégories :Critiques Cinéma, Les années 2020








































































































































