Critiques Cinéma

CASSANDRO (Critique)

SYNOPSIS : L’histoire vraie de Saúl Armendáriz, un lutteur amateur gay d’El Paso, devenu une célébrité internationale après avoir créé le personnage « Exotico », également appelé le « Liberace de Lucha Libre ». Son personnage a bouleversé le monde machiste de la lutte et a changé sa vie. 

Nouvelle pièce rajoutée au catalogue original de la plateforme Prime Vidéo, menée par le réalisateur Roger Ross Williams qui y signe son premier long-métrage de fiction après ses réussites documentaires, Cassandro vise les cases du biopic type, revenant décortiquer l’icône qui lui donne son titre durant une courte reconstitution de son image sur écran. Avec à son service un Gael García Bernal impeccable et toujours aussi efficace, cette plongée à l’intérieur de la Lucha Libre se montre divertissante et bien menée, mais tourne pourtant un peu à vide malgré ses intentions plus qu’honorables. Cassandro raconte l’histoire de Saúl Armendáriz, et de sa folle et inattendue ascension au sein de la scène du catch mexicain des années 80. Alors un milieu très macho, calibré sur le culte de la masculinité, Saúl tente d’y trouver sa place en tant que combattant gay, et embrasse son exubérance en tombant le masque pour créer le personnage de Cassandro, un Exótico qui compte bien faire changer le monde de la Lucha Libre. En centrant son point de vue sur l’intimité de l’homme et de son cercle familial rapproché, traitant à la fois du rapport complexe mais puissant qu’il entretient avec sa mère – son seul repère – et des différends qui ont éloigné son père d’eux, Roger Ross Williams et son co-scénariste David Teague montent avec Cassandro une origin story colorée et introspective, qui s’intéresse avant tout à la naissance de son Héros. Cette échelle réduite, qui avance en tunnel à travers les différents points clés du début de sa carrière et de sa médiatisation, fonctionne très bien dans l’approche des émotions que le film vise, mais pose ses limites dans le monde qui est reconstitué autour de Saúl.

On comprend aisément la réticence du public de l’époque quant aux premières victoires et mises en lumière d’un Exótico (personnages créés de toute pièce, souvent incarnés par des catcheurs hétéros, habillés en Drag, fabriqués pour faire le spectacle et ne jamais gagner en fin de combat), à cause de l’ancrage profond du milieu dans la culture masculiniste, macho et homophobe. Et bien que le film explore le parcours de son héros, avec ses hauts et ses bas, il manque d’un certain degré de propos pour véritablement faire comprendre au spectateur à quel moment la bascule se fait au sein de l’opinion publique, bien que la scène du combat contre El Hijo del Santo dans son dernier tiers fasse naître une jolie poésie de la renaissance qui paraît plus symbolique qu’autre chose.



Mais ces inconsistances formelles, qui laissent échapper la perfection de son récit, n’empêchent certainement pas Cassandro d’être une peinture flashy et entraînante de son personnage phare, même si on n’aurait pas été contre une once de folie visuelle en plus au sommet de cette proposition. Le film confirme ses ambitions intimistes avec cette jolie histoire d’acceptation (ou non) familiale, laissant les relations du héros rythmer le déroulé de l’intrigue sous une bande-originale oscillant entre les compositions presque westerniennes de Marcelo Zarvos et les needle drops discos de sa playlist mexicaine à souhait. Imprimant un impressionnant Gael García Bernal, s’abandonnant à cet alter-ego queer à la blondeur incandescente, et un casting intense dans ses frasques émotionnelles (on y retrouve Roberta Colindrez, Perla De La Rosa, Raúl Castillo, Bad Bunny et Joaquin Cosio), pour conter cette ascension personnelle au-delà de la réalité déjà explorée par le long-métrage documentaire Cassandro the Exotico ! de Marie Losier en 2018,

Cassandro fait figure de biopic un peu trop sage malgré son envie de transcender l’écran de son univers mexicano-pop. L’émotion qui se dégage de cette relation mère-fils et de cette recherche de l’acceptation d’un gamin fan de catch en processus d’affirmation fonctionne le temps de son récit unilatéral, mais finit par laisser un léger goût d’inachevé au bout du parcours, comme si une partie de l’histoire était restée non-dite. Cela dit, Roger Ross Williams réussit tout de même à construire du beau à l’intérieur d’un réel pas toujours agréable, et cela suffit largement à faire de Cassandro une jolie proposition, à la fois esthétique et thématique, qu’on aurait aimé voir plus ample et plus ambitieuse.

Titre Original: CASSANDRO

Réalisé par : Roger Ross Williams

Casting : Gael García Bernal, Roberta Colindrez, Bad Bunny …

Genre: Drame, Biopic

Sortie le : 22 septembre 2023

Distribué par: Prime Vidéo

BIEN

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