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SYNOPSIS : À Cinecittà, dans l’Italie d’après-guerre, le réalisateur Alessandro Blasetti lance un casting pour trouver l’enfant de son prochain film. Maddalena y voit l’occasion pour sa fille Maria de vivre une vie meilleure. Elle sacrifie alors son mariage et ses économies pour lui offrir les leçons qui feront d’elle une star. Arrive enfin le grand jour des essais…
Bellissima est le troisième film de Luchino Visconti après La terre tremble (1948) et ce qui est considéré comme l’œuvre pionnière du néoréalisme, Ossessione en 1942. C’est aussi et surtout l’occasion d’offrir à Anna Magnani un inoubliable rôle, qui n’a pas pris une ride dans l’universalité de son aspiration à la réussite économique et sociale, quelle qu’en soit la puissance du sacrifice. Visconti va sans arrêt modifier le scénario original de Cesare Zavattini, pour en faire finalement comme une ode à Anna Magnani pour qui le cinéaste se prend de passion : « L’histoire était vraiment un prétexte. Le vrai sujet c’est Magnani. Je voulais faire avec elle le portrait d’une femme, d’une mère moderne, et je crois l’avoir assez bien réussi car Magnani m’a prêté son énorme talent, sa personnalité. C’est cela qui m’intéressait. Non pas tellement le milieu du cinéma. On a dit que j’avais voulu peindre ce milieu d’une façon ironique, méchante. Non, ce n’était qu’une conséquence. « On ne peut que lui donner raison, tant Visconti ne s’attarde pas ici sur les perfidies ordinaires du petit monde du septième art. Apposer une telle critique n’est pas autre chose pour ses auteurs que de cultiver le fameux entre-soi.

Car en effet, il est ici d’abord question de cette femme du peuple, de cette battante qui braille et bataille. C’est l’emblème d’une lutte sociale acerbe autant qu’universelle. Sa quête de progression, cette velléité d’émancipation, une détermination à la sortie de l’assignation, qui va rythmer la trame narrative et s’avérer dans certaines scènes assez bouleversantes. Au milieu, il y a la petite Maria. Avec notre recul d’aujourd’hui et l’évolution heureuse des droits de l’enfant, on s’aperçoit très vite d’un certain nombre de violences dont est victime la petite. On ne s’intéresse que peu à elle finalement en tant que sujet, mais plutôt en tant qu’objet de celle par qui l’argent pourrait couler à flots. Elle est trimballée dans cette Italie bruyante par une mère qui la traine, la tire et souvent la martyrise. La terrible solitude des enfants quand le soir venu, la lumière n’est plus. On n’est pas loin de La guerre des boutons de 1962 où on dressait les marmots à coups de gnôles et torgnoles.

Bellissima va filmer au plus près le pire des cynismes. Car dans cette aspiration capitalistique, Maddalena va se perdre, sa fille avec, dans cette fascination pour la gloire éphémère. Une drôle de résonance avec les feux de paille contemporains de la glorification permanente de la pire des médiocrités, tant qu’elle est vue à la télé !! C’est bien la première fois que Visconti ne s’inspire pas de la musique ou du théâtre, en filmant ainsi les maltraitances ordinaires d’une société décadente. Une profonde dénonciation qui fait écho et qui confrontera mère et fille à elles-mêmes dans un dénouement que nous tairons, mais quand même plein d’espoir en la nature humaine.

Au-delà du message très clair et dramatiquement satirique, Visconti avait tendance à affirmer que « le vrai sujet du film c’est la Magnani !! ». Oui, l’actrice est à peu près de tous les plans, elle est volcanique, tournoyante et nous insupporte autant dans son aveuglément qui l’oublie elle et sa fille, qu’elle nous touche profondément dans son enfermement de femme du peuple. Elle gouaille, hurle, crie, pleure, supplie, et déploie finalement une insensée palette d’émotions. Une véritable louve Romaine, qui à elle seule semble symboliser ici tout un prolétariat. Au final, Bellissima est un manifeste remarquablement prenant sur les errements du rêve et semble aujourd’hui nous mettre en garde sur un éclat trop brillant et brûlant pour en revenir à l’universelle émotion, la plus forte, la plus belle, celle de l’amour d’une mère pour sa fille.

Titre Original: BELLISSIMA
Réalisé par: Luchino Visconti
Casting: Anna Magnani, Walter Chiari, Tina Apicella…
Genre: Comédie dramatique
Sortie le: 12 Avril 1961
Reprise le : 31 Janvier 2024
Distribué par: Les Films du Camélia
EXCELLENT
Catégories :Critiques Cinéma, Les années 60








































































































































